SpaceX a « presque » effectué avec succès, jeudi 20 avril 2023, la première phase du premier vol d’essai non habité de Starship, la fusée la plus grande et la plus puissante jamais construite, dans le but d’envoyer des astronautes sur la Lune et éventuellement au-delà — vers Mars. Elle est conçue pour être totalement réutilisable. Si les tests n’ont été concluants que pour la première phase, il faut considérer que la fusée n’avait jamais volé dans sa configuration complète, propulsée par un premier étage plus puissant que jamais. Le fait que le vaisseau a pu atteindre Max Q avant de perdre le contrôle et d’exploser représente tout de même une avancée majeure pour SpaceX.
Lundi 17 avril, SpaceX a effectué sa première tentative de lancement de son prototype du Starship dans l’espace, mais elle fut avortée. Comme le rapportait le New-York Times, Elon Musk déclarait lors d’une discussion audio avec des utilisateurs de Twitter, dimanche soir : « Nous mourons d’envie de faire décoller cette fusée. Succès peut-être, excitation garantie ! » et rappelait « qu’il y a un million de façons dont cette fusée pourrait échouer ».
C’est ainsi que SpaceX a annulé cette tentative alors qu’il restait environ neuf minutes au compte à rebours, invoquant un problème de pressurisation apparemment causé par une valve gelée. L’autorisation de vol fournie par la FAA (Fédération Américaine de l’Aviation) a été renouvelée pour jeudi 20 avril. Malgré de faibles attentes pour le lancement de lundi de la part d’Elon Musk, la fusée a décollé !
La fusée de tous les superlatifs
Le vaisseau spatial Starship, de 50 mètres de haut, et la fusée Super Heavy de SpaceX, de 70 mètres — collectivement appelés Starship — représentent un système de transport entièrement réutilisable conçu pour transporter à la fois l’équipage et la cargaison vers l’orbite terrestre, la Lune, Mars et au-delà. Starship comprend le lanceur le plus puissant jamais développé, capable de transporter jusqu’à 150 tonnes métriques entièrement réutilisables et 250 tonnes métriques consommables.
Super Heavy (le propulseur) se charge de la première étape du système de lancement Starship. Propulsé par 33 moteurs Raptor utilisant du méthane liquide et de l’oxygène liquide, Super Heavy est entièrement réutilisable et rentrera dans l’atmosphère terrestre pour atterrir sur le site de lancement.
Le moteur Raptor est un moteur à combustion étagée méthane-oxygène réutilisable qui alimente le système Starship. Il possède deux fois la poussée du moteur du Falcon 9, Merlin. Starship sera propulsé par six moteurs, trois moteurs Raptor et trois Raptor Vacuum, conçus pour une utilisation dans le vide spatial. Super Heavy sera propulsé par 33 moteurs Raptor, dont 13 au centre et les 20 restants autour de l’extrémité arrière du booster, créant plus du double de la poussée des fusées Saturn V utilisées pour envoyer les astronautes d’Apollo sur la Lune.
Un vol d’essai pour de futurs voyages
À ce jour, l’équipe de SpaceX a effectué plusieurs essais en vol sous-orbital de l’étage supérieur de Starship depuis Starbase, démontrant avec succès une approche sans précédent du vol contrôlé, comme le rappelle un communiqué. Ces essais en vol ont permis de valider la conception du véhicule, prouvant que Starship peut voler à travers la phase subsonique d’entrée avant de rallumer ses moteurs et de se retourner en configuration verticale pour l’atterrissage.
En plus des tests de l’étage supérieur de Starship, l’équipe a effectué de nombreux tests de la fusée Super Heavy, qui incluent les mises à feu statiques de plus en plus complexes qui ont conduit à un test du moteur 31-Raptor de durée complète — le plus grand nombre d’allumages simultanés de moteurs de fusée de l’histoire.
L’équipe a également construit la plus haute tour de lancement et de capture de fusées au monde. Avec ses 146 mètres de haut, la tour de lancement et de capture est conçue pour prendre en charge l’intégration, le lancement et la capture du propulseur de fusée Super Heavy. Pour le premier essai en vol cependant, l’équipe n’a pas tenté un atterrissage vertical de Starship ou une capture du booster Super Heavy.
Le vol d’essai du jour ne devait durer qu’une heure et demie (sans que le vaisseau soit en orbite complète autour de la Terre). Après qu’il ait atteint la barre des deux minutes après le lancement, le booster a reçu l’ordre de se séparer afin de tomber dans le golfe du Mexique. Mais malheureusement, l’ensemble a commencé à faire des loopings incontrôlés avant d’exploser pour clore le spectacle. Starship est conçu pour être entièrement réutilisable (les bras de la tour doivent rattraper le deuxième étage au vol, et le premier étage doit atterrir sur une plateforme).
Elon Musk a déclaré dimanche soir que l’un des principaux objectifs du vol était d’amener la fusée à une bonne distance du site de lancement sans que quelque chose se passe mal. Il souligne : « Il suffit de ne pas faire exploser la rampe de lancement », et ce fut le cas !
La NASA finance SpaceX pour la construction d’une version alternative du véhicule visant à transporter les astronautes de l’orbite lunaire jusqu’à la surface de la Lune pour les missions Artemis III et IV, plus tard dans la décennie. Le vaisseau spatial est également au cœur de la vision de Musk d’envoyer des colons sur Mars, grâce au lanceur réutilisable, permettant de réduire les coûts de lancement des charges utiles en orbite. Chaque vol de Starship pourrait éventuellement coûter « moins de 10 millions de dollars », une véritable opportunité pour les agences comme la NASA.
SpaceX prévoit éventuellement de mettre un vaisseau spatial en orbite terrestre basse, puis de le ravitailler avec des véhicules-citernes (essentiellement le vaisseau spatial Starship sans les fenêtres), afin qu’il puisse continuer son voyage vers Mars ou au-delà. Le remplissage en orbite permet de transporter jusqu’à 100 tonnes jusqu’à Mars. Et si le vaisseau-citerne a une capacité de réutilisation élevée, le coût principal est uniquement celui de l’oxygène et du méthane, qui est extrêmement faible.
VIDÉO : Récapitulatif de la transmission en direct du lancement, par SpaceX :