Vous avez de l’imagination et possédez un bon coup de crayon ? Vous êtes passionné de mangas ? Alors faites de ce hobby votre nouveau métier et devenez mangaka ! Si la profession est particulièrement répandue au Japon, les mangakas sont pour le moment peu nombreux en France, c’est donc peut-être le moment de faire votre place dans le secteur.
Akira Toriyama, Katsuhiro Ōtomo, Tsugumi Ōba, Takeshi Obata, Eiichirō Oda… Ces noms vous évoquent-ils quelque chose ? Ce sont en effet de célèbres auteurs de bandes dessinées japonaises (ou mangas), à l’origine des non moins célèbres Dr Slump, Dragon Ball (Toriyama), Akira (Ōtomo), Death Note (Ōba et Obata) et One Piece (Oda) entre autres. Le mangaka écrit et/ou illustre des mangas. Selon le mangaka Shūhō Satō (illustrateur de Umizaru et de Say Hello to Black Jack), en 2009, 5300 mangakas ont eu l’honneur de voir l’un de leurs titres édité en tome relié.
Comme pour de nombreuses professions similaires, les revenus du mangaka ne sont pas fixes. Le mangaka touche en moyenne 5 à 10% des ventes ; bien entendu, les revenus sont fonction de sa renommée. Ceux qui ont la chance de se trouver dans le top 100 des mangas les plus populaires perçoivent en moyenne 70 millions de yens (soit près de 600 000 euros) de droits d’auteur, précise Satō sur son compte Twitter. Ainsi, au Japon, pour qu’un mangaka touche le même salaire mensuel qu’un employé, il doit vendre au moins 120 000 exemplaires dans l’année.
Maîtriser les « codes » du manga
Cela fait plusieurs années maintenant que les mangas ont conquis l’Occident et le métier de mangaka attire de plus en plus d’artistes en herbe — en particulier parmi les lecteurs assidus de ces petites bandes dessinées. Il faut néanmoins garder à l’esprit que la profession est très exigeante ; avant de se faire un nom dans le secteur, il est généralement nécessaire de porter deux casquettes, celle de scénariste et d’illustrateur, ce qui nécessite d’avoir un minimum de talent dans les deux disciplines.
Mais comme évoqué dans cette interview de Louis – un jeune homme de 24 ans, ancien salarié du génie civil, qui s’est récemment reconverti en mangaka – il est également possible de collaborer avec une autre personne qui assurera, au choix, le travail de narration ou d’illustration. Le jeune mangaka confie d’ailleurs qu’il a conservé en partie son ancien métier : aujourd’hui, la majorité de ses revenus proviennent de la réalisation de synthèses techniques, qu’il effectue en tant qu’auto-entrepreneur. Cette stratégie lui permet de faire ses premiers pas en tant que mangaka plus sereinement.
Quelles qualités et compétences requiert ce métier insolite ? La première qualité est évidemment d’être très créatif, tant au niveau rédactionnel qu’artistique. Patience et minutie sont également de mise. Il faut bien entendu savoir dessiner les mangas, dont les codes visuels sont très précis et caractéristiques. Pour commencer, la composition des planches est différente (sans oublier que les mangas se lisent du coin supérieur droit au coin inférieur gauche) et les cases peuvent même être collées les unes aux autres, et de forme biseautée.
La même scène est parfois dessinée sous plusieurs angles ; le découpage des scènes n’est d’ailleurs pas sans rappeler celui utilisé au cinéma et les zooms sur les expressions faciales et sur le regard sont nombreux. Les dessins apparaissent ainsi beaucoup moins « statiques » (si l’on peut dire) que dans les bandes dessinées occidentales. Cette impression de mouvement est renforcée par l’usage fréquent d’onomatopées et de « traits de vitesse » — une technique que l’on retrouve également dans les comics américains.
Un métier qui requiert de la persévérance
Les personnages priment généralement sur les décors (tandis qu’en Europe, ces derniers ont souvent une fonction narrative). Ils sont fréquemment dessinés avec de grands yeux, qui permettent d’exprimer toutes sortes d’émotions — mais ce n’est pas systématique. Dans une même histoire, un personnage peut changer complètement d’apparence pour une version « ultra simplifiée » de lui-même : cette technique est utilisée pour traduire un changement d’humeur ou de comportement soudain (honte, colère, folie, etc.). Ces codes sont aussi utilisés dans les mangas humoristiques : les corps se font tout petits, le visage est caricaturé à l’extrême, etc.
À noter qu’il existe aujourd’hui de nombreux ouvrages et de tutoriels vidéo permettant de s’initier au dessin de mangas de manière autodidacte. Comme le souligne Louis dans son interview, certaines associations japonaises et quelques écoles spécialisées proposent par ailleurs des formations certifiées, d’une durée de trois à cinq ans (telles que l’EIMA à Toulouse, ou encore l’école AUTOGRAF et l’Académie européenne de manga, à Paris).
Il faut bien entendu garder à l’esprit que, comme tout autre auteur, il n’est pas simple pour un mangaka de se faire connaître et de trouver une maison d’édition qui accepte de le publier — d’autant plus que les éditeurs de mangas sont peu nombreux en France. Si vous envisagez de percer dans le secteur, n’hésitez pas à profiter d’événements thématiques tels que la Japan Expo ou le Paris Manga Sci-Fi Show (prochain rendez-vous les 3 et 4 décembre) pour vous faire connaître et nouer quelques relations. À moins d’avoir beaucoup de chance (et des relations), les premières années sont généralement difficiles (d’où l’intérêt, comme Louis, de conserver une autre activité lucrative en parallèle).
Le défi n’est toutefois pas impossible à relever : Tony Valente (auteur de Radiant, qui a été adapté en animé au Japon), Rémy Guérin (auteur de City Hall) ou encore Reno Lemaire (auteur de Dreamland) font partie de ceux qui ont réussi à se faire un nom en France — les deux premiers sont publiés par Ankama Editions, le troisième est publié par Pika Edition.