Ford a déposé une demande de brevet pour un système conçu pour engendrer un certain inconfort du conducteur si celui-ci venait à être en retard dans ses paiements de crédit automobile. Le véhicule pourrait par exemple désactiver certaines fonctionnalités, émettre des sons désagréables dès que la personne s’installe au volant, se verrouiller complètement ou même se rendre de lui-même à une concession automobile ou à la fourrière.
L’approche paraît un peu exagérée. C’est pourtant bien ce que décrit le document soumis par le constructeur automobile à l’Office américain des brevets en août 2021 et officiellement publié le 23 février dernier. Le document, intitulé « Systèmes et méthodes pour reprendre possession d’un véhicule », présente la solution ultime au problème des retards de paiement, un système connecté pour reprendre possession d’un véhicule même si son conducteur s’avère particulièrement récalcitrant.
Le mois dernier, The Drive faisait état de la situation économique difficile dans laquelle se trouvent aujourd’hui plusieurs souscripteurs de prêts automobiles. ll s’avère qu’outre-Atlantique, les taux d’intérêt accusent une hausse significative depuis l’an dernier. Le taux d’intérêt annuel moyen sur les nouveaux prêts automobiles frôlait les 7% ce mois de janvier. Pour les véhicules d’occasion, le TAEG moyen était encore plus élevé : 10,57 %. « Cela signifie que de plus en plus d’Américains paient plus de 1000 dollars par mois pour leur véhicule », précise le magazine. D’où un nombre croissant d’emprunteurs, qui peinent à honorer leurs mensualités.
Une réponse « graduelle » en cas de difficultés de paiement
Face à cette vague de défauts de paiement, Ford a imaginé un système pour faciliter la reprise de possession du véhicule. Le système détaillé dans la demande de brevet — qui s’adresse bien entendu uniquement aux véhicules connectés — prévoit divers moyens de rappeler au conducteur qu’il doit s’acquitter de ses dettes, allant crescendo en matière de pénibilité.
Dans un premier temps, si le conducteur a ignoré les premiers avertissements envoyés de manière traditionnelle (par courrier ou téléphone), quelques désagréments « mineurs » viseraient à entraîner son inconfort dans le véhicule ; les voitures perdraient par exemple l’usage de certaines fonctionnalités « non essentielles », telles que le régulateur de vitesse, le GPS, la climatisation ou la radio. Si le conducteur ignore ces quelques subtils « rappels », le système pourrait provoquer l’émission d’un son incessant et désagréable, chaque fois qu’il monte dans son véhicule.
Si le propriétaire ne paie toujours pas ses mensualités, la voiture pourrait se verrouiller complètement. La demande de brevet précise néanmoins que ce verrouillage pourrait être levé momentanément en cas d’urgence ; le véhicule pourrait par exemple se rendre à l’hôpital en cas d’urgence médicale. Le verrouillage pourrait également être effectué uniquement pendant les week-ends, afin de ne pas empêcher le propriétaire de se rendre à son travail en semaine — ce qui n’arrangerait pas ses difficultés financières…
De la même façon, il pourrait tout à fait être possible de limiter dans certains cas la conduite à une certaine zone géographique, à certains jours et/ou à certaines heures de la journée.
Un système susceptible d’être piraté
Si le conducteur ne paie toujours pas ses dettes, et si sa voiture dispose d’une capacité de conduite autonome ou semi-autonome, les mesures pourraient être encore plus radicales : le système pourrait déplacer le véhicule à un endroit plus pratique pour qu’une dépanneuse remorque le véhicule, ou le déplacer du logement du propriétaire aux locaux de l’agence de reprise ou de l’établissement de crédit, rapporte The Drive.
Par ailleurs, si l’établissement de crédit considère que l’exécution d’une procédure de reprise ne serait pas rentable financièrement (de par les coûts occasionnés et la valeur marchande du véhicule), la voiture pourrait se rendre d’elle-même à la casse !
Selon The Drive, aucun autre constructeur automobile n’a tenté de breveter un système similaire. Si un dépôt de demande de brevet n’implique pas nécessairement la mise en œuvre réelle de la technologie, le niveau de détails dont fait preuve le constructeur dans le document suggère que ce système de reprise de possession pourrait tout à fait équiper certains véhicules dans un futur proche. D’autant plus que son fonctionnement ne requiert l’installation d’aucun matériel supplémentaire si le véhicule est déjà connecté à Internet.
Ce type de système soulève par ailleurs quelques inquiétudes du côté de la sécurité des véhicules : on peut très bien imaginer que malgré toutes les précautions nécessaires, une personne malveillante réussisse à contrôler le système à distance, pour actionner/arrêter n’importe quelle fonctionnalité du véhicule ou le déplacer comme bon lui semble.
Cela dit, les voitures totalement autonomes ne sont pas encore disponibles sur le marché. Ford a même annoncé il y a quelques mois qu’il mettait fin à ses efforts de développement de sa première voiture entièrement autonome. Le projet ne sera donc pas concrétisé avant un certain temps…