Un rift apparu il y a quinze ans dans une région de l’Éthiopie sert de point d’étude important pour les scientifiques sur les mouvements des plaques tectoniques. Selon eux, l’évolution de la faille résultera dans le détachement d’une partie du continent, avec pour conséquence l’apparition d’un nouvel océan.
Dans l’Est éthiopien, la région Afar est l’une des zones les plus chaudes et arides du monde, où les températures peuvent atteindre 55 degrés Celsius la journée et 35 le soir. Elle est aussi le point de jonction entre trois plaques tectoniques (nubienne, somalienne, arabique) qui seraient en lien avec l’apparition brutale en 2005 d’un rift de plus de 500 mètres en quelques jours, alors que normalement elle aurait dû se former en plusieurs siècles à une telle longueur.
À présent, une fissure de plus de 56 km de long peut être contemplée. Mais dans les profondeurs du rift, les signes d’une séparation d’une partie du continent africain ont été détectés, un phénomène qui attire les chercheurs du monde entier. Ce processus, qui durera entre cinq et dix millions d’années, se conclura en la formation d’un océan dans la zone de détachement, qui sera significativement plus longue que le rift observable aujourd’hui.
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De nombreuses hypothèses et estimations ont été rendues possibles grâce aux progrès technologiques, et plus spécifiquement aux nouvelles mesures réalisées par satellite qui ont également permis aux chercheurs de suivre de près l’activité volcanique liée aux déplacements des plaques tectoniques dans l’est de l’Afrique.
Dans la croûte terrestre, une douzaine de grandes plaques subissent constamment des déformations en se heurtant, se séparant, ou encore se chevauchant les unes aux autres. Afar est la seule région au monde où il est possible d’étudier la formation d’un océan après d’importants mouvements tectoniques, la présence de trois plaques mineures étant idéale pour la recherche.
Le détachement de l’une d’entre elles de l’Afrique (la plaque arabique) est à l’origine de la formation du golfe d’Aden et de la mer Rouge, et l’éloignement de la plaque somalienne de la plaque nubienne sera selon les estimations à l’origine de la séparation du continent, qui débutera vers la corne de l’Afrique, le long du Kenya et de l’Éthiopie.
Les analyses par GPS et satellite laissent supposer aux chercheurs qu’un puissant panache de roches surchauffées provenant du manteau terrestre serait la cause des activités à l’origine du rift. « Avec les mesures par GPS, vous pouvez mesurer des taux de mouvements jusqu’à quelques millimètres par an », explique Ken Macdonald, géophysicien marin et professeur émérite à l’Université de Californie. « Comme nous obtenons de plus en plus de mesures du GPS, nous pouvons avoir une bien meilleure idée de ce qui se passe ».
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Cynthia Ebinger, géophysicienne de l’Université de Tulane qui a étudié pendant de nombreuses années le rift afin de comprendre son apparition rapide et violente, suggère que la présence importante de magma a dû causer une pression extrême. En effet, lors des événements en 2005, un volcan se situant à l’extrémité nord du rift est entré en éruption. Cependant, le magma n’est jamais monté à la surface. Il a refroidi en dessous du rift et a élevé le sol à un moment donné, causant ainsi une rupture à la surface. Mais les spécialistes s’accordent tous à dire que ce n’est que le début de modifications profondes du continent africain.
« Le golfe d’Aden et la mer Rouge envahiront la région d’Afar et la vallée du Rift est africain qui deviendront un nouvel océan, et cette partie de l’Afrique orientale deviendra son propre petit continent séparé », ajoute MacDonald.
Bien que les plaques se détachent de l’Afrique à des vitesses particulièrement lentes et différentes (environ 2.5 cm par an pour la plaque arabique et 0.5 cm pour la somalienne et nubienne), elles finiront par former dans quelques millions d’années une dorsale dans le nouvel océan, autrement dit une chaîne de montagnes se situant dans les fonds marins. Des indices observés par les chercheurs ont été démontrés, avec des matériaux provenant du fin fond de la croûte terrestre en train de remonter pour former des croûtes océaniques.
« Nous pouvons voir que la croûte océanique commence à se former, car elle est distinctement différente de la croûte continentale dans sa composition et sa densité », explique le doctorant de l’Université de Leeds Christopher Moore.