Une nouvelle voie pour générer une lumière quantique contrôlable et révolutionner la science au niveau atomique

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| Pobytov/Cambridge University
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Les lois de la physique classique peuvent décrire le monde que nous observons. Mais, à l’échelle atomique, ce sont les lois de la physique quantique qui règnent. Récemment, des chercheurs ont théorisé un nouveau mécanisme pour générer de la « lumière quantique » à haute énergie. Elle pourrait être utilisée pour étudier de nouvelles propriétés de la matière à l’échelle atomique et résoudre certains problèmes quantiques, révolutionnant la science que nous connaissons en permettant d’observer les interactions entre atomes, de manière directe.  

À la fin du XIXe siècle, la bataille sur la nature de la lumière en tant qu’onde ou ensemble de particules semblait terminée. Mais une révolution de pensée vient tout bousculer : la théorie quantique. Dès 1926, un article de Nature expliquait : « Il est bien connu que la théorie ondulatoire de la lumière ne parvient pas à expliquer certains phénomènes. […] La théorie quantique de la lumière n’est pas simplement une image grossière de certains faits, mais est une théorie importante pas plus éloignée de la vérité que la théorie des ondes ».

En effet, le dualisme présenté par la lumière (se comportant comme une onde et un ensemble de particules) a été proposé par Albert Einstein en 1905. Il a étayé son hypothèse du photon par une analyse de l’effet photoélectrique, un processus, découvert par Hertz en 1887, dans lequel des électrons sont éjectés d’une surface métallique éclairée par la lumière.

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Or, des mesures détaillées ont montré que le début de l’effet est déterminé uniquement par la fréquence de la lumière et la composition de la surface et est indépendant de l’intensité lumineuse. En d’autres termes, même si nous augmentons l’intensité lumineuse, l’électron émis par le métal présente la même énergie cinétique (ou vitesse spécifique lors de son émission).

Ce comportement était déroutant dans le contexte des ondes électromagnétiques classiques, dont les énergies sont proportionnelles à l’intensité et indépendantes de la fréquence, à l’image des vagues dont les plus grosses ont bien plus d’effet sur un corps immergé que les petites. De fait, Einstein a supposé qu’une quantité minimale d’énergie est nécessaire pour libérer un électron d’une surface, induisant que seuls des photons avec des énergies supérieures à ce minimum peuvent induire une émission d’électrons.

C’est ainsi qu’à des échelles plus grandes (lumière quotidienne), les photons sont régis par les lois familières de la physique classique se comportant comme une onde. Mais si on s’approche de l’échelle des atomes, les règles de la mécanique quantique prennent le dessus, avec des comportements impossibles en physique classique, comme l’intrication quantique, permettant à deux particules séparées par une grande distance de se « synchroniser » — elles sont enchevêtrées.

S’appuyant sur cette théorie de la lumière quantique, un groupe de chercheurs international, mené par l’Université de Cambridge, a développé une théorie décrivant un nouvel état de la lumière qui a des propriétés quantiques contrôlables sur une large gamme de fréquences, jusqu’aux rayons X. Ce nouveau mécanisme pour générer de la « lumière quantique » à haute énergie pourrait être utilisé afin d’étudier de nouvelles propriétés de la matière à l’échelle atomique et révolutionner l’optique. Leurs résultats sont publiés dans la revue Nature Physics.

Une « lumière quantique » contrôlable

Il faut savoir que l’une des principales techniques de génération de lumière utilise des lasers puissants. Lorsqu’un laser suffisamment puissant est pointé sur un solide (ou émetteur), il peut en arracher certains électrons et les dynamiser. Concrètement, ces électrons se recombinent avec le solide émetteur dont ils ont été extraits, et l’excès d’énergie qu’ils ont absorbé est libéré sous forme de lumière. Ce processus transforme la lumière d’entrée à basse fréquence en un rayonnement de sortie à haute fréquence. Il est connu sous le nom de génération d’harmoniques élevées.

effet photoélectrique
Schéma de l’effet photoélectrique. © Henry Laurie pour Trust My Science

C’est le principe de l’effet photoélectrique utilisé par Einstein pour sa théorie quantique. Mais si ce dernier n’envisage qu’un seul émetteur, l’équipe postule un ensemble d’émetteurs spécifiques. Le Dr Andrea Pizzi, auteur principal anciennement de Cambridge et actuellement basé à l’université de Harvard, explique dans un communiqué : « L’hypothèse était que tous ces émetteurs sont indépendants les uns des autres, ce qui donne une lumière de sortie dans laquelle les fluctuations quantiques sont assez homogènes. Nous voulions étudier un système où les émetteurs ne sont pas indépendants, mais corrélés : l’état d’une particule renseigne sur l’état d’une autre [grâce à l’intrication quantique]. Dans ce cas, la lumière de sortie commence à se comporter très différemment et ses fluctuations quantiques deviennent hautement structurées et potentiellement plus ‘utiles’ ».

Si l’idée parait intuitive et simple à appréhender, la pratique ne l’est aucunement. L’hypothèse de l’équipe doit résoudre l’un des problèmes les plus difficiles de la mécanique quantique, le problème à plusieurs corps. Il s’agit d’un nom général regroupant plusieurs problèmes liés au monde atomique constitué de nombreuses particules en interactions, selon les lois quantiques. De manière plus explicite, ce problème peut être défini comme la prédiction des propriétés et des effets de l’interaction entre particules sur le comportement d’un système à plusieurs corps.

Pour résoudre ce problème, les chercheurs ont utilisé une combinaison d’analyses théoriques et de simulations informatiques, où la lumière émise par un groupe d’émetteurs corrélés pouvait être décrite à l’aide de la physique quantique.

Pizzi déclare : « Nous avons travaillé pendant des mois pour obtenir des équations de plus en plus propres, jusqu’à pouvoir décrire la connexion entre la lumière de sortie et les corrélations d’entrée avec une seule équation compacte ».

Révolution optique en attoscience

Concrètement, la théorie démontre que la lumière quantique contrôlable peut être générée par des émetteurs corrélés avec un laser puissant. La méthode génère une lumière de sortie à haute énergie et pourrait être utilisée pour concevoir la structure optique quantique des rayons X.

Nicholas Rivera, chercheur à l’Université Harvard et co-auteur, souligne dans un article de Vice : « Les photons convertis peuvent exister sous forme d’impulsions très courtes, avec des durées d’environ 100 attosecondes [un milliardième de milliardième de seconde]. La durée extrêmement courte de ces impulsions [peut] permettre la visualisation des processus physiques et chimiques se produisant à ces mêmes échelles de temps ultracourtes ».

Ce nouveau mécanisme pour générer de la « lumière quantique » à haute énergie pourrait résoudre des problèmes de longue date dans la physique des matériaux. En effet, les bases de la physique et de la chimie reposent sur les interactions entre les électrons et atomes, et entre les atomes eux-mêmes, afin de créer des molécules et les matériaux que nous côtoyons quotidiennement. Or, nous savons peu de choses sur la façon dont les électrons et les noyaux « se déplacent » dans ces interactions, car ils sont à des échelles si petites et se produisent sur des durées si courtes qu’ils s’avèrent difficiles à saisir en action.

Pizzi souligne : « Les fluctuations quantiques rendent la lumière quantique plus difficile à étudier, mais aussi plus intéressante : si elles sont correctement conçues, les fluctuations quantiques peuvent être une ressource. Le contrôle de l’état de la lumière quantique pourrait permettre de nouvelles techniques en microscopie et en calcul quantique ».

Cette nouvelle forme de lumière quantique pourrait inaugurer de nouvelles techniques sophistiquées pour les matériaux d’imagerie, avec une clarté sans précédent pour les échantillons biologiques par exemple, et donc révéler les détails cachés sur les interactions ultrarapides et les propriétés des entités à l’échelle atomique.

Pizzi conclut : « Pour l’avenir, nous aimerions collaborer avec des expérimentateurs pour fournir une validation de nos prédictions ».

Source : Nature Physics

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