L’édition génique, outil puissant de modification de l’ADN, a vu He Jiankui créer les premiers bébés génétiquement modifiés, déclenchant une tempête éthique. Après une condamnation, il revient, visant cette fois la dystrophie musculaire de Duchenne. Son retour, marqué par une ambition de trouver un remède, interroge la communauté sur les frontières éthiques et les conséquences potentielles de ses travaux renouvelés. Avant son arrestations en 2019, il prévoyait de guérir une série de maladies graves, et même d’allonger la durée de vie humaine à 120 ans.
L’édition génique, une technique qui permet de manipuler l’ADN au niveau moléculaire, a toujours été au cœur de débats éthiques et scientifiques. Après avoir annoncé la modification génique des premiers bébés il y a près de cinq ans (afin de selon lui les immuniser contre le VIH), He Jiankui, le biophysicien chinois, est de retour. Suite à cette annonce, il a été accusé d’avoir gravement enfreint l’éthique médicale, ce qui lui a valu une peine de trois ans de prison pour « pratiques médicales illégales ».
Aujourd’hui, il est de nouveau sous les projecteurs, mais cette fois pour une raison différente : la recherche d’un remède contre la dystrophie musculaire de Duchenne (DMD), une maladie génétique incurable. Selon NPR, de nombreux patients atteints de DMD ont contacté He, espérant qu’il puisse développer une thérapie pour eux. Son retour pose des questions cruciales sur les limites éthiques en science et les implications de ses nouvelles recherches.
Des préoccupations éthiques persistent
He Jiankui, avec son ambition affichée de servir la science, se trouve au cœur d’un débat complexe. Sa volonté de progresser dans le domaine de l’édition génique est louable, mais elle est entachée par le scepticisme concernant ses véritables motivations et le rôle que pourrait jouer le gouvernement chinois dans ses recherches. La controverse autour de ses expériences antérieures sur les embryons a conduit à une intervention directe des autorités chinoises. Avant son arrestations en 2019, il avait avoué à ses collègues qu’il avait l’ambition de guérir toute une série de maladies graves, et même d’allonger drastiquement la durée de vie humaine à 120 ans.
En réponse à l’émoi international, elles ont décidé d’encadrer plus strictement ses activités, en lui imposant des limites, notamment dans les domaines sensibles de la reproduction assistée et de l’édition génique. Toutefois, l’opacité demeure : les spécificités de ces restrictions, qui pourraient éclairer la portée et les limites de ses recherches actuelles et futures, n’ont pas été divulguées au grand public. Cette absence de transparence alimente les spéculations et renforce les préoccupations quant à l’orientation et à l’éthique de ses travaux.
Un nouvel espoir pour les patients atteints de DMD ?
He Jiankui, après avoir été au centre d’une tempête médiatique et éthique, a choisi de se recentrer sur une nouvelle mission au sein de son laboratoire, le Jiankui He Lab. Il s’est tourné vers l’utilisation de CRISPR, une technologie d’édition génique de pointe, pour s’attaquer à la dystrophie musculaire de Duchenne (DMD), une maladie génétique dévastatrice. Cette orientation marque une rupture nette avec ses expérimentations antérieures.
Alors qu’il avait précédemment modifié l’ADN d’embryons humains, une démarche largement critiquée, il se concentre maintenant sur une approche différente. Il ne s’agit plus de manipuler le génome à un stade aussi précoce que l’embryon, mais de cibler directement le gène défectueux responsable de la DMD. L’ambition de He Jiankui est claire : mettre au point une thérapie génique qui pourrait non seulement traiter, mais potentiellement guérir les patients atteints de cette maladie, en corrigeant le gène mutant à l’origine de leur condition.
Des critiques mitigées
La détermination de He Jiankui à progresser dans le domaine de l’édition génique et à, entre autres, apporter une solution à la dystrophie musculaire de Duchenne est indéniable. Cependant, son enthousiasme et son assurance ne sont pas partagés par l’ensemble de la communauté scientifique. De nombreux spécialistes du domaine, forts de leur expérience et de leur connaissance des défis associés à la recherche médicale, expriment des réserves.
Kiran Musunuru, éminent professeur de médecine à l’Université de Pennsylvanie, est l’une de ces voix critiques. Dans un article du npr.org et du New Yorker, il explique que l’optimisme de He Jiankui quant à la rapidité avec laquelle il pourrait trouver un remède est peut-être prématuré. Musunuru souligne que la recherche médicale, en particulier dans un domaine aussi complexe que l’édition génique, est un processus long et ardu. De plus, il rappelle que de grandes entreprises pharmaceutiques, dotées de ressources considérables et d’équipes de chercheurs chevronnés, se penchent sur la question de la DMD depuis des années. Ces entreprises ont investi des sommes colossales et des années de recherche, et pourtant, un remède efficace et sûr reste insaisissable.
La prudence de Musunuru suggère que, malgré les avancées technologiques, la découverte d’un remède pour des maladies génétiques comme la DMD nécessite non seulement de l’innovation, mais aussi du temps, de la patience et une approche collaborative. Malgré les efforts de He Jiankui pour se racheter aux yeux de la communauté scientifique, les préoccupations éthiques et les critiques entourant ses travaux antérieurs continuent de le hanter. Seul le temps dira si ses recherches actuelles aboutiront à une avancée significative dans le traitement de la DMD ou si elles seront entachées de nouvelles controverses.