Découvert en 1985 et nommé en l’honneur de l’architecte américain inventeur du dôme géodésique, Richard Buckminster Fuller, le buckminsterfullerène (ou fullerène de Buckminster) est une molécule de la famille des fullerènes composée de 60 atomes de carbone. Si jusqu’à maintenant sa présence dans le milieu interstellaire n’avait jamais pu être rigoureusement démontrée, de nouvelles données recueillies par le télescope spatial Hubble ont permis de confirmer cette situation en apportant aux astrochimistes les preuves nécessaires.
Contenant 60 atomes de carbone disposés en forme de ballon de football, le buckminsterfullerène (C60) est formé naturellement sur Terre. Mais en 2010, il a également été détecté dans une nébuleuse ; en 2012, il a été trouvé dans le gaz en orbite autour d’une étoile. Mais les astrophysiciens ont aujourd’hui la preuve la plus solide à ce jour qu’il flotte également dans le milieu interstellaire !
« Combinés à des observations antérieures basées au sol… nos spectres du télescope spatial Hubble placent la détection de buckminsterfullerène interstellaire hors de tout doute raisonnable » écrivent les chercheurs dans leur article publié dans la revue The Astrophysical Journal Letters.
Il est difficile d’étudier directement le milieu interstellaire, car il est très diffus. Cependant, il est possible d’étudier le comportement de la lumière dans ce milieu. Lorsque cette lumière stellaire traverse le milieu interstellaire, elle varie légèrement en fonction de la composition de ce qu’elle traverse – certaines longueurs d’onde sont absorbées par le gaz.
Le buckminsterfullerène détecté grâce à la lumière des étoiles
Un instrument appelé spectrographe peut séparer la lumière détectée en un spectre ; ensuite, les scientifiques interprètent ce spectre en identifiant les signatures lumineuses des éléments. Il existe des caractéristiques spectrales appelées bandes interstellaires diffuses, qui ont été identifiées comme caractéristiques d’absorption du milieu interstellaire. Mais, parce que nous en savons peu sur le milieu interstellaire, il est assez délicat d’identifier les molécules individuelles au sein de ces bandes.
Des articles précédents ont affirmé avoir découvert des bandes de buckminsterfullerène, mais aucun ne l’a démontré de manière irréfutable, selon une équipe de chercheurs dirigée par le physicien Martin Cordiner de la NASA. Ceci est en partie dû aux interférences produites par l’atmosphère terrestre lors de l’utilisation d’un télescope terrestre.
L’équipe s’est donc tournée vers le télescope spatial Hubble en orbite terrestre, ce qui permet d’éliminer facilement ces interférences. Ils ont observé 11 étoiles et obtenu des spectres signal-bruit ultra-intenses de sept étoiles significativement étirés vers le rouge par le milieu interstellaire. Ils ont également obtenu les spectres des quatre autres étoiles, ayant servi de contrôle. Ils ont ensuite étudié ces spectres et les signaux d’absorption sur quatre longueurs d’onde associées au buckminsterfullerène.
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L’équipe a effectué des détections fiables dans trois des quatre longueurs d’onde (la longueur d’onde restante ne renvoyant de toute façon qu’un signal faible) pour les étoiles redshiftées, et aucune dans les étoiles de contrôle. L’intensité des signaux était également cohérente avec les mesures effectuées dans un laboratoire en 2018.
Mieux comprendre le milieu interstellaire grâce au buckminsterfullerène
Les chercheurs ont déclaré que ceci est la preuve la plus solide à ce jour pour de la présence du buckminsterfullerène dans le milieu interstellaire. Bien que son origine ou son mécanisme de formation dans un tel milieu demeurent encore inconnus. Cela apprend également aux astrochimistes que le milieu interstellaire peut abriter de grosses molécules. Auparavant, les plus grosses molécules détectées dans le milieu interstellaire n’avaient que 3 atomes de plus que l’hydrogène, alors que le buckminsterfullerène en possède 60.
« Cette découverte représente une avancée dans notre compréhension de la complexité chimique du milieu interstellaire diffus [..], apportant une nouvelle compréhension des types de molécules pouvant être responsables des bandes interstellaires diffuses non identifiées restantes » expliquent les chercheurs.
« D’autres observations de haute sensibilité sont recommandées pour mieux contraindre les forces et les profils des bandes les plus faibles du buckminsterfullerène, combinées à des études de laboratoire et théoriques supplémentaires qui pourraient permettre l’exploitation des bandes de buckminsterfullerène en tant que sondes de la physique et de la chimie interstellaires » conclut l’étude.