James Webb observe les galaxies les plus anciennes connues à ce jour, et elles ne correspondent pas aux prédictions

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Le télescope spatial James Webb nous permet d'observer LEDA 2046648 (la plus grande galaxie au centre) telle qu'elle était il y a un peu plus d'un milliard d'années, ainsi que d'autres galaxies encore plus éloignées. | ESA/Webb, NASA & CSA, A. Martel
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Les récentes observations du télescope spatial James Webb révèlent des aspects inédits des galaxies primitives. Ces galaxies à la chimie peu riche semblent dévier des relations théoriques établies entre la masse stellaire, la formation des étoiles et la composition chimique. De nouvelles données suggèrent un apport constant de gaz neuf, diluant les éléments lourds et façonnant une composition chimique unique.

Les observations actuelles montrent que les galaxies des 12 derniers milliards d’années, soit 5/6e de l’âge de l’Univers, ont vécu dans une forme d’équilibre. Il semble y avoir une relation fondamentale entre le nombre d’étoiles formées et la quantité d’éléments lourds créés. Il s’agit des éléments plus lourds que l’hydrogène et l’hélium.

Cette relation est logique, car l’Univers était à l’origine constitué uniquement des éléments les plus légers. Tous les éléments plus lourds, comme le carbone, l’oxygène et le fer, ont été créés plus tard par les étoiles. Les toutes premières galaxies devraient donc être « non polluées » par des éléments lourds et moins massifs. Mais jusqu’à récemment, il n’a pas été possible de remonter aussi loin dans le temps. James Webb change la donne.

Une invitation à rêver, prête à être portée.

Des observations des galaxies formées peu de temps après le Big Bang, dirigées par Kasper Elm Heintz du Cosmic Dawn Center, ont dévoilé des propriétés physiques et chimiques inattendues. Les scientifiques devront peut-être revoir les modèles actuels de formation et d’évolution galactique. Les travaux de l’équipe à l’origine de ces découvertes sont disponibles dans la revue Nature Astronomy.

Des galaxies jeunes et surprenantes

Habituellement, plus la galaxie est massive, plus les éléments sont lourds. Mais cette relation semble donc remise en question par les dernières observations. Kasper Elm Heintz explique dans un communiqué : « Lorsque nous avons analysé la lumière de 16 de ces premières galaxies, nous avons constaté qu’elles contenaient beaucoup moins d’éléments lourds que ce que l’on pourrait attendre selon leurs masses stellaires et du nombre de nouvelles étoiles qu’elles ont produites ».

La révélation la plus étonnante concerne la production réduite d’éléments lourds dans les galaxies anciennes, une réalité en nette opposition avec les prédictions basées sur nos connaissances des galaxies formées ultérieurement. En fait, ces galaxies contenaient en moyenne quatre fois moins d’éléments lourds que l’Univers plus âgé.

Rupture des règles cosmiques

Ces résultats contrastent fortement avec le modèle actuel, selon lequel les galaxies évoluent selon une forme d’équilibre tout au long de l’histoire de l’Univers. Claudia Lagos, professeure agrégée à l’Université d’Australie occidentale déclare : « C’était comme si les galaxies suivaient un règlement — mais, étonnamment, ce règlement cosmique semble avoir subi une réécriture dramatique au cours de l’enfance de l’univers ».

Lagos explique que cette singularité est due à la réception continue de gaz neuf provenant de leur environnement cosmique. Ce flux constant de gaz neuf dans les galaxies dilue les éléments lourds présents, résultant en une concentration réduite de ces éléments par rapport à ce qui est observé dans les galaxies plus matures.

Cette dilution des éléments lourds est cruciale pour comprendre la nature et l’évolution des galaxies primitives. Les éléments lourds jouent un rôle clé dans la formation des étoiles et la structure des galaxies, et leur présence réduite suggère des processus de formation et d’évolution distincts pour ces galaxies anciennes.

Des théories pas si inexactes ?

Même si les galaxies primitives semblent défier les règles actuelles de la cosmologie, cela était en partie anticipé. En effet, les modèles théoriques existants de formation des galaxies, élaborés à l’aide de simulations informatiques avancées, avaient déjà suggéré des résultats analogues. Cependant, c’est la première fois qu’il est possible de l’observer de manière directe.

relation masse elements
Ce graphique montre les galaxies observées dans un « diagramme de masse élément-stellaire » : plus une galaxie est à droite, plus elle est massive, et plus elle est éloignée, plus elle contient d’éléments lourds. Les icônes grises représentent les galaxies de l’Univers actuel, tandis que les icônes rouges représentent les nouvelles observations des premières galaxies. Celles-ci contiennent clairement des éléments beaucoup moins lourds que les galaxies plus récentes, mais concordent à peu près avec les prédictions théoriques, indiquées par la bande bleue. © Kasper Elm Heintz, Peter Laursen.

Selon les chercheurs, l’explication est simplement que nous observons des galaxies en pleine formation. La gravité a rassemblé les premiers amas de gaz qui ont commencé à former des étoiles. Si les galaxies avaient évolué isolément, les éléments lourds se seraient rapidement accumulés en raison de l’activité stellaire.

Cependant, à cette période, d’immenses réserves de gaz pur et frais étaient présentes entre les galaxies, affluant vers elles plus vite que les étoiles ne pouvaient le compenser. Cette observation nous offre une vision inédite des phases initiales de la genèse galactique, révélant une connexion plus profonde avec le gaz intergalactique que présumé.

impact gaz galaxies
Illustration de la formation d’une galaxie : le gaz diffus provenant de l’espace intergalactique chute vers le centre, déclenchant la formation d’étoiles et devenant une partie du disque rotatif de la galaxie. Lorsque les étoiles meurent, elles renvoient leur gaz vers la galaxie (et l’espace intergalactique), désormais enrichi en éléments lourds. © Tumlinson et coll., 2017

Kasper Elm Heintz conclut : « Le résultat nous donne un premier aperçu des premiers stades de la formation des galaxies, qui semblent plus intimement liés au gaz situé entre les galaxies que nous ne le pensions. Il s’agit de l’une des premières observations de James Webb sur ce sujet. Nous attendons donc toujours de voir ce que les observations plus vastes et plus complètes actuellement menées pourront nous dire ».

Source : Nature Astronomy

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