Le télescope spatial James Webb offre aux astronomes des clichés de notre univers d’une qualité inégalée. Les chercheurs le pointent sur les zones déjà imagées par le télescope Hubble, mais les détails révélés par Webb sont d’une précision incroyable. Récemment, il a permis de contempler les galaxies les plus proches du Big Bang (les plus anciennes) connues à ce jour. L’étude de ces amas d’étoiles pourrait révéler de précieux indices sur la formation de l’Univers primitif et son évolution.
Le télescope spatial James Webb de la NASA a été spécialement conçu pour détecter la faible lumière infrarouge des galaxies très éloignées et donner aux astronomes un aperçu de l’univers primitif. En effet, la lumière émise dans les premiers âges de notre univers, pour nous parvenir, doit traverser l’espace et le temps.
Or, comme le prévoyait la théorie de la relativité d’Einstein, l’Univers est en constante expansion, faisant s’éloigner les uns des autres les objets célestes. La lumière qui traverse l’Univers subit un étirement, et ses longueurs d’onde qui au départ sont dans le spectre du visible, deviennent de plus en plus grandes et finissent dans la zone proche infrarouge, voire infrarouge (pour la lumière des galaxies les plus éloignées).
Il faut savoir que la nature des galaxies au cours de cette première période lumineuse de l’Univers n’est pas bien connue ni comprise. Pour les scientifiques, après le Big Bang, l’univers était comme une soupe chaude de particules (c’est-à-dire des protons, des neutrons et des électrons) et sans aucune lumière.
Lorsque l’Univers a commencé à se refroidir, les protons et les neutrons ont commencé à se combiner en atomes ionisés d’hydrogène (et éventuellement d’hélium). Ces atomes ionisés d’hydrogène et d’hélium ont attiré les électrons, les transformant en atomes neutres — ce qui a permis à la lumière de voyager librement pour la première fois, puisque cette lumière ne diffusait plus d’électrons libres. L’univers n’était plus opaque !
Cependant, il faudrait encore un certain temps (quelques centaines de millions d’années) avant que les premières étoiles ne commencent à se former. Mais les astronomes ne savent pas comment. Le télescope James Webb pourrait apporter la réponse avec ce nouveau cliché de l’univers primitif. Il a capturé une image d’un amas de galaxies appelé MACS0647, ainsi que de la galaxie lointaine MACS0647-JD.
Une galaxie (connue depuis 10 ans) qui en cache une autre
Dan Coe, d’AURA/STScI pour l’Agence spatiale européenne et l’Université Johns Hopkins, dans un communiqué de la NASA, explique qu’il a découvert la galaxie MACS0647-JD il y a 10 ans avec le télescope spatial Hubble. Il précise : « À l’époque, avec Hubble, c’était juste ce point rouge pâle. Nous pouvions dire qu’elle était vraiment petite, juste une minuscule galaxie dans les 400 premiers millions d’années de l’Univers. Maintenant, nous regardons avec Webb, et nous sommes capables de voir DEUX objets ! ».
Lors de la conférence de presse concernant cette découverte, le second chercheur, Tiger Hsiao de l’Université Johns Hopkins, souligne la différence de couleurs entre ces deux objets, l’un étant plus bleu, l’autre tirant sur le rouge. Il explique : « Le gaz bleu et le gaz rouge ont des caractéristiques différentes. Le bleu révèle en fait une très jeune formation d’étoiles et presque pas de poussière, mais le petit objet rouge a plus de poussière à l’intérieur et est plus ancien. Et leurs masses stellaires sont aussi probablement différentes ».
Sans que les deux auteurs ne puissent réellement conclure sur la nature de cette observation, ils s’accordent à dire qu’il s’agirait peut-être d’une fusion de galaxies dans les tous premiers instants de l’univers.
Une lentille gravitationnelle en complément de James Webb
La capture de cette image a été rendue possible grâce à la présence d’une structure particulière dans cette zone de l’Univers, une lentille gravitationnelle. Il s’agit d’un amas de galaxies se trouvant devant la zone pointée par le télescope. Du fait de la très forte gravité globale de cet amas, ce dernier agit comme une loupe sur les objets les plus éloignés situés derrière. La lentille ne se contente pas de grossir ces objets, mais multiplie également leur image dans différentes orientations. Dan Coe explique : « En raison de la lentille gravitationnelle de l’énorme amas de galaxies MACS0647, il est divisé en trois images : JD1, JD2 et JD3. Ils sont amplifiés par des facteurs de huit, cinq et deux, respectivement ».
Étudier ces images permettra de comprendre comment se sont formées de telles galaxies et comment elles ont évolué à travers le temps pour aboutir à une galaxie comme la Voie lactée, selon Rebecca Larson, de l’Université du Texas à Austin et membre de l’équipe.
Pour le trio de chercheurs, comme pour tous les astronomes de la NASA, les prouesses de James Webb sont étonnantes, surtout que ces découvertes ne concernent que la première image du télescope. Rebecca Larson déclare : « Si vous regardez en arrière-plan, il y a tous ces petits points — et ce sont toutes des galaxies ! Chacun d’entre eux. C’est incroyable la quantité d’informations que nous obtenons et que nous ne pouvions tout simplement pas voir auparavant. Et ce n’est pas un champ profond. Ce n’est pas une pose longue. Nous n’avons même pas vraiment essayé d’utiliser ce télescope pour observer un endroit pendant longtemps. Ce n’est que le début ! ».
Enfin, comme le mentionne CNN, l’équipe de recherche a rédigé un article sur la découverte de la fusion potentielle, mais comme pour la plupart des premières observations de Webb depuis le début des opérations scientifiques en juillet, les conclusions n’ont pas encore été soumises au processus d’examen par les pairs. L’équipe prévoit également une étude plus détaillée de MACS0647-JD en janvier.