Les éléphants sont des mammifères réputés pour leur mémoire et leur intelligence. Plusieurs études ont montré que ces animaux faisaient partie des espèces les plus intelligentes de la planète. Seraient-ils capables de se souvenir et de se venger d’un acte de maltraitance subi plusieurs années auparavant ? C’est ce que suggère un récent fait-divers, rapporté par le média indien The Print.
Alors qu’elle allait chercher de l’eau dans le district de Mayurbhanj à Odisha, une Indienne de 70 ans, Maya Murmu, a été attaquée par un éléphant sauvage. Ce dernier provenait du sanctuaire de la faune de Dalma, situé à environ 150 kilomètres, dans l’État du Jharkhand. Transportée rapidement à l’hôpital, cette femme a finalement succombé à ses blessures. Mais l’histoire ne s’arrête pas là : alors que la famille de Maya célébrait les funérailles de la défunte, l’éléphant est réapparu.
L’animal s’est approché du bûcher funéraire, a saisi le corps, l’a sauvagement piétiné, puis l’a jeté avant de s’enfuir. Cet événement peu commun rappelle que, bien qu’ils soient généralement passifs par nature, les éléphants peuvent parfois être dangereux, notamment lorsqu’ils sont menacés. « Ces éléphants en voie de disparition peuvent être mortellement dangereux, en particulier lorsqu’ils sont provoqués ou maltraités », souligne Duncan McNair, avocat et fondateur de l’association caritative Save The Asian Elephants. Ce drame suggère ainsi que l’éléphant a peut-être été provoqué d’une manière ou d’une autre.
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Des animaux très intelligents et pacifiques
Le cerveau d’un éléphant, d’une masse de quatre à six kilogrammes, contient 257 milliards de neurones. En termes de structure et de complexité, il est assez semblable au cerveau humain. Dans la nature, l’animal fait souvent preuve d’intelligence, en utilisant des pierres pour se défendre, ou des branches pour se toiletter et se gratter à des endroits inaccessibles avec sa trompe. L’éléphant est par ailleurs l’un des rares animaux (avec le dauphin, le corbeau et certains grands singes) à réussir le test du miroir de Gallup — ce qui prouve qu’il a conscience de lui-même.
En outre, ces grands animaux sont indéniablement doués d’empathie et d’émotions. Les individus d’une même harde sont très soudés les uns aux autres ; ils sont de ce fait particulièrement sensibles et très affectés par la perte de l’un des leurs et effectuent de véritables rituels funéraires. Ils font également preuve d’altruisme, même envers d’autres espèces, y compris les humains — qui sont pourtant leurs seuls prédateurs.
Les éléphants ont un tempérament plutôt calme et pacifique. « Ils ne se précipitent pas de nulle part pour attaquer des personnes qui ne représentent aucune menace pour leur sécurité, ou pour leurs petits ou pour quoi que ce soit de ce genre », a déclaré McNair. C’est pourquoi l’incident qui a coûté la vie de Maya est particulièrement surprenant. Cette femme aurait-elle commis un acte malveillant envers l’animal ? Les capacités cognitives du pachyderme lui auraient-elles permis de reconnaître cette femme, auquel cas son comportement pourrait traduire une forme de vengeance ?
Cette histoire est rapidement devenue virale, certains internautes affirmant que cette femme était une braconnière. En Inde, les éléphants d’Asie sont fréquemment maltraités et torturés de manière à ce qu’ils soient plus dociles. Ils sont par exemple retenus dans des cages étroites, qui les empêchent d’effectuer le moindre mouvement, et subissent des châtiments corporels. « Il est possible que l’éléphant était encore à proximité au moment des funérailles, et qu’il ait reconnu ‘es restes’. Il se peut qu’il l’ait vue ou sentie et qu’il ait associé cette femme à une catastrophe pour lui ou son troupeau. C’est tout à fait possible », a déclaré McNair.
Une perte d’habitat qui augmente les conflits
Le sanctuaire de la faune de Dalma est généralement très apprécié des éléphants d’Asie, en raison de son abondance en eau, « même en été », selon le département indien des forêts. Les experts s’interrogent sur les raisons qui auraient pu pousser le pachyderme à quitter ce refuge.
Si l’on ne peut que spéculer sur les motivations réelles de cet éléphant, l’événement met en lumière un problème majeur : une augmentation des conflits entre l’Homme et l’éléphant dans le monde entier, en particulier en Asie. Un article du Fonds mondial pour la nature (WWF) révèle que jusqu’à 300 personnes et 40 à 50 éléphants sont victimes de ces conflits chaque année en Inde. En cause ? La perte et la fragmentation de l’habitat naturel des éléphants, qui les forcent à se rapprocher des zones résidentielles, où ils pillent les cultures pour se nourrir.
Au mois de mai, dans le district de Chittoor, un fermier indien a ainsi été piétiné à mort par un éléphant sauvage, qui s’était aventuré sur ses terres avec son troupeau. Selon le WWF, ce genre d’incidents pousse la population à considérer les éléphants comme une menace ou une nuisance. En 2001, 60 éléphants ont ainsi été retrouvés morts, empoisonnés par des agriculteurs, dans le Nord-est de l’Inde et à Sumatra.
Le changement climatique ne fait qu’aggraver la situation : l’augmentation des températures assèche les sources d’eau, obligeant les éléphants à chercher de nouveaux points d’eau — ce qui les rapproche encore de l’Homme. Chassé pour son ivoire et sa peau, ou capturé pour servir l’Homme, l’éléphant d’Asie est inscrit sur la liste rouge des espèces en danger d’extinction de l’Union internationale pour la conservation de la nature. Le nombre d’individus a diminué d’au moins 50% au cours des trois dernières générations ; il en resterait moins de 50 000 à l’état sauvage.