D’inquiétants niveaux de plomb et d’arsenic détectés dans les tampons, même les marques bio

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Plusieurs marques de tampons vendues en Europe et aux États-Unis contiennent d’inquiétantes concentrations de métaux tels que le plomb et l’arsenic, selon une étude. Les marques bio contiennent moins de plomb, mais présentent en revanche de plus grandes quantités d’arsenic. Ces métaux proviennent probablement de la chaîne de fabrication des produits. Ce constat est préoccupant étant donné la capacité d’absorption chimique très élevée de la muqueuse vaginale.

Les tampons figurent parmi les produits menstruels les plus utilisés dans le monde, à la fois en raison de leur facilité d’utilisation et de leur excellente capacité d’absorption. On estime que 52 à 86 % des femmes utilisent des tampons pour leurs menstruations aux États-Unis, tandis que 43 à 46 % en utilisent en France et en Espagne. En tenant compte du nombre moyen d’années de menstruations, chaque femme utilise plus de 7400 tampons au cours de sa vie (4 tampons/jour, 4 jours/cycle, 12 cycles/an et 39 années de cycle), chacun étant retenu dans le vagin pendant plusieurs heures.

Étant donné leur large utilisation, des recherches suggèrent que les tampons pourraient devenir des sources d’exposition à des produits chimiques potentiellement nocifs. Une quinzaine d’études a par exemple mis au jour la présence de certains de ces composés, notamment les dioxines et les dérivés de furane, les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), les phtalates, les parabènes, les bisphénols, etc.

Cependant, les niveaux potentiels de métaux n’ont jusqu’à présent pas été quantifiés. « À notre connaissance, il s’agit du premier article mesurant les métaux présents dans les tampons », indique dans un communiqué de l’Université de Californie à Berkeley (UC Berkeley) Jenni A. Shearston, en référence à la nouvelle étude publiée dans la revue Environment International. Or, les métaux toxiques sont omniprésents dans notre environnement et ces produits d’hygiène pourraient être des sources d’exposition non négligeables.

Moins de plomb pour les marques bio, mais plus d’arsenic

Shearston et ses collègues ont quantifié les niveaux de 16 métaux (arsenic, baryum, calcium, cadmium, cobalt, chrome, cuivre, fer, manganèse, mercure, nickel, plomb, sélénium, strontium, vanadium et zinc) pour 14 marques différentes de tampons. Les noms des marques n’ont pas été explicitement mentionnés dans l’étude, mais elles sont distribuées au Royaume-Uni, aux États-Unis et dans l’Union européenne, selon les chercheurs. Les analyses ont été effectuées sur des lots de 30 tampons par marque et appartenant à 18 gammes différentes (bio ou non, de petites ou grandes tailles, en coton ou en viscose, etc.)

Bien que les concentrations variaient selon la marque, le type et le lieu d’achat des tampons, les chercheurs ont détecté des niveaux mesurables de tous les métaux évalués. Aucune catégorie ne se distinguait par des concentrations plus faibles, même celles bio. Les concentrations les plus élevées concernaient le zinc (52 000 ng/g), le plomb (120 ng/g), le cadmium (6,74 ng/g) et l’arsenic (2,56 ng/g). Les quantités de plomb étaient moins élevées dans les tampons bio, mais ces derniers contenaient en revanche des niveaux plus élevés d’arsenic.

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Résumé graphique de l’étude. © Jenni A. Shearston et al.

« Bien que les métaux toxiques soient omniprésents et que nous soyons exposés à de faibles niveaux à tout moment, notre étude montre clairement que les métaux sont également présents dans les produits menstruels et que les femmes pourraient courir un risque plus élevé d’exposition en utilisant ces produits », indique le coauteur de l’étude Kathrin Schilling, du Mailman School of Public Health de l’Université Columbia.

Ces résultats sont inquiétants non seulement en raison de la toxicité de ces métaux, mais également des caractéristiques d’absorption de l’épithélium vaginal. Il a été démontré que ces métaux sont associés à des risques plus élevés de démence, d’infertilité, de diabète et de cancer. Ils peuvent notamment endommager le foie, les reins et le cerveau, ainsi que les systèmes cardiovasculaire et endocrinien. Ils peuvent également impacter la santé maternelle et par extension, le développement du fœtus.

D’un autre côté, la muqueuse vaginale est hautement perméable et vascularisée et comporte des « rugae », des plis augmentant la surface d’absorption. Cela implique que les composés chimiques pénétrant le vagin ne subissent pas de métabolisme hépatique, mais pénètrent directement dans la circulation sanguine. Les médicaments administrés via cette voie (vaginale) bénéficient d’ailleurs d’une plus grande biodisponibilité que s’ils étaient administrés par voie orale.

En outre, une épidémie de choc toxique s’est déjà produite au début des années 1980, suite à des expositions à des toxines contenues dans les tampons Rely, une célèbre marque de l’époque. En altérant le microbiote vaginal, la toxine a entraîné une prolifération de Staphylococcus aureus, provoquant des chocs hypotensifs et, dans de rares cas, la mort. « L’épidémie de syndrome de choc toxique du début des années 1980 fournit des preuves d’une exposition systémique à des toxines lors de l’utilisation de tampons », indiquent les chercheurs dans leur document.

Une contamination provenant de la chaîne de fabrication ?

Selon les chercheurs, ces métaux proviennent probablement de la chaîne de fabrication des tampons. Des études ont précédemment montré que ces composés peuvent contaminer les plantes et affecter leurs processus physiologiques, biochimiques et moléculaires. Le plomb, le cuivre, le zinc et le cadmium en particulier, s’accumulent facilement dans les plantes utilisées pour la fabrication des tampons, comme les plants de coton. Les plantations peuvent être contaminées par le biais de dépôts atmosphériques, d’épandage d’eaux usées ou de l’utilisation de pesticides.

D’un autre côté, les fabricants pourraient aussi les ajouter délibérément lors de la fabrication, par exemple à des fins de blanchiment ou de pigmentation, de désodorisation, de lubrification ou encore en tant qu’agents antimicrobiens. « J’espère vraiment que les fabricants seront tenus de tester leurs produits pour détecter la présence de métaux, en particulier de métaux toxiques », estime Shearston.

Toutefois, l’étude n’a pas examiné la manière exacte dont ces métaux pourraient impacter la santé en étant absorbés par la muqueuse vaginale. La prochaine étape de la recherche consistera ainsi à évaluer la quantité de métaux pouvant être absorbés par le corps, ainsi que d’autres produits chimiques contenus dans les tampons, et peut-être même à en évaluer l’impact potentiel sur la santé.

Source: Environment International

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