Depuis des siècles, les sangsues (dont l’espèce Hirudo medicinalis) sont valorisées pour leurs applications médicinales pour le traitement de diverses affections. Aujourd’hui encore, elles sont utilisées en médecine traditionnelle ou moderne, notamment en chirurgie reconstructive — pour améliorer la circulation sanguine et ainsi la guérison des tissus. Récemment, les sangsues ont servi d’inspiration pour la conception d’un dispositif permettant de faciliter les prélèvements sanguins.
Si la peur des aiguilles est souvent associée aux enfants, de nombreux adultes partagent également cette phobie, particulièrement lors des prélèvements sanguins. Pour ces personnes, il existe des alternatives moins invasives comme les piqûres au bout du doigt ou au lobe de l’oreille. Toutefois, ces méthodes présentent des limites significatives. La quantité de sang recueillie est généralement minime, insuffisante pour certaines analyses médicales — risquant de mener à des résultats de tests imprécis, affectant ainsi le diagnostic et le traitement.
Pour surmonter ces contraintes, des chercheurs de l’École polytechnique fédérale de Zurich (ETH) ont développé un nouveau dispositif inspiré de la sangsue. Ce dernier permet, tout en étant peu invasif, de collecter une quantité de sang supérieure à celle obtenue par les méthodes non invasives conventionnelles (doigt ou lobe d’oreille par exemple).
Inspiré du mécanisme d’aspiration des sangsues
Pour concevoir leur nouveau dispositif, les chercheurs se sont inspirés d’un modèle naturel, la sangsue. Ce vers, qui se nourrit de sang, se fixe à la peau à l’aide d’une ventouse. Il perce ensuite la peau avec ses petites dents et aspire le sang par le biais d’un mécanisme de vide ou de pression négative. Le dispositif développé par les chercheurs de l’ETH imite ce processus.
Il est équipé d’une ventouse en silicone de 2,5 cm de diamètre contenant une douzaine de micro-aiguilles en acier. Ces aiguilles, qui ne pénètrent que légèrement dans la peau, sont généralement appliquées sur le bras ou le dos. Pour collecter le sang, le dispositif crée une pression négative similaire à celle utilisée par les sangsues, facilitant ainsi l’aspiration du sang. Afin de vérifier l’efficacité de leur technologie, les scientifiques l’ont testé sur un porc. Les détails de cet essai ont été publiés dans la revue Advanced Science.
De nombreux avantages par rapport aux alternatives classiques
Les chercheurs soulignent les nombreux avantages de cette méthode. Le dispositif, moins invasif que les aiguilles standard, provoque moins de douleur et réduit les risques de complication ou de blessure. Il peut également réduire l’anxiété et l’inconfort des patients, surtout chez ceux qui ont une aversion ou une phobie des aiguilles. De plus, l’appareil est simple à utiliser et ne requiert pas nécessairement l’intervention d’un professionnel de santé. Il est particulièrement adapté aux régions où l’accès à des professionnels de santé qualifiés est limité, comme les zones rurales ou les pays en développement.
Les chercheurs envisagent également son utilisation dans des zones où les ressources médicales sont limitées et où des maladies comme le paludisme sont courantes, notamment en Afrique subsaharienne. Par ailleurs, le faible coût de fabrication du dispositif permet sa production en grande quantité sans nécessiter un investissement financier conséquent, favorisant ainsi son déploiement à grande échelle dans ces régions. Toutefois, avant cet éventuel déploiement, l’équipe doit optimiser son choix de matériaux et mener des essais sur des sujets humains.