La résistance à l’insuline dans le cerveau jouerait un rôle dans le déclin cognitif lié à l’âge. Afin de cibler le cerveau, un essai clinique de phase 2 a consisté à administrer quotidiennement de l’insuline par voie nasale pendant 24 semaines. Le traitement s’est révélé efficace pour la cognition chez les personnes âgées, qu’elles soient atteintes ou non de diabète de type 2.
Concernant environ 25% des personnes âgées de 65 ans et plus, le diabète de type 2 est caractérisé par une résistance à l’insuline et une dérégulation du taux de glucose dans le sang. D’après une précédente hypothèse, la résistance à l’insuline dans le cerveau pourrait jouer un rôle dans le déclin cognitif et fonctionnel lié à l’âge, ainsi que dans l’apparition de la maladie d’Alzheimer.
L’administration d’insuline intranasale offre de nouvelles perspectives pour prévenir le déclin cognitif lié au vieillissement. De cette manière, elle pénètre directement dans le cerveau par les voies olfactives et se lie à des récepteurs dans plusieurs régions corticales. De plus, elle ne remplacerait pas l’insulinothérapie chez les diabétiques, mais agirait plutôt en modulant la signalisation de l’insuline dans le cerveau. Il a déjà été démontré que ce mode d’administration améliore la mémoire verbale, et se présente comme un traitement potentiel des troubles cognitifs chez les personnes âgées.
Par ailleurs, la marche est une tâche complexe dont la vitesse est un indicateur important de l’état de santé général. « La vitesse de marche est un prédicteur clinique important du bien-être chez les personnes âgées, qui est en corrélation avec le déclin cognitif, les hospitalisations, l’invalidité et le décès », a déclaré dans un communiqué l’auteur correspondant Vera Novak, professeur associé de neurologie à la Harvard Medical School.
Dans le cadre de la nouvelle étude, l’équipe de chercheurs du Beth Israel Deaconess Medical Center à Boston s’est penchée sur les effets à long terme de l’insuline intranasale sur la cognition et la marche chez des personnes atteintes ou non de diabète de type 2. L’essai clinique en phase 2 (contrôlé randomisé en double aveugle) consistait en un traitement journalier d’insuline pendant 24 semaines, ou d’un placebo (solution saline stérile).
Âgés de 50 à 85 ans, les 223 participants (dont environ la moitié étaient atteints de diabète de type 2) ont été répartis en quatre groupes : un groupe diabétique recevant de l’insuline intranasale, un groupe diabétique recevant un placebo, un groupe sain recevant de l’insuline intranasale et un groupe sain recevant un placebo.
De bons résultats chez les prédiabétiques, indiquant une potentielle utilisation préventive du risque cognitif
Les résultats montrent que les diabétiques qui prenaient de l’insuline intranasale ont amélioré leur vitesse de marche et ont obtenu de meilleurs résultats aux tests cognitifs que les diabétiques du groupe placebo. Pour les non diabétiques, l’administration de l’insuline intranasale a surtout permis d’améliorer les prises de décision et la mémoire verbale, par rapport aux non-diabétiques du groupe placebo. Au sein de ce groupe, des améliorations plus importantes ont été constatées pour les personnes dans un état prédiabétique au moment du début de l’essai.
« La cohérence des tendances dans les données montrant de meilleures performances en matière de vitesse de marche et de cognition chez les participants traités par insuline intranasale, en particulier chez ceux atteints de prédiabète, a de grandes implications pour une intervention précoce potentielle utilisant l’insuline intranasale dans cette population pour prévenir ou ralentir la progression vers les démences liées à la maladie d’Alzheimer », a précisé l’auteur principal Long Ngo.
Des résultats prometteurs qui justifient un essai clinique de plus grande envergure
En outre, le traitement n’a été associé à aucun événement indésirable et s’est révélé sûr chez les patients atteints de diabète de type 2 traités par insuline sous-cutanée. Les chercheurs estiment qu’il reste encore beaucoup de zones d’ombres à éclaircir avant de pouvoir envisager prévenir le déclin cognitif dans la population âgée. Par exemple, on ne sait pas quelle est la dose optimale d’insuline intranasale, ni si elle peut être administrée sur de longues périodes en toute sécurité.
« Les participants diabétiques traités par insuline intranasale avaient une vitesse de marche plus rapide, un débit sanguin cérébral accru et une résistance à l’insuline moindre, tandis que les témoins traités par insuline intranasale ont obtenu de meilleurs résultats dans les tâches de fonction exécutive et de mémoire verbale », ont-ils conclu. « Ces résultats sont cliniquement pertinents et justifient une étude plus approfondie dans un essai clinique de plus grande envergure ».