Le Japon fait face à une crise démographique qui pourrait potentiellement conduire à l’extinction de sa population, avertit un expert. Si le déclin actuel de la natalité se poursuit, le pays ne compterait plus qu’un seul enfant de moins de 14 ans dans à peine quelques siècles. Malgré les efforts du gouvernement visant à encourager la natalité, ce déclin perdurera encore pendant plusieurs décennies si des changements sociétaux radicaux ne sont pas entamés pour rétablir un équilibre démographique.
Avec une diminution record sur deux années consécutives, le pays n’a compté que 727 277 naissances en 2023 (contre 1,58 million de décès) et 350 074 naissances entre janvier et juin 2024. Le nombre de naissances est à son plus bas niveau depuis 1969, selon le dernier rapport du ministère de la Santé, du Travail et de la Protection sociale.
Le taux de fécondité — le nombre total d’enfants qu’une femme peut avoir au cours de sa vie — diminue de manière alarmante. Alors qu’un taux de 2,1 est nécessaire pour qu’une population reste stable, celui du Japon est resté bien en dessous de ce seuil depuis près d’un demi-siècle. En conséquence, la population ne cesse de diminuer, passant de 128 millions en 2008 à 123,7 millions l’année dernière. Au-dessus du seuil de 2,1, la population augmente avec une forte proportion d’enfants et de jeunes, comme c’est le cas dans de nombreux pays africains et en Inde.
Un seul enfant de moins de 14 ans dans tout le pays d’ici 2720
Hiroshi Yoshida, professeur au Centre de recherche sur l’économie et la société des personnes âgées de l’Université de Tohoku, a mis au point une horloge conceptuelle mettant en évidence le déclin rapide du taux de fécondité au Japon. D’après le Times, l’horloge fournit des données en temps réel sur le nombre d’enfants dans le pays. En se basant sur les données du Bureau des statistiques japonais, l’horloge effectue une mesure du taux de diminution des naissances en comparant les nombres annuels.
D’après les dernières données, le taux de fécondité est tombé à 1,20 en 2023, tandis que celui de Tokyo a chuté en dessous de 1. À ce rythme, selon l’expert, le nombre d’enfants de moins de 14 ans tomberait à un seul dans tout le pays d’ici 2720, soit dans 695 ans seulement. Cette diminution est principalement liée à la baisse du nombre de mariages et à la hausse du nombre de célibataires, sans compter le vieillissement accéléré de la population. En 2023, le nombre de mariages a chuté de 30 000 par rapport à l’année précédente, tandis que le nombre de divorces a augmenté.
Des mesures gouvernementales pour encourager la natalité
La baisse du taux de mariages est due à un certain nombre de facteurs socioculturels, tels que l’émancipation des femmes, les problèmes financiers et les exigences en matière de travail. Les femmes japonaises choisissent de plus en plus de se consacrer à leur carrière plutôt que de fonder une famille. Par ailleurs, le Japon est connu pour ses exigences professionnelles parmi les plus élevées au monde, et les exigences en matière de congé de maternité peuvent décourager certains employeurs de recruter des femmes mariées. En outre, avoir des enfants au Japon nécessite des exigences financières élevées pouvant dissuader les jeunes de s’engager dans le mariage.
Afin de remédier à ces problèmes, le gouvernement japonais a mis en place des mesures qualifiées « d’extraordinaires » pour contrer la baisse de la natalité. Il a, par exemple, développé des structures de garde d’enfants, des projets de financement de logements et a même lancé une application de rencontre visant à encourager le mariage et la natalité. « Le mariage est une décision basée sur les valeurs de chacun, mais le gouvernement métropolitain de Tokyo s’efforce de créer une dynamique en faveur du mariage afin que ceux qui pensent avoir l’intention de se marier un jour puissent faire ce premier pas », peut-on lire sur le site web de l’application. « Nous espérons que chacun d’entre vous souhaitant se marier réfléchira à ce que cela signifie d’être en couple ».
Pour pouvoir s’inscrire sur l’application, les utilisateurs doivent être célibataires, âgés de plus de 18 ans, désireux de se marier et résider ou travailler à Tokyo. Le site mentionne également d’autres mesures gouvernementales visant à soutenir les couples, telles que des méthodes pour équilibrer vie professionnelle et vie privée, pour encourager les hommes à participer aux tâches ménagères, à éduquer les enfants, pour l’orientation professionnelle, etc.
L’initiative a même été félicitée par Elon Musk, PDG de Tesla et de SpaceX (entre autres) et désormais membre du gouvernement de Trump. « Je suis heureux que le gouvernement japonais reconnaisse l’importance de cette question. Si des mesures radicales ne sont pas prises, la population du Japon (et celles de nombreux autres pays) disparaîtront », a-t-il écrit sur X.
Afin de stimuler la natalité et pallier la pénurie de main-d’œuvre, le Japon a considérablement assoupli sa politique d’immigration au cours des dernières années, une initiative inédite depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. En 2023, le pays comptait 3 millions de résidents étrangers, soit 2,3 % de la population.
Cependant, malgré ces efforts, les experts prédisent que le déclin démographique du Japon va perdurer pendant des décennies, notamment en raison de la structure actuelle de la population. Même si le taux de fécondité augmentait aujourd’hui, la population continuerait à diminuer jusqu’à ce que l’équilibre entre le nombre de jeunes et de personnes âgées se rétablisse et que le nombre de naissances dépasse le nombre de décès.