Un véritable problème technologique d’une envergure nationale à cause d’un seul homme ? Mais de qui pourrait-il s’agir ? Son titre officiel est « Sa Majesté Impériale l’Empereur » et son nom, Akihito. Il a succédé au trône du chrysanthème du Japon suite à la mort de son père en 1989.
Aujourd’hui âgé de 84 ans, Akihito quitte le trône à son tour, avec abdication officielle en 2019. Quand il sera parti, cela ne marquera pas seulement la fin d’un règne de plusieurs décennies et la première fois depuis des siècles qu’un empereur cède sa place de son plein gré, mais aussi le début d’impacts technologiques nationaux conséquents, qui iraient donc bien au-delà des aspects culturels.
Akihito, en renonçant au pouvoir, pourrait en réalité déclencher un « effondrement » technologique qui se fera ressentir à travers tout le Japon : une sorte de « remake » du fameux « bug de l’an 2000 », encodé au sein d’une ancienne dynastie qui remonte à près de 3000 ans.
Akihito est considéré comme un descendant direct du premier empereur du Japon, Jimmu, qui selon la légende a régné à partir de 660 av. J.-C., succédant à l’ère des dieux dans la mythologie japonaise.
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Une ascension légendaire
L’accession historique de Jimmu au trône est maintenant considérée comme légendaire par les érudits japonais, mais environ 1300 ans après son règne mythique, les empereurs « modernes » du 7ème siècle ont commencé à faire marquer leur règne impérial par un système de calendrier unique et distinct, dénotant l’ère de chaque empereur.
Il s’agit d’une tradition qui perdure encore aujourd’hui au Japon (en même temps que l’utilisation conventionnelle du calendrier grégorien). Cela signifie que nous sommes actuellement, et ce jusqu’à l’année prochaine (2019), dans la période Heisei, l’ère correspondant au règne de l’empereur Akihito. Oui, vous l’aurez deviné, les problèmes techniques commenceront une fois que cette ère sera officiellement terminée.
Un « effondrement » technologique global
Quand Akihito abdiquera en avril prochain, son fils Naruhito prendra le trône. Ainsi, le règne de Naruhito inaugurera une nouvelle ère japonaise qui succédera officiellement à la période Heisei.
Le problème est que le règne d’Akihito s’étend sur presque toute l’ère de l’Internet moderne, et lorsqu’un nouveau système de calendrier entrera en vigueur en 2019, il est possible que cette transition technologique sans précédent puisse produire toutes sortes de problèmes informatiques, en faisant littéralement dégénérer les ordinateurs.
« Plusieurs secteurs pourraient être confrontés à ces problèmes, tels que le service postal, les distributeurs automatiques de billets de transport ainsi que les banques », a déclaré Anne-Léonore Dardenne, chercheuse indépendante et analyste chez Digital Trends.
« Par exemple, l’enregistrement des paiements d’impôts pourrait être problématique… Il pourrait également devenir temporairement impossible de retirer de l’argent aux guichets automatiques. Le calendrier japonais est utilisé dans presque tous les documents officiels. Pour des raisons politiques ou culturelles, le gouvernement, les organismes publics et financiers ainsi que les différentes institutions utilisent toutes ce calendrier ».
La sévérité de la situation a même été reconnue par Microsoft, qui décrit en interne la transition comme étant l’équivalent japonais du « bug de l’an 2000 ».
« Heureusement, il s’agit d’un événement rare, mais cela signifie aussi que la plupart des logiciels n’ont pas été testés pour s’assurer qu’ils se comporteront correctement en entamant cette nouvelle ère », a expliqué Shawn Steele en avril dernier, ingénieur logiciel chez Microsoft. « L’ampleur de cet événement sur les systèmes informatiques utilisant le calendrier japonais peut être similaire à l’événement du « bug de l’an 2000 » avec le calendrier grégorien », ajoute-t-il.
Pour sa part, Microsoft est en train de développer un code pour Windows 10 afin que le logiciel puisse accueillir une nouvelle ère impériale, mais d’innombrables autres plateformes technologiques doivent également s’adapter.
Il s’agit entre autre de s’appuyer sur le consortium Unicode, qui supervise les normes de caractères de texte à travers d’innombrables langages technologiques et de programmation.
Même si le Japon a indiqué que le nom du nouveau calendrier ne sera pas annoncé avant l’année prochaine, il faut étudier dès maintenant comment incorporer un caractère spécifique pour l’ère imminente de Naruhito, et effectuer un test immédiat.
« Le Comité technique Unicode ne peut pas se permettre de faire des erreurs », a expliqué le directeur technique d’Unicode, Ken Whistler, la semaine dernière. « Il ne peut pas non plus deviner et publier le code instantanément ». Ces challenges technologiques sont malheureusement quelque chose d’inévitable dès qu’il y a utilisation de calendriers.
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« Pour de nombreuses bonnes raisons, un logiciel ne peut pas être écrit par quelqu’un ou une équipe ayant pensé à absolument toutes les éventualités possibles », explique l’historien de la technologie Dylan Mulvin de la London School of Economics, à New Scientist.
Actuellement, les experts de l’industrie informatique au Japon et à l’extérieur s’attaquent sérieusement à ce problème imminent. Espérons simplement qu’ils s’en sortent pas plus mal que lors du fameux bug de l’an 2000.