En 2017, le groupe du Optics of Photosynthesis Lab (OPL) a mis au point une nouvelle méthode permettant de mesurer un signal faible (mais important) produit par toutes les plantes, et dans ce cas précis, par des arbres. L’étude a été publiée il y a quelques semaines dans la revue ScienceDirect.
Ce signal est connu sous le nom de fluorescence de la chlorophylle. Il constitue une émission de rayonnement aux longueurs d’onde visibles et dans le proche infrarouge. Cette fluorescence de la chlorophylle permet de renseigner les chercheurs sur la photosynthèse et l’état de santé des plantes. Elle peut même être mesurée à distance : par exemple à partir du sommet de tours, de drones, d’avions voire même de satellites.
Cependant, l’interprétation du signal reste compliquée et jusqu’à présent, il n’a été possible de le mesurer qu’à l’intérieur de bandes spectrales discrètes provenant d’arbres complètement développés sur le terrain. C’est pour cette raison que l’équipe d’OPL a mis au point une nouvelle technique qui, pour la toute première fois, permet d’observer à distance le spectre complet (soit toutes les couleurs) de fluorescence d’arbres matures poussant en forêt.
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À savoir que la mesure de l’ensemble du spectre des émissions révèle des informations à la fois sur les performances des plantes (leur photosynthèse) et sur leur structure.
Le problème avec les méthodes conventionnelles de télédétection utilisées jusqu’à présent est que durant la journée, la majeure partie de la distribution de la fluorescence reste cachée, car le signal est beaucoup trop faible comparé à l’intensité de la lumière du soleil. Par conséquent, la mesure de la fluorescence pendant la journée, couramment appelée fluorescence induite par le soleil (SIF), nécessite une instrumentation extrêmement sensible et spécialisée.
Mais la nouvelle technique conçue par l’équipe de recherche se distingue des efforts antérieurs par l’utilisation de la technologie LED, qui a permis aux scientifiques d’éclairer la forêt de nuit, leur permettant de révéler le spectre complet de l’émission d’arbres entiers.
« Nous avons compris que nous pouvions exploiter la nuit comme ‘filtre naturel pour la lumière’. Nous sommes donc allés dans la forêt la nuit et avons relié une source lumineuse puissante à limitation de longueur d’onde (une lampe de type disco commerciale) à une tour qui excitait la fluorescence. Puis, nous avons utilisé une instrumentation scientifique spécialisée, un spectroradiomètre, également monté dans la tour pour observer le signal », explique Jon Atherton, chercheur au laboratoire d’optique de la photosynthèse de l’Université d’Helsinki, à l’Institut de recherche sur le système atmosphérique et terrestre (INAR)/Sciences forestières de l’Université d’Helsinki.
Cette idée est brillante car elle permet de mesurer le SIF durant la nuit, ce qui pourrait éventuellement être effectué par le biais d’instruments potentiellement moins coûteux (car moins sensibles) et fournir des données plus faciles à interpréter.
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De plus, cette nouvelle contribution des chercheurs nous rapproche de « l’observation concrète de la photosynthèse », tout en examinant la lumière émise par les plantes, à la fois à petite échelle (serre, cultures, peuplement forestier) et aussi au niveau mondial par satellite. D’ailleurs, l’Agence spatiale européenne prépare à présent la mission satellite FLEX, qui vise à cartographier la fluorescence des plantes à l’échelle mondiale.
Il s’agit d’un fait bien connu : le rôle des forêts dans l’absorption et l’assimilation du carbone atmosphérique est crucial. Et bien qu’il soit difficile d’interpréter les données collectées, aujourd’hui, grâce à la technique de la fluorescence induite par diode électroluminescente (LEDIF), cela pourrait bien changer. « C’est le potentiel de mesure de la fluorescence depuis l’espace qui nous a motivés à faire ce travail, même si nos résultats pourraient également avoir d’autres applications, telles que le phénotypage, l’agriculture de précision ou les pépinières forestières. Nous espérons que nos données pourront être utilisées pour orienter les algorithmes utilisés pour ‘extraire’ la fluorescence depuis l’espace », a ajouté Jon Atherton.