Ce matériau prometteur peut stocker l’énergie solaire pendant des mois, voire des années

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| Pixabay/Kieran Griffiths et al./Trust My Science
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La transition énergétique vers le renouvelable nous a confrontés à de nombreux défis, dont celui du stockage de l’énergie. En effet, récolter de l’énergie renouvelable — qu’elle soit solaire, éolienne ou provenant d’autres sources — ne constitue que la première partie du problème. Rendre les systèmes de capture énergétique plus efficaces n’aurait qu’une utilité limitée si nous ne mettons pas en place des moyens viables et durables de stocker l’énergie pour une utilisation en tout temps. C’est ce que de nombreux scientifiques à travers le monde tentent de faire.

Dernièrement, des chercheurs de l’Université de Lancaster étudiant un matériau cristallin novateur, ont découvert que ce dernier possède des propriétés lui permettant de capter efficacement l’énergie du Soleil. Elle peut alors être stockée pendant plusieurs mois à température ambiante, et peut être libérée à la demande sous forme de chaleur. Avec de nouveaux développements, ce type de matériaux pourrait offrir un potentiel intéressant pour capturer l’énergie solaire durant les mois d’été et la stocker pour l’utiliser en hiver, lorsqu’il y a moins de rayonnement solaire.

En somme, une conception très prometteuse pour des applications telles que les systèmes de chauffage hors réseau ou dans des endroits éloignés, ou comme complément écologique au chauffage conventionnel dans les habitations et les bureaux. Le matériau pourrait également être placé sous la forme d’une fine couche à la surface des bâtiments, ou utilisé sur les pare-brise des voitures, où la chaleur stockée pourrait être utilisée pour dégivrer le verre lors des matins d’hiver, par exemple.

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Vers une nouvelle utilisation des « metal–organic frameworks » (MOF)

Le matériau est basé sur un type de « metal–organic framework » (MOF) (ou « cadre organométallique »). Il s’agit d’un réseau d’ions métalliques liés par des molécules à base de carbone pour former des structures 3D. L’une des principales propriétés des MOF est qu’ils sont poreux, ce qui signifie qu’ils peuvent former des matériaux composites en accueillant d’autres petites molécules au sein de leur structure.

L’équipe de recherche de Lancaster a tenté de comprendre si un composite MOF, précédemment préparé par une équipe de recherche distincte de l’université de Kyoto au Japon et connu sous le nom de « DMOF1 », pouvait être utilisé pour stocker de l’énergie, ce qui n’avait jamais été étudié auparavant. Pour cela, les pores du DMOF ont été chargés de molécules d’azobenzène, un composé qui absorbe fortement la lumière. Ces molécules agissent comme des « interrupteurs à photons », une sorte de « machine moléculaire » pouvant changer de forme lorsqu’un stimulus externe, comme la lumière ou la chaleur, est appliqué.

Lors des tests, les chercheurs ont exposé le matériau à la lumière UV, ce qui a entraîné un changement de forme des molécules d’azobenzène, qui ont pris une configuration tendue à l’intérieur des pores du MOF. Ce processus stocke l’énergie de la même manière que l’énergie potentielle d’un ressort courbé. Il est important de noter que les pores étroits du MOF emprisonnent les molécules d’azobenzène dans leur forme tendue, ce qui signifie que l’énergie potentielle peut être stockée pendant de longues périodes, et à température ambiante.

Un stockage intersaisonnier rendu possible ?

L’énergie est libérée à nouveau lorsque de la chaleur extérieure est appliquée, agissant comme un déclencheur permettant de « changer » son état. Cette libération peut être très rapide, un peu comme un ressort qui se redresse. Cela fournit un pic de chaleur qui pourrait être utilisé pour chauffer d’autres matériaux ou appareils.

D’autres tests ont montré que le matériau était capable de stocker l’énergie pendant au moins quatre mois. C’est un aspect fascinant de la découverte, car de nombreux matériaux photosensibles reprennent leur état initial en quelques heures ou quelques jours seulement. Cette longue durée de stockage de l’énergie offre donc des possibilités de stockage intersaisonnier.

Le concept de stockage de l’énergie solaire dans des photointerrupteurs a déjà été étudié, mais la plupart des concepts précédents exigeaient que les photointerrupteurs soient maintenus dans un liquide. Comme le composite MOF est un solide et non un combustible liquide, il est chimiquement stable et facile à contenir. Il est donc beaucoup plus facile de le développer en revêtements ou en dispositifs autonomes.

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Schéma de principe de fonctionnement simplifié du système de stockage et de libération de l’énergie solaire par photointerrupteur MOF. L’énergie est d’abord stockée dans la structure cristalline, puis libérée à la demande par l’application de lumière ou de chaleur. © Kieran Griffiths et al.

« Le matériau fonctionne un peu comme les matériaux à changement de phase, qui sont utilisés pour fournir de la chaleur dans les chauffe-mains. Cependant, si les chauffe-mains doivent être chauffés pour se recharger, l’avantage de ce matériau est qu’il capte l’énergie « gratuite » directement du soleil. Il ne comporte pas non plus de pièces mobiles ou électroniques et il n’y a donc pas de pertes lors du stockage et de la libération de l’énergie solaire. Nous espérons qu’avec de nouveaux développements, nous serons en mesure de fabriquer d’autres matériaux qui stockent encore plus d’énergie », déclare le Dr John Griffin, maître de conférences en chimie des matériaux à l’université de Lancaster et co-auteur principal de l’étude.

Ces résultats de preuve de concept ouvrent de nouvelles voies de recherche visant à déterminer quels autres matériaux poreux pourraient avoir de bonnes propriétés de stockage de l’énergie en utilisant le concept des photointerrupteurs confinés. « Notre approche signifie qu’il existe un certain nombre de moyens d’optimiser ces matériaux, soit en modifiant le photointerrupteur lui-même, soit le cadre organométallique », ajoute le Dr Nathan Halcovitch, co-auteur de l’étude.

D’autres applications potentielles pour les matériaux cristallins contenant des molécules de photointerrupteurs comprennent le stockage de données — la disposition bien définie des photointerrupteurs dans la structure cristalline signifie qu’ils pourraient en principe être commutés un par un en utilisant une source de lumière précise et donc stocker des données comme sur un CD ou un DVD —, mais à un niveau moléculaire. Ils ont également un potentiel pour délivrer des médicaments : les médicaments pourraient être enfermés dans un matériau à l’aide de photointerrupteurs pour ensuite être libérés à la demande à l’intérieur du corps à l’aide d’un déclencheur lumineux ou thermique.

Bien que les résultats pour la capacité de ce matériau à stocker de l’énergie pendant de longues périodes soient prometteurs, sa densité énergétique reste modeste. Les prochaines étapes consistent donc à rechercher d’autres structures de MOF ainsi que d’autres types de matériaux cristallins ayant un plus grand potentiel de stockage d’énergie.

Source : Chemistry of Materials

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