La mémoire musicale ne se détériore pas avec l’âge, selon une étude

Les octogénaires se souviennent des morceaux familiers aussi efficacement que les jeunes.

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Alors qu’une grande partie de notre fonction mémorielle se détériore à mesure que nous vieillissons, une nouvelle étude suggère que la mémoire musicale, elle, ne diminue pas avec l’âge. Des expériences ont montré que les octogénaires peuvent identifier des mélodies familières aussi bien que les jeunes. Cela serait dû aux émotions naturellement suscitées par la musique.

De nombreuses recherches ont mis en évidence l’association entre le vieillissement et le déclin des capacités d’encodage et de récupération de la mémoire, en particulier pour les nouvelles informations. Il a été démontré que ces changements se manifestent différemment selon le type de mémorisation concerné.

La mémorisation liée aux tâches de reconnaissance, aux connaissances sémantiques (le système par le biais duquel l’individu stocke ses connaissances générales) et aux processus automatiques, est par exemple moins affectée par le vieillissement. En revanche, la prise en charge des tâches nécessitant un processus en temps réel de traitement volontaire et laborieux, est considérablement altérée par le vieillissement.

D’autre part, des études ont montré que les événements ou les tâches reposant sur des informations prévisibles ou familières, telles que la musique, contribuent à la mémorisation visuelle chez les personnes âgées. La mémoire musicale enregistre ainsi un intérêt croissant en tant qu’intervention potentielle pour maintenir le bon fonctionnement cognitif chez ces personnes. En effet, la musique est un excellent stimulus pour la mémorisation en raison de sa diversité et de sa richesse en informations.

« On entend tout le temps des anecdotes sur les personnes atteintes d’Alzheimer sévère qui ne peuvent pas parler, ne peuvent pas reconnaître les gens, mais chantent les chansons de leur enfance ou jouent du piano », explique dans un article de blog de la revue Nature, Sarah Sauvé, musicologue à l’Université de Lincoln, au Royaume-Uni. Cependant, peu d’études ont véritablement exploré les effets du vieillissement sur la mémoire musicale. D’autre part, les rares études sur le sujet sont généralement effectuées dans un environnement contrôlé (en laboratoire).

Dans le cadre de la nouvelle étude, récemment publiée dans la revue PLOS ONE, Sauvé et ses collègues ont comparé les effets du vieillissement sur la familiarité pour la musique lors d’un concert symphonique en direct, aux effets lors d’un concert similaire en laboratoire. L’objectif de l’étude était de savoir si un concert en direct peut affecter les performances de mémoire musicale, en particulier chez les personnes âgées.

Mémoire musicale : « un échafaudage cognitif » pour améliorer la mémoire générale ?

Pour effectuer son enquête, l’équipe de la nouvelle étude a recruté 90 adultes en bonne santé âgés de 18 à 86 ans pour assister à un concert classique en direct de l’Orchestre symphonique de Terre-Neuve à St John’s, au Canada. 31 autres participants ont visionné un enregistrement du même concert dans l’enceinte d’un laboratoire.

Trois principaux morceaux de musique ont été proposés : « l’Eine kleine Nachtmusik » de Mozart (considérée comme familière par la plupart des participants) et deux autres morceaux expérimentaux spécialement commandés. L’un des morceaux expérimentaux (intitulé « Pirate Waltz ») était harmonieux et agréable à écouter, tandis que l’autre (intitulé « Unexpectedly Absent ») était dissonant et non conforme aux normes mélodiques spécifiques à la musique classique occidentale.

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Thème (A) et exemples d’itérations du thème dans un contexte facile (B), moyen (C) et difficile (D) pour Unexpectedly Absent, la pièce atonale et inconnue. © Sarah A. Sauvé  et al.

Avant chaque interprétation, l’orchestre a joué trois fois une courte séquence importante de chaque morceau avant de les interpréter dans leur intégralité. Dans les trois cas, le thème était d’abord interprété par l’orchestre au complet, puis joué de manière isolée par un soliste utilisant un seul instrument. Les auditeurs ont ensuite été invités à se souvenir de ces thèmes et à appuyer sur un bouton à chaque fois qu’ils les reconnaissaient lorsque les morceaux étaient interprétés en entier.

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Thème (A) et exemples d’itérations du thème dans un contexte facile (B), moyen (C) et difficile (D) pour Pirate Waltz, la pièce tonale et inconnue. © Sarah A. Sauvé  et al.

Les chercheurs ont constaté que tous les participants ont reconnu le morceau de Mozart de la même manière, y compris ceux de plus de 80 ans. Cela suggère que la familiarité joue un rôle clé dans le processus mémoriel musical. En revanche, l’ensemble des volontaires a eu du mal à reconnaître la séquence à identifier dans « Pirate Waltz » et encore moins dans « Unexpectedly Absent ». Cet effet, ainsi que la visualisation en direct ou en laboratoire, ne présentait aucune différence liée à l’âge.

Les experts suggèrent que la raison pour laquelle la mémoire musicale semble résister au déclin cognitif lié à l’âge est probablement liée aux émotions suscitées par la musique. En effet, des études antérieures ont suggéré que l’amygdale — le centre de traitement des émotions — fonctionne un peu comme un tampon d’importance. Cela signifie qu’il agit comme un filtre sélectif concernant les souvenirs ou événements à mémoriser ou non.

Toutefois, l’étude n’a pas pris en compte la santé cognitive de tous les participants et ne fournit pas de détails concernant la manière dont les troubles cognitifs ou les maladies neurodégénératives pourraient affecter la mémoire musicale. Néanmoins, les résultats suggèrent que la mémoire musicale pourrait contribuer à améliorer d’autres aspects de la fonction mémorielle chez les personnes souffrant par exemple de démence, en agissant comme une sorte « d’échafaudage cognitif ».

« L’absence d’effet d’âge fournit une preuve encourageante que les divers indices de la musique peuvent encourager l’échafaudage cognitif, améliorant ainsi l’encodage et la reconnaissance ultérieure », concluent les chercheurs dans leur document.

Source : PLOS ONE

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