Une mystérieuse momie semblant hurler à l’agonie serait morte dans de conditions douloureuses

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Photographies de face et de profil droit de la tête de la momie. | Sahar N. Saleem et Samia El-Merghani
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En effectuant des fouilles sous la tombe de Senmut, l’architecte de la reine Hatcheptsout, des archéologues ont découvert l’étrange momie de 3500 ans d’une femme semblant hurler à l’agonie. Cette étonnante expression serait due à une mort douloureuse ou à un important stress émotionnel, qui a probablement provoqué une rigidité cadavérique précoce empêchant les embaumeurs de fermer la mâchoire.

Entre 1935 et 1936, le Metropolitan Museum de New York a effectué des fouilles massives à Deir Elbahari, près de Louxor, sur le site de l’ancienne Thèbes, le long du flanc de la colline abritant la tombe de Senmut. Il s’agit de l’architecte et du responsable des travaux royaux de la reine Hatschepsout, qui a régné entre 1479 et 1458 avant notre ère.

Sous la tombe de Senmut se trouvait une chambre funéraire séparée destinée sa mère, Hat-Nufer, ainsi que d’autres sépultures individuelles abritant d’autres membres de sa famille. Un cercueil en bois sans nom et contenant la momie d’une femme à la bouche grande ouverte y a également été découverte. Surnommée « la femme qui hurle », elle a été inhumée il y a environ 3500 ans et portait une perruque noire ainsi que deux anneaux en or et en argent en forme de scarabée.

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Depuis sa découverte, les archéologues ont cherché à déterminer pourquoi la momie a été conservée dans cet état, contrairement aux autres membres de la famille de Senmut enterrés à proximité. D’autres signes montraient également que son embaumement ne concorde pas avec les techniques traditionnellement utilisées. Les techniques avancées utilisées par deux archéologues de l’Université du Caire et du Ministère égyptien du Tourisme et des Antiquités, ont permis d’obtenir plus d’informations dans ce sens. Les résultats de l’enquête sont détaillés dans la revue Frontiers in Medicine.

Des signes d’arthrite au niveau des vertèbres

Pour étudier la momie, le duo de chercheurs l’a « disséqué virtuellement » en utilisant des techniques avancées de tomodensimétrie. Pour ce faire, ils ont analysé les différents matériaux par le biais de la microscopie électronique à balayage (MEB), la spectroscopie infrarouge à transformée de Fourier (FTIR) et l’analyse par diffraction des rayons X (DRX). Cela a permis de déterminer précisément son âge et son état de conservation, ainsi que les éventuelles pathologies dont elle souffrait de son vivant.

Les experts ont constaté que la momie est encore dans un bon état de conservation, 3500 ans après son inhumation. Les images tomographiques bi- et tridimensionnelles ont montré qu’elle mesurait 1,54 mètre de son vivant et est décédée à l’âge de 48 ans. La présence d’ostéophytes (des excroissances osseuses au niveau des articulations) au niveau de la colonne vertébrale indique qu’elle souffrait d’une légère arthrite.

Il lui manquait plusieurs dents, probablement perdues avant sa mort. En effet, sa mâchoire présente des signes de résorption osseuse, un processus de cicatrisation qui se produit après l’extraction d’une dent. À noter que la dentisterie est née dans l’Égypte ancienne et les extractions dentaires étaient déjà courantes à l’époque. D’autres dents étaient cassées ou présentaient des signes d’usure.

Une rigidité cadavérique précoce ?

Fait étonnant, mis à part l’étrange expression du visage de la momie, les chercheurs n’ont identifié aucune cause de décès évidente. De plus, il n’y a aucune trace d’incision d’embaumement et le cerveau, le diaphragme, le cœur, les poumons, le foie, la rate, les reins et les intestins sont toujours présents. « Cela a été une surprise pour moi, car la méthode classique de momification du Nouvel Empire – 1550-1069 avant notre ère – impliquait l’ablation de tous les organes à l’exception du cœur », explique à The Guardian Sahar N. Saleem de l’Université du Caire, l’un des auteurs de l’étude.

momie hurlante
Aperçu de la tête jusqu’au milieu des cuisses de la momie anonyme. © Sahar N. Saleem et Samia El-Merghani

Ces constats pourraient suggérer qu’il y a eu une négligence de la part des embaumeurs, qui auraient à la fois omis de refermer la mâchoire de la femme et de retirer ses organes. Ce type de négligence est généralement observé chez les momies appartenant aux classes inférieures.

Cependant, cela ne semble pas être le cas de la femme qui hurle, car l’analyse de sa peau a montré qu’elle a été embaumée avec de la résine de genévrier et de l’encens, des matériaux coûteux à l’époque (sans compter qu’elle faisait apparemment partie de la famille de Senmut). Ces matériaux devaient être spécialement importés en Égypte depuis la Méditerranée orientale et l’Afrique de l’Est ou l’Arabie du Sud.

D’autre part, même ses cheveux naturels étaient teints au henné et au genévrier, tandis que la longue perruque en fibre de dattier a été traitée avec des cristaux de quartz, de magnétite et d’albite. Cela a probablement été effectué pour rigidifier les mèches et leur donner une couleur noire, symbolisant la jeunesse chez les anciens Égyptiens.

Selon les chercheurs, ces soins particuliers et ces matériaux coûteux excluent l’hypothèse d’une négligence lors de l’embaumement. « Cela, ainsi que l’apparence bien préservée de la momie, contredisent la croyance traditionnelle selon laquelle l’échec du retrait de organes internes impliquait une mauvaise momification », suggère Saleem dans un communiqué.

Ils en ont alors conclu que l’étrange expression de la momie est probablement due à un spasme cadavérique, ce qui implique que la femme est probablement morte en hurlant de douleur ou d’agonie. Le spasme cadavérique est une forme de rigidité musculaire précoce généralement associée à une mort violente. « Les embaumeurs n’ont pas pu fermer la bouche et ont momifié le corps contracté avant qu’il ne se décompose ou ne se relâche, préservant ainsi sa bouche ouverte après la mort », estime Saleem.

Toutefois, des experts remettent en question cette hypothèse en avançant qu’il est très peu probable que les embaumeurs aient pu ne pas pouvoir arranger la mâchoire de la momie. En effet, les processus de dessiccation au cours de la momification durent en moyenne 40 jours, ce qui laisserait largement le temps pour remédier à ce problème. Cette expression de hurlement pourrait ainsi être le résultat de procédures d’enterrement ou de changements se produisant après.

Source : Frontiers in Medicine

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