Les recherches en entomopathologie ont toujours accordé plus d’intérêt pour les insectes piqueurs, surtout ceux hématophages, ces derniers étant des vecteurs de maladies graves voire mortelles. Le moustique serait par exemple l’animal faisant le plus de victimes humaines au monde. L’implication pathologique d’autres insectes a priori inoffensifs étant encore très peu étudiée, une nouvelle étude parue dans la revue Insects a mis en lumière de quelle façon la mouche domestique peut potentiellement constituer une plus grande menace pour l’homme (que le moustique). Consommant exclusivement du liquide, cet insecte vomirait sur la nourriture pour la prédigérer et pourrait de ce fait véhiculer de dangereux agents pathogènes.
Dans le monde, il existerait plus de 80 000 espèces différentes de mouches, dont la morphologie varie considérablement d’une espèce à l’autre. Certaines peuvent piquer et se nourrir de sang humain ou animal, en leur arrachant au passage (avec leurs mandibules) un morceau de chair pour accéder aux capillaires. D’autres se nourrissent uniquement de la chair arrachée en la décomposant ou se nourrissent tout simplement de matières organiques en décomposition. Certaines ont également un régime alimentaire très spécifique, comme la mouche de cerisier, qui comme son nom l’indique, se nourrit exclusivement de cerises.
Mouche domestique : potentiellement plus dangereuse que le moustique
Dépourvues de mandibules, les mouches « non piqueuses » se nourrissent exclusivement de liquide. En se posant sur la nourriture solide, elles vomiraient d’abord un mélange de salive et de restes de nourriture prédigérée, afin de les pré-décomposer et les aspirer en les prenant goutte par goutte avec leurs pattes.
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D’après les chercheurs de l’Université du Massachusetts, la mouche domestique serait la plus à craindre, car étant omnivore, celle-ci se pose et se nourrit de tout ce qui est susceptible de lui fournir des nutriments et de l’énergie. Présente en abondance aussi bien dans les campagnes qu’en milieu urbain, elle peut se poser sur de la nourriture fraîche ou avariée, sur des sécrétions de malades, sur des selles, etc. Elle est notamment attirée par la chaleur et certaines odeurs comme celles du sucre et de la décomposition.
À chaque fois qu’elles mangent, elles régurgitent en partie ce qu’elles ont préalablement consommé, y compris les agents pathogènes (contenus par exemple dans les déjections). Elles remplissent une sorte de poche à la manière d’un réservoir, qui servirait principalement de lieu de stockage et non de digestion. Cette poche leur sert à la fois de réservoir d’enzymes, qu’elles recrachent à l’extérieur pour prédécomposer leur nourriture, et de réservoir de nourriture — qui passera ensuite dans une autre poche destinée à la digestion.
Les agents pathogènes qu’elles peuvent aspirer ne sont donc pas totalement digérés, la poche de stockage n’étant pourvue que de peu d’enzymes. À savoir également qu’elles sont couvertes de toutes les matières décomposées sur lesquelles elles se posent (et se posent ensuite sur nous ou sur notre nourriture). Bien que les mouches hématophages et autres insectes piqueurs ayant directement accès à la circulation sanguine sont souvent jugés plus dangereux, « nous devons faire attention à celles qui vivent parmi nous, car elles tirent leurs nutriments des personnes et des animaux qui libèrent des agents pathogènes dans leurs larmes, leurs excréments et leurs blessures », avertit John Stoffolano, professeur d’entomologie à l’Université du Massachusetts et auteur principal de l’étude.
De ce fait, la mouche domestique peut facilement véhiculer des maladies telles que le choléra, la salmonellose, la typhoïde, la tuberculose, etc. De plus, certaines mouches ayant développé une résistance aux insecticides pourraient abriter des agents pathogènes résistants aux antibiotiques.
Un membre important de l’écosystème
Il faut cependant noter que malgré la perception généralement négative que l’on a de la mouche, elle fait partie d’un important service écosystémique. Du fait de sa consommation de matières organiques en décomposition, elle joue un rôle important dans l’élimination des déchets, qui nourrissent ultérieurement d’autres insectes ou apportent des nutriments au sol pour les plantes. La mouche fait également partie des pollinisateurs et contribue au cycle de reproduction des plantes.
D’un autre côté, elle fait également partie d’une chaîne alimentaire comprenant de nombreuses espèces, telles que les oiseaux, les batraciens, les arachnides, etc. Chercher à l’éradiquer troublerait ainsi un équilibre fondamental instauré dans la biosphère depuis des milliers d’années.