Cette somme symbolique représente le tout premier paiement jamais versé à une entreprise dans le cadre d’un contrat d’exploitation de ressources spatiales. Ce chèque de 10 cents signé par la NASA a été remis le 23 août, lors du 36e Symposium annuel sur l’espace, à Justin Cyrus, PDG de l’entreprise Lunar Outpost. En décembre dernier, la start-up avait remporté le tout premier contrat de l’Histoire pour la collecte et la commercialisation de matériaux provenant de la surface lunaire.
Ce chèque récompense Lunar Outpost pour avoir mené à bien l’examen du concept pour ce contrat, mais marque surtout une étape fondamentale dans la collaboration entre Lunar Outpost et la NASA, qui servira de point de référence pour tous les futurs contrats liés aux ressources spatiales. « Cela établit un cadre juridique et procédural qui sera utilisé pendant des générations et des décennies pour des entreprises comme la nôtre et bien d’autres, afin de collecter des ressources sur la surface lunaire ou sur d’autres corps planétaires et de les rendre utiles à l’humanité », a déclaré Justin Cyrus.
Dans le cadre de ce contrat, Lunar Outpost collectera du régolithe dans une région proche du pôle sud lunaire, où les ressources et la glace d’eau devraient être abondantes, à l’aide de son rover MAPP (Mobile Autonomous Prospecting Platform). « Cette transaction est également la preuve que la vente de ressources spatiales est une incitation économique viable pour l’industrie spatiale commerciale », souligne la société dans un communiqué.
Poser les bases juridiques de l’exploration lunaire
Bien que le montant du contrat soit ridiculement faible (1 $ au total), cet accord souligne la volonté de la NASA de jeter les bases d’une acquisition et d’une vente durables des ressources spatiales avant une inévitable « ruée vers l’or », selon les termes de Lunar Outpost. Pour rappel, en octobre 2020, la NASA avait d’ores et déjà établi « les accords Artemis » pour encadrer l’exploitation des ressources extraterrestres. « Fondamentalement, les accords Artemis aideront à éviter les conflits dans l’espace et sur Terre en renforçant la compréhension mutuelle et en réduisant les perceptions erronées », déclarait à l’époque Mike Gold, administrateur associé par intérim de la NASA ; en juin 2021, 12 pays avaient adhéré à ces accords.
Les ressources spatiales joueront en effet un rôle clé dans le programme Artemis de la NASA et dans l’avenir de l’exploration spatiale. « La capacité d’extraire et d’utiliser les ressources extraterrestres garantira que les opérations Artemis pourront être menées en toute sécurité et de manière durable pour soutenir l’exploration humaine », souligne Bill Nelson, administrateur de la NASA. Le contrat conclu avec Lunar Outpost prévoit que celle-ci prélève une petite quantité de poussière lunaire. « Nous allons collecter 100 grammes de régolithe lunaire uniquement », a estimé Justin Cyrus.
L’entreprise envisage de rechercher également des matières volatiles et de la glace d’eau et travaille actuellement à la sélection des technologies qui lui permettront d’atteindre ses objectifs. Les responsables de la NASA espèrent que lors de futures missions, il sera possible d’utiliser le régolithe lunaire pour créer une sorte de ciment permettant de construire des installations, et la glace d’eau pour créer du carburant pour fusée ou d’autres usages.
Bientôt le tout premier réseau LTE/4G lunaire ?
La mission de collecte de Lunar Outpost est programmée pour le dernier trimestre 2022 ; elle s’effectuera en partenariat avec Nokia et Intuitive Machines et impliquera la construction d’une infrastructure de communication sur la Lune. Pour ce faire, la MAPP transportera une charge utile permettant de développer le tout premier réseau LTE/4G lunaire ; le système permettra à l’atterrisseur Nova-C d’Intuitive Machines de fournir un réseau de communication sans fil sur la surface lunaire et d’agir comme une passerelle de communication vers la Terre.
L’un des principaux défis à relever pour permettre une présence durable de l’Homme sur la Lune est en effet de fournir un moyen de communication efficace entre les multiples entités qui participeront à des opérations de surface complexes, y compris les rovers, les atterrisseurs, les astronautes, les stations au sol et les équipements scientifiques et expérimentaux. Toutes devront partager de grandes quantités de données pour remplir leurs missions respectives et mener à bien leurs activités.
Pour honorer le contrat avec la NASA, la MAPP embarquera par ailleurs une sorte de trémie montée sur roues. La société rappelle également dans un communiqué qu’elle dispose d’un espace de charge utile secondaire, qui représente « une opportunité idéale pour la recherche » et pourrait potentiellement intéresser d’autres entreprises souhaitant examiner l’environnement lunaire.
À noter que ce n’est pas la première fois que la start-up travaille avec la NASA : Lunar Outpost a précédemment développé des moniteurs de qualité de l’air pour répondre au besoin de l’agence de contenir les poussières lunaires dangereuses, a expliqué Nelson lors d’un point de presse au Space Symposium. Destinés à la Station spatiale internationale et à la future passerelle lunaire de la NASA, les Canary Air Quality Monitors, spécialement conçus pour résister aux conditions environnementales les plus difficiles, sont d’ores et déjà largement utilisés aujourd’hui sur Terre pour détecter les particules et gaz polluants.