Au cours des dernières années, physiciens et ingénieurs ont appris à détecter et maîtriser la quasi-totalité du spectre électromagnétique, des UVs aux infrarouges en passant par les rayons gamma. Cependant, une gamme de fréquence échappait encore aux scientifiques : la fréquence térahertz (THz). Mais récemment, une équipe de chercheurs a mis au point un dispositif de détection THz au graphène capable d’amplifier les ondes THz. Une véritable prouesse scientifique qui pourrait déboucher sur une toute nouvelle ère technologique.
Les ondes térahertz (THz) se situent entre les micro-ondes et l’infrarouge dans le spectre des fréquences électromagnétique, mais en raison de leur faible énergie, les scientifiques n’ont pas été en mesure d’exploiter leur potentiel. L’énigme est connue dans les cercles scientifiques comme le « fossé térahertz ».
Être capable de détecter et d’amplifier les ondes THz (rayons T) ouvrirait une nouvelle ère de technologies médicales, de communication, satellitaires, cosmologiques et autres. Une application majeure serait une alternative sûre et non destructive aux rayons X. Cependant, jusqu’à présent, les longueurs d’onde impliquées, qui varient entre 3 mm et 30 μm, se sont révélées impossibles à utiliser en raison de signaux relativement faibles provenant de toutes les sources existantes.
Un amplificateur d’ondes THz reposant sur le graphène
Une équipe de physiciens a créé un nouveau type de transistor optique — un amplificateur THz fonctionnel — utilisant du graphène et un supraconducteur à haute température. La physique derrière l’amplificateur repose sur les propriétés du graphène, qui est transparent et non sensible à la lumière et dont les électrons « n’ont pas de masse ». Il est composé de deux couches de graphène et d’un supraconducteur qui emprisonnent les électrons « sans masse » du graphène entre eux comme un sandwich.
L’appareil est ensuite connecté à une source d’alimentation. Lorsque le rayonnement THz frappe la couche externe de graphène, les particules piégées à l’intérieur se fixent aux ondes sortantes, les amplifiant. Le professeur Fedor Kusmartsev, du département de physique de Loughborough, explique : « Lorsque la lumière THz frappe le sandwich, elle est réfléchie, comme un miroir. Le point principal est qu’il y aura plus de lumière réfléchie que celle ayant frappé l’appareil ».
« Cela fonctionne parce que l’énergie externe est fournie par une batterie ou par la lumière qui frappe la surface à partir d’autres fréquences plus élevées du spectre électromagnétique. Les photons THz sont transformés par le graphène en électrons sans masse, qui, à leur tour, sont retransformés en photons THz réfléchis et énergisés. En raison d’une telle transformation, les photons THz tirent leur énergie du graphène — ou de la batterie — et les signaux THz faibles sont amplifiés ».
Vers la maîtrise de la fréquence THz et l’avènement d’une nouvelle ère technologique
L’étude a été publiée dans la revue Physical Review Letters. L’équipe continue de développer le dispositif et espère avoir bientôt des prototypes prêts à être testés. Le professeur Kusmartsev a déclaré espérer avoir un amplificateur opérationnel prêt à être commercialisé dans environ un an. Il a ajouté qu’un tel appareil améliorerait considérablement la technologie actuelle et permettrait aux scientifiques d’en révéler plus sur le cerveau humain.
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« L’univers est plein de rayonnements térahertz et de signaux. En fait, tous les organismes biologiques les absorbent et les émettent. J’espère qu’avec un tel amplificateur disponible, nous serons en mesure de découvrir de nombreux mystères de la nature. Par exemple, comment les réactions chimiques et les processus biologiques se produisent, ou comment notre cerveau fonctionne au niveau de la pensée » déclare Kusmartsev.
« Il possède des propriétés qui amélioreraient considérablement de vastes domaines scientifiques tels que l’imagerie, la spectroscopie, la tomographie, le diagnostic médical, la surveillance de la santé, le contrôle de l’environnement et l’identification chimique et biologique. Le dispositif que nous avons développé permettra aux scientifiques et aux ingénieurs d’exploiter cette bande passante et de créer la prochaine génération d’équipements médicaux, de matériel de détection et de technologie de communication sans fil » ajoute-t-il.