Des chercheurs du Lawrence Livermore National Laboratory (États-Unis) ont conçu un nouveau système capable de condenser un laser multipétawatts par le biais d’un réseau de transmission à plasma. Ultrarapide et des milliers de fois plus puissant que les systèmes laser actuels de la même taille, ce nouveau prototype pourrait surmonter leurs limites — les dispositifs à semi-conducteurs conventionnels ayant tendance à se détériorer rapidement sous une trop grande puissance. Les chercheurs se sont tournés vers un dispositif utilisant le plasma car il permet de diriger les faisceaux de lumière à très haute énergie sans subir de dégâts. Cependant, un autre problème subsiste pour pouvoir exploiter le système à pleine puissance : l’homogénéité du plasma. De fait, des années de recherche pourraient encore être nécessaires avant d’aboutir à un dispositif viable.
Les systèmes laser les plus efficaces sont équipés de réseaux de transmission généralement composés de matériaux réfléchissants tels que de la silice recouverte d’or. Le même institut de recherche avait auparavant déjà conçu un système utilisant ce type de matériaux, notamment dans le plus grand réseau de diffraction au monde — capable de délivrer des impulsions pétawatts de 500 joules. Ces puissants systèmes sont dotés de réseaux de transmission de grande taille et tirent des faisceaux d’une dizaine de pétawatts (de puissance) pendant un quadrillionième de seconde.
Pour atteindre une puissance équivalente (de plusieurs pétawatts ou exawatts) sur une plus longue durée, ce genre de système consommerait beaucoup trop d’énergie et pourrait se détruire en dépassant les limites de fluence (densité d’énergie) des lentilles optiques solides.
D’après les auteurs de la nouvelle étude, parue dans la revue APS Physics, la puissance et la taille d’un laser dépendent de la capacité de ses composants à supporter le faisceau sans être endommagés. Les optiques en verre doivent être ainsi suffisamment grandes pour dissiper suffisamment de chaleur pour ne pas être détruites par un faisceau laser trop puissant. La limitation des dommages est aussi effectuée grâce à un procédé appelé diffraction par amplification d’impulsions chirpées, permettant d’étirer le faisceau laser, de l’amplifier puis de le comprimer.
Le plasma pourrait supporter des faisceaux de puissance plus élevée avec des réseaux de la même taille, ou des faisceaux aussi puissants avec un réseau de 1,5 millimètre de diamètre. « L’énergie du laser est répartie pour maintenir une faible intensité locale. Comme le plasma résiste mieux aux dommages optiques qu’un morceau de verre, par exemple, nous pouvons imaginer construire un laser qui produit des centaines ou des milliers de fois plus de puissance qu’un système actuel sans l’agrandir », explique dans un communiqué Matthew Edwards, co-auteur de la nouvelle étude et professeur adjoint de génie mécanique à l’Université de Stanford.
Le nouveau laser est composé d’un réseau de transmission qui projette des rayons laser dans du gaz afin de créer des motifs spéciaux et produire le plasma le plus homogène possible. Passant à travers ce dernier, les impulsions lumineuses sont davantage concentrées, plus rapides et plus puissantes.
Homogénéiser le plasma, un vrai défi
Le plasma, un mélange liquide d’ions et d’électrons libres, serait adapté à des lasers à haut taux de répétition et à puissance moyenne-élevée. Le nouveau système de laser serait ainsi comparable en taille au célèbre L3 HALPS mais avec 100 fois plus de puissance de crête. À savoir que ce laser est capable de produire 30 joules d’énergie pendant 30 femtosecondes. Le nouveau système pourrait ainsi fonctionner avec 10 Hertz mais ne pourrait pas encore supporter un laser à onde continue à puissance moyenne-élevée.
Par ailleurs, le système d’optique à plasma est limité en matière de compression d’impulsions à haute puissance, car il serait très difficile de créer une grande surface de plasma suffisamment homogène pour produire des ondes linéaires. « Il est difficile de les rendre suffisamment homogènes, de faire en sorte que les variations de température et de densité soient suffisamment faibles », indique Edwards.
Toutefois, les chercheurs estiment que leur nouveau système serait capable de fournir un certain degré de stabilité dont d’autres mécanismes de compression à base de plasma seraient incapables. Cet exploit serait possible car le système n’a besoin que de gaz comme milieu initial et est moins sensible aux variations de conditions du plasma. Ce dernier devra également n’occuper que peu de volume pour pouvoir être suffisamment uniforme.
Prochainement, le groupe de recherche compte tester son système sur la base d’une version plus petite mais aussi puissante que les lasers à haute énergie actuels.