Des chercheurs ont développé un nouveau type de transistor laser qui peut basculer entre deux états d’énergie stables : électronique et photonique. Cela pourrait un jour permettre un transfert de données 100 fois plus rapide que ce que proposent les appareils numériques conventionnels actuels.
Un transistor laser est un dispositif semi-conducteur qui fonctionne comme un transistor, mais avec une sortie électrique et une sortie optique par opposition aux deux sorties électriques typiques.
Le prototype de transistor comporte ce qu’on appelle la bistabilité (soit un signal ayant deux états logiques stables : 0 et 1). Le passage d’un état à un autre ne peut s’opérer qu’à la suite d’une action extérieure. Un seul commutateur a la capacité d’alterner entre signal optique et électrique, ce qui pourrait contribuer au développement de systèmes informatiques basés sur la lumière, où les données sont transportées entre des semi-conducteurs par des photons au lieu d’électrons.
« Incorporer un transistor avec bistabilité électrique et optique dans une puce informatique augmentera considérablement la vitesse de traitement », explique l’ingénieur en microélectronique Milton Feng, de l’Université de l’Illinois, à Urbana-Champaign. « …Car les appareils peuvent communiquer sans l’interférence qui se produit lorsqu’ils sont limités aux transistors à électrons », ajoute-t-il.
En effet, dans les appareils électroniques classiques, les micro-puces sont constituées de milliards de petits commutateurs appelés transistors, qui constituent des passerelles pour canaliser le flux d’électrons à travers un circuit intégré. Mais le problème avec ce type de modèle (qui fonctionne très bien pour les appareils électroniques depuis maintenant plusieurs décennies), est que comme les processeurs informatiques modernes deviennent de plus en plus rapides et puissants, le nombre de transistors augmente également de manière inévitable.
Cette tendance est décrite par la Loi de Moore : une loi empirique ayant trait à l’évolution de la puissance des ordinateurs et de la complexité du matériel informatique. La célèbre prédiction a été faite par le cofondateur d’Intel, Gordon Moore, qui stipule que les transistors comptent sur un circuit intégré et que leur nombre va doubler tous les deux ans.
La loi de Moore a effectivement bien prédit ce qui s’est passé dans les années 1960, mais une série de problèmes techniques menace actuellement de renverser sa continuité : cela pourrait empêcher les processeurs de devenir de plus en plus rapides si nous ne mettons pas au point de nouvelles techniques et technologies pour les produire.
Le problème vient principalement du fait que les transistors sont devenus si incroyablement petits qu’ils deviennent maintenant de plus en plus compliqués à réduire (en taille). Il y a également de nombreuses inquiétudes quant à l’efficacité des transistors électroniques à économie d’énergie si la loi de Moore continue à suivre sa tendance.
C’est notamment pour ces raisons que les scientifiques cherchent de nouvelles manières de développer des ordinateurs dont les circuits à photons. En effet, la lumière peut parcourir une distance bien plus rapidement que les électrons dans un circuit intégré, ce qui explique l’envie de créer des processeurs basés sur une technologie photonique au lieu des dispositifs électroniques uniquement.
C’est dans ce but que Feng et son collègue chercheur, Nick Holonyak Jr., ont mis au point le concept du transistor laser en 2004 : soit un dispositif semi-conducteur incorporant des sorties électriques et optiques. « Le moyen le plus rapide pour que le courant passe dans un matériau semi-conducteur est que les électrons sautent entre les bandes dans le matériau lors d’un processus appelé « effet tunnel » », expliquait Feng en 2016. « Les photons légers aident à transporter les électrons, par le biais d’un processus appelé effet tunnel à assistance photonique intra-cavité, ce qui rend le dispositif beaucoup plus rapide », ajoute-t-il.
Dans leur dernière recherche, la même équipe décrit à présent comment le transistor laser peut basculer entre les deux types de signaux : une distinction cruciale pour l’informatique optique, car malgré les progrès dans le domaine de la technologie photonique, les scientifiques estiment que nous devrons encore utiliser les systèmes électroniques dans de nombreux futurs modèles de puces.
« On ne peut pas supprimer complètement l’électronique car nous devons « brancher » un courant et le convertir en lumière », explique Feng. « Là est le problème avec le concept des ordinateurs totalement optiques dont certaines personnes parlent. Ce n’est tout simplement pas possible, car il n’existe pas de système complètement optique », ajoute-t-il.
Les chercheurs ont détaillé dans leur nouvelle étude, la manière dont le commutateur bistable fonctionne à -50 degrés Celsius. Ils affirment notamment avoir réussi à faire fonctionner le dispositif à température ambiante : ce qui est très important si nous souhaitons un jour pouvoir utiliser ce type de transistors dans des conditions réelles. Les chercheurs prévoient de publier et de partager les détails sur comment ils ont réussi cet exploit dans (à paraître prochainement).
« Il s’agit d’un seul appareil qui fournit la bistabilité pour les fonctions électriques et optiques, avec un seul commutateur. C’est totalement nouveau, et nous travaillons dur pour définir davantage de nouvelles applications pour cet appareil », conlut Feng.