Les météorites révèlent beaucoup sur les origines de la Terre et les conditions qui existaient lors de la formation du Système solaire. Récemment, une équipe de chercheurs canadiens a découvert au moins deux nouveaux minéraux, jamais décelés jusqu’ici sur Terre, dans une météorite de 15 tonnes trouvée en Somalie — la neuvième plus grosse météorite jamais découverte.
Le système solaire s’est formé il y a 4,5 milliards d’années par l’effondrement gravitationnel d’un noyau de nuage moléculaire, qui a entraîné la formation d’un disque circumsolaire de gaz et de poussières (parfois appelé nébuleuse solaire). Ce disque a finalement été transformé en un système planétaire composé d’une seule étoile centrale, le Soleil, entouré de quatre planètes telluriques dans le système solaire interne, de quatre planètes géantes dans le système solaire externe et d’une multitude de corps plus petits, y compris des astéroïdes, des lunes, des planètes naines et des comètes.
Les météorites sont des morceaux d’autres corps plus gros qui ont été brisés ou détruits, et qui sont arrivées sur Terre. La plupart provient d’astéroïdes brisés, bien que certaines proviennent de Mars ou de la Lune. Ainsi elles représentent certains des matériaux originaux qui ont formé les planètes il y a des milliards d’années. En étudiant les météorites, nous pouvons en apprendre davantage sur les conditions et les processus précoces de l’histoire du système solaire. Ceux-ci incluent l’âge et la composition des éléments impliqués dans les formations planétaires, les températures atteintes à la surface et à l’intérieur des astéroïdes, et le degré auquel les matériaux ont subi des impacts dans le passé.
Récemment, une équipe de chercheurs de l’Université d’Alberta a identifié dans la météorite El Ali, tombée en Somalie, deux nouveaux minéraux inédits sur Terre. Chris Herd, professeur au Département des sciences de la Terre et de l’atmosphère et conservateur de l’Université de la collection de météorites de l’Alberta, a décrit les découvertes lors du Space Exploration Symposium le 21 novembre.
Une météorite connue depuis des générations, mais identifiée seulement en 2020
Selon le Lunar and Planetary Institute, la météorite El Ali a été trouvée dans la région d’Hiiraan en Somalie, près de la ville d’El Ali, qui lui a donné son nom. Les éleveurs locaux rapportent qu’ils connaissaient ce rocher depuis plus de 5 à 7 générations, commémoré par le folklore, les chants, les danses et les poèmes. Etant métallique, ils utilisaient la roche comme une enclume sur laquelle ils éguisaient leurs couteaux. Il n’y avait pas d’autres débris dans les environs. Elle était connue sous le nom de « Nightfall ».
Elle pèse 15,2 tonnes, pour près de 2 m de large. En 2020, une tranche de 70 grammes de la météorite à base de fer a été envoyée à la collection de météorites de l’Université de l’Alberta pour classification. En collaboration avec des chercheurs de l’UCLA et du California Institute of Technology, Herd a classé la météorite d’El Ali comme une météorite du « complexe de fer, IAB », parmi les 350 autres de la catégorie. Il s’agit de météorites contenant un type composé de fer météorique (différent des fers magmatiques terrestres) parsemé de minuscules morceaux de silicates.
Deux nouveaux minéraux, une découverte surprenante
Alors que Chris Herd analysait la météorite pour la classer, il a vu quelque chose qui a attiré son attention. Il a alors fait appel à l’expertise d’Andrew Locock, directeur du laboratoire de microsonde électronique de l’Université d’Alberta.
Herd explique dans un communiqué : « Le tout premier jour où il a fait des analyses, il a dit : ‘Vous avez au moins deux nouveaux minéraux là-dedans. C’était phénoménal. La plupart du temps, il faut beaucoup plus de travail que cela pour dire qu’il y a un nouveau minéral’. Il ajoute : « Chaque fois que vous trouvez un nouveau minéral, cela signifie que les conditions géologiques réelles, la chimie de la roche, étaient différentes de ce qui a été trouvé auparavant ».
L’identification rapide de Locock a été possible parce que les deux minéraux avaient été créés synthétiquement auparavant, il a donc pu faire correspondre la composition des minéraux naturels nouvellement découverts avec leurs homologues fabriqués par l’Homme.
Deux nouveaux noms à retenir, bientôt un troisième ?
Les deux minéraux ont été nommés Elaliite et Elkinstantonite. Le premier tire son nom de la météorite elle-même, El Ali. Herd a nommé le deuxième minéral d’après Lindy Elkins-Tanton, vice-président de l’ASU Interplanetary Initiative, professeur à la School of Earth and Space Exploration de l’Arizona State University et chercheur principal de la prochaine mission Psychè de la NASA.
Il faut savoir que la mission Psychè consiste en un voyage vers un astéroïde unique riche en métaux, en orbite autour du Soleil entre Mars et Jupiter. Ce qui rend l’astéroïde Psychè unique, c’est qu’il semble être le noyau de nickel-fer exposé d’une planète primitive, l’un des éléments constitutifs de notre système solaire.
Herde souligne : « Lindy a beaucoup travaillé sur la formation des noyaux des planètes, la formation de ces noyaux de fer et de nickel, et l’analogue le plus proche que nous ayons sont les météorites de fer. Il était donc logique de donner son nom à un minéral et de reconnaître ses contributions à la science ».
Actuellement, les chercheurs continuent d’examiner les minéraux pour déterminer ce qu’ils peuvent nous dire sur les conditions de la météorite lors de sa formation. Néanmoins, il semble déjà y avoir un troisième minéral potentiel à l’étude. Si les chercheurs pouvaient obtenir plus d’échantillons de la météorite massive, il y aurait une chance d’en découvrir bien davantage.
Malheureusement, selon certains rapports, la météorite, aiguisant les convoitises, a été transportée en Chine pour y être vendue sur les marchés internationaux. En effet, toute nouvelle découverte de minéraux pourrait éventuellement donner lieu à de nouvelles utilisations intéressantes et lucratives. Il reste à voir si des échantillons supplémentaires seront disponibles à des fins scientifiques.