Le LSD fait l’objet d’études de la part des neuroscientifiques depuis de nombreuses années. En effet, les chercheurs tentent encore de comprendre les mécanismes physiologiques qui sous-tendent les effets induits par la drogue sur le cerveau des consommateurs. Une nouvelle étude vient de révéler comment le LSD perturbe la communication entre différentes régions du cerveau.
Les scanners cérébraux d’individus ayant consommé du LSD ont révélé que la substance permettait à des parties du cortex d’être inondées de signaux normalement filtrés pour éviter la surcharge d’informations. La drogue permettait à un plus grand nombre d’informations de passer du thalamus à une région appelée cortex cingulaire postérieur, et limitait le flux d’informations à une autre partie appelée cortex temporal.
Cette perturbation de la communication peut sous-tendre certains des effets étranges rapportés par les utilisateurs de LSD, allant du sentiment de bonheur et d’harmonie aux hallucinations, et à ce que les scientifiques appellent la « dissolution du moi », où le sentiment de soi se désintègre.
Pour cette étude, les chercheurs ont invité 25 participants en bonne santé à subir un scanner sous l’influence du LSD et, à une autre occasion, après avoir pris un placebo. On leur a montré à l’avance le scanner pour s’assurer qu’ils se sentiraient à l’aise d’entrer à l’intérieur lorsque le médicament aurait été administré. Si la machine avait soudainement pris un comportement menaçant, les analyses n’auraient peut-être pas été aussi efficaces.
Les scientifiques ont voulu tester une hypothèse avancée pour la première fois il y a plus de dix ans. Elle suggère que le LSD empêche le thalamus de filtrer les informations qu’il transmet à d’autres parties du cerveau. C’est la dégradation de ce filtre qui provoque les effets étranges induits par le médicament.
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« Le monde qui nous entoure n’est pas le monde que nous percevons, car le thalamus filtre les informations qu’il considère comme non-pertinentes » déclare Katrin Preller, chercheuse sur le projet à l’hôpital universitaire de psychiatrie de Zurich. « Nous ne percevons pas nécessairement tout ce qui existe, ce serait une surcharge d’informations ».
Des analyses du cerveau des volontaires suggèrent que cette hypothèse est peut-être véridique. Sous LSD, le thalamus laisse passer plus d’informations vers certaines parties du cerveau et supprime les informations destinées à d’autres zones. « Ce que nous avons constaté, c’est que le modèle est généralement juste, mais la façon dont l’information est distribuée au cortex sous LSD est beaucoup plus spécifique que prévu » explique Preller.
Il est difficile de savoir dans quelle mesure la perturbation du flux d’informations dans le cerveau donne lieu à des sensations particulières liées au LSD, mais certains travaux antérieurs ont donné des indices. On pense que le cortex cingulaire postérieur, par exemple, joue un rôle dans le développement de la perception de soi, de sorte que le surcharger pourrait engendrer un sentiment de désintégration.
Le LSD, ou diéthylamide de l’acide lysergique, a été synthétisé pour la première fois en 1938, et a eu un impact profond sur la recherche en psychologie et en psychiatrie au cours des années cinquante et soixante. Bien que son adoption en tant que drogue récréative ait conduit à son interdiction, de nombreux scientifiques soupçonnent à présent qu’elle pourrait constituer une nouvelle arme puissante dans la lutte contre la dépression et d’autres troubles mentaux.
« Nous nous rapprochons de la compréhension de la complexité de ce qui se passe avec le LSD dans le cerveau, et cela est particulièrement important si nous voulons développer de nouveaux médicaments » ajoute Preller, dont la recherche a été publiée dans la revue Proceedings of the National Academy of Sciences.
Les travaux font suite à une étude majeure menée en 2016 et qui a révélé que, sous l’influence du LSD, le cerveau recrutait beaucoup plus de régions pour le traitement visuel que la normale, enrichissant les images que les gens voyaient, même lorsque leurs yeux étaient fermés. La recherche a été la première à montrer à quoi ressemblait le cerveau sous LSD, imagé par un scanner moderne.