La baleine bleue (Balaenoptera musculus) est une espèce de cétacés considérée comme le plus grand animal vivant, et également à avoir jamais vécu sur Terre. Considérées comme en danger d’extinction sur la liste des espèces menacées de l’IUCN — principalement à cause de la pêche intensive et des activités de navigation et exploitation —, les baleines bleues sont étroitement surveillées et protégées par les autorités. Il y a quelques années, des biologistes marins ont détecté des chants inhabituels dans la mer d’Oman et l’océan Indien plus largement. Après trois ans d’analyse minutieuse, ces chants ont été reliés à une population précédemment inconnue de baleines bleues. La découverte d’une nouvelle population de ces animaux est une excellente nouvelle, mais leur statut critique nécessite des mesures de protection immédiate.
Le chant inhabituel a été capté à trois endroits sous-marins différents, séparés par 3500 kilomètres d’océan. Enregistrés pour la première fois en 2017 au large de Madagascar, ces appels uniques ont ensuite été identifiés dans l’ouest de la mer d’Oman, au large d’Oman, ainsi que dans l’archipel des Chagos dans le centre de l’océan Indien.
Auparavant, on supposait que cette région n’abritait qu’une seule population de baleines bleues (Balaenoptera musculus), qui se distinguait par son propre chant. Les biologistes ont simplement supposé que toutes les baleines trouvées dans cette zone faisaient partie de cette population. Mais ces nouveaux sons ne correspondaient pas. Au lieu de cela, les chants indiquent qu’il y a au moins quatre populations dans cet océan avec des distributions distinctes ou se chevauchant partiellement. Les chants de baleines étant largement étudiés à l’échelle mondiale, en trouver de nouveaux est une véritable découverte.
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Une nouvelle population de baleine bleue identifiée
Analyser un appel enregistré à distance et essayer de le faire correspondre à une espèce de baleine individuelle, sans parler d’une population spécifique, est un travail difficile. Pourtant, même sans données visuelles ou génétiques, les chercheurs sont relativement convaincus que certains, sinon tous, de ces nouveaux enregistrements, appartiennent à une population de baleines bleues non identifiée auparavant.
Grâce à une comparaison minutieuse, l’équipe a conclu que les sons ne correspondaient à aucun autre candidat baleine local. De plus, quelques heures après que le chant des baleines a atteint les microphones au large des côtes d’Oman, des baleines bleues ont été observées. Bien que la structure des cris rappelle celle d’autres chants de baleines bleues, produisant des répétitions à basse fréquence et régulièrement espacées d’une seule phrase, elle montre toujours des attributs uniques.
« Compte tenu des attributs acoustiques du nouveau type de chant rapportés ici, et de la proximité documentée d’une baleine bleue avec notre enregistreur au large d’Oman lorsque ces chants ont été enregistrés, nous concluons qu’ils ont presque certainement été produits par une baleine bleue », écrivent les auteurs. On pense que les baleines bleues font partie des plus gros animaux à avoir jamais vécu sur Terre. Le fait que nous trouvons encore de nouvelles populations témoigne de l’immensité de l’océan, et la rareté de ces découvertes reflète quant à elle la cruauté de leur chasse.
Des baleines bleues longuement chassées
Pratiquement chassées jusqu’à l’extinction au 20e siècle, ce n’est que lorsque la Commission baleinière internationale a interdit la pratique en 1967 que les baleines bleues ont pu avoir une pause. En fait, cette nouvelle population au large des côtes d’Oman pourrait encore se remettre d’une chasse historique. Dans les années 1960, l’Union soviétique a participé à une chasse illégale intensive dans cette région, tuant 1294 baleines bleues au total.
Sur la base des données de capture nationales, les chercheurs suggèrent que cette population nouvellement découverte est probablement ce que les chasseurs soviétiques ciblaient autrefois. « De plus, l’aire de répartition potentiellement restreinte, la chasse historique intensive à la baleine et le fait que le type de chant n’a pas été détecté auparavant, suggèrent une petite population qui a un besoin critique d’évaluation de son statut et de mesures de conservation », rappellent les chercheurs.
Des mesures urgentes de surveillance et protection sont nécessaires
Si c’est le cas, ces baleines ont besoin de notre attention et de notre protection. Très rarement repérées au large des côtes d’Oman, il semble qu’elles se débattent pour survivre. Comme les autres baleines bleues, elles sont probablement menacées par les activités de pêche, la navigation, l’exploration et la production de combustibles fossiles et le développement côtier.
« Depuis 20 ans, nous concentrons nos travaux sur la baleine à bosse de la mer d’Arabie, en danger d’extinction, pour laquelle nous pensons qu’il ne reste qu’une centaine d’animaux au large des côtes d’Oman. Maintenant, nous commençons à peine à en savoir plus sur une autre population de baleines bleues tout aussi spéciale et probablement également menacée », déclare Suaad Al Harthi, directrice générale de l’Environment Society of Oman.
D’autres enregistrements au large d’Oman, du Pakistan et du nord de l’Inde pourraient aider à vérifier si ces baleines bleues appartiennent effectivement à une population nouvellement identifiée. Surtout si des données visuelles ou génétiques peuvent être recueillies. Des microphones sous-marins placés ailleurs dans l’océan Indien aideraient également à révéler la véritable étendue de cette nouvelle population et ses schémas de migration possibles. S’il s’agit d’une nouvelle population, il est essentiel que nous comprenions comment ces baleines évoluent afin d’assurer leur survie.