Une nouvelle technique décompose les « polluants éternels » (PFAS) à l’aide de la lumière

La technique brise les liaisons résistant aux procédés de dégradation conventionnels.

nouvelle technique decompose polluants eternels pfas aide lumiere couv 2
| Trust My Science
⇧ [VIDÉO]   Vous pourriez aussi aimer ce contenu partenaire

Une équipe de chimistes a développé une technique permettant de décomposer les substances perfluoroalkylées et polyfluoroalkylées (PFAS) – parfois surnommés « polluants éternels » – à l’aide de la lumière. En réagissant à la lumière émise par de simples LED, un photocatalyseur organique brise les liaisons carbone-fluor qui caractérisent les PFAS et résistent aux procédés de dégradation conventionnels.

Les PFAS sont des composés chimiques utilisés dans de nombreux produits de consommation en raison de leur résistance à l’eau et aux lipides. Ils sont par exemple présents dans les revêtements antiadhésifs des ustensiles de cuisine, les vêtements imperméables, les emballages alimentaires, certains produits d’hygiène et cosmétiques, la mousse anti-incendie, etc.

Surnommés à juste titre « polluants éternels », ces composés peuvent persister jusqu’à 1 000 ans dans l’environnement. Cette durée de vie exceptionnelle est due à la présence de liaisons carbone-fluor, figurant parmi les plus stables dans le domaine de la chimie. Ils résistent aux processus conventionnels de dégradation, notamment l’hydrolyse, l’oxydation et même aux enzymes microbiennes. En effet, les composés polyfluorés sont intrinsèquement étrangers à la biologie, et les milliards d’années d’adaptation évolutive de la vie sur Terre se sont produites avant leur utilisation.

En conséquence, ces composés se retrouvent désormais presque partout dans l’environnement : dans l’eau potable, le sol, la nourriture et les organismes vivants. Ils sont présents dans 31 % des eaux souterraines éloignées de toute source immédiate de contamination. Bien que certains centres d’épuration traitent les eaux contaminées par les PFAS, leurs procédés permettent uniquement de les concentrer, sans les éliminer complètement. Les matériaux résultants contiennent donc toujours des PFAS et sont généralement rejetés dans les décharges.

produits PFAS
Exemples de produits contenant des PFAS. © Ville de Riverside, Californie

Des études ont montré que l’exposition aux PFAS est liée à des risques plus élevés de cancer, de déficience immunitaire, de troubles hormonaux, etc. Les préoccupations croissantes en matière de santé publique ont conduit les chercheurs à explorer des moyens plus efficaces de les dégrader. Des techniques utilisant des métaux, tels que le platine, ont été proposées à cet effet. Cependant, elles sont très énergivores, sans compter que certains des métaux utilisés sont à la fois coûteux et difficiles à manipuler – limitant ainsi leur utilisation à grande échelle.

Une équipe de l’Université d’État du Colorado, à Boulder, propose une technique photocatalytique qui serait à la fois plus accessible et plus respectueuse de l’environnement. « Le système pourrait être économiquement viable et durable grâce au fait qu’elle est simplement basée sur la lumière – une source d’énergie facilement disponible », expliquent les chercheurs dans un article publié sur The Conversation. « À mesure que nous le perfectionnons, nous espérons qu’il pourra un jour fonctionner avec un apport énergétique minimal, en dehors de l’énergie alimentant la source de lumière », ajoutent-ils.

Un processus se produisant dans des conditions douces

La nouvelle technique, décrite dans la revue Nature, utilise un photocatalyseur organique qui, en réagissant avec la lumière, transfère des électrons aux molécules fluorées, brisant ainsi les liaisons carbone-fluor. En démantelant directement la structure moléculaire des PFAS, le processus permettrait d’effectuer une minéralisation complète, c’est-à-dire la transformation des composés toxiques initiaux en produits finaux non toxiques (des hydrocarbures et des ions fluorures) pouvant se décomposer facilement dans l’environnement. Les produits de dégradation secondaires pourraient ensuite s’infiltrer dans le sol en toute sécurité et être réabsorbés par les plantes.

plateforme pfas
La plateforme de réaction comprend de petits flacons contenant les composés et les réactifs, éclairés par deux petites LED bon marché. © Miyake et al.

La plateforme de réaction comprend des flacons contenant les composés et les réactifs, éclairés par deux petites LED bon marché. Deux petits ventilateurs ont été ajoutés afin de maintenir le système au frais au cours du processus, celui-ci se produisant notamment à basse température. « Il [le processus] fonctionne dans des conditions douces et n’utilise aucun métal, qui est souvent dangereux à manipuler et peut parfois être explosif », indique l’équipe.

La plateforme pourrait en outre être utilisée pour transformer d’autres molécules contenant des liaisons carbone-fluor en composés réutilisables, tels que les fluoroarènes, des réactifs fréquemment utilisés en laboratoire ou dans les processus industriels.

Des limites en matière d’efficacité et de durée de vie

Cependant, la plateforme présente des limites et nécessite encore un certain nombre d’améliorations avant de pouvoir être utilisée de manière pratique. Le processus ne peut être appliqué qu’à petite échelle et ne permet pas de décomposer les molécules volumineuses contenant des centaines de liaisons carbone-fluor, telles que le téflon, même à haute température. « Bien que notre dispositif expérimental soit efficace, il faudra une mise à l’échelle substantielle pour résoudre le problème des PFAS à plus grande échelle », a précisé l’équipe.

D’autre part, les photocatalyseurs organiques utilisés se dégradent à mesure qu’ils sont exposés à la lumière. Des catalyseurs à durée de vie plus longue seront donc nécessaires pour un potentiel déploiement à grande échelle, ainsi que des techniques permettant soit de les régénérer, soit de les recycler sans perte d’efficacité. L’équipe prévoit de poursuivre ses travaux afin d’identifier des réactions photo-réductrices plus efficaces et respectant ces aspects pratiques.

L’objectif à terme de la recherche serait de développer des plateformes pouvant éliminer définitivement les PFAS de l’eau dans les stations d’épuration. Les chercheurs espèrent également pouvoir utiliser leur technique pour décontaminer les sols, de sorte à les rendre à nouveau propices à l’agriculture et à la préservation de la santé des écosystèmes.

Source : Nature

Laisser un commentaire
electron particule elementaire L’électron est une particule élémentaire qui, avec les protons et les neutrons, constitue les atomes. C’est donc l’un des composants principaux de la matière baryonique. À ce titre, il revêt... [...]

Lire la suite