Que vous ayez étudié la biologie ou non, il est fort probable que vous soyez tombé plusieurs fois sur la représentation artistique/théorique d’un chromosome. Vous savez, cette forme en X (pour le chromosome X), désormais ancrée dans la mémoire de la plupart des étudiants universitaires et lycéens suivant un cursus scientifique. Bien que les chercheurs savent depuis longtemps que cette représentation est loin d’être exacte la plupart du temps, les technologies d’imagerie pour enquêter sur la composition interne de ces microstructures étaient jusqu’ici limitées. Récemment, des chercheurs ont pu détailler la structure de la chromatine (composant les chromosomes) à l’aide d’une nouvelle technique d’imagerie 3D à très haute résolution qu’ils ont mise au point.
Cette représentation populaire (en X ou en Y) est en réalité celle d’un chromosome durant la mitose (division cellulaire). C’est donc l’image que l’on donne à deux chromatides jointes après la réplication de l’ADN, avant que la mitose ne soit terminée. Un moment durant lequel elles se sont séparées pour devenir leurs propres chromosomes individuels.
Malheureusement, cette représentation pose un problème selon les scientifiques, car ce manque de précision empêcherait entre autres la compréhension de certains mécanismes moléculaires. « Dans 90% des cas, les chromosomes n’existent pas de cette manière », explique le médecin-scientifique Jun-Han Su, anciennement de l’Université de Harvard.
Dans une étude publiée cette année, Su et son équipe ont mis au point une nouvelle façon d’imager l’organisation 3D de la chromatine (au sein de laquelle l’ADN est empaqueté et compacté) dans les cellules humaines, ce qui permet de comprendre la chimie des chromosomes de manière beaucoup plus méticuleuse. Les résultats ont été publiés dans la revue Cell.
« Il est très important de déterminer l’organisation 3D pour comprendre les mécanismes moléculaires qui sous-tendent l’organisation, et également pour définir comment cette organisation régule la fonction du génome », explique le chercheur principal Xiaowei Zhuang.
Grâce à un nouveau système d’imagerie 3D haute résolution — qui consiste à réunir plusieurs instantanés de loci génomiques le long des chaînes d’ADN —, les chercheurs ont pu visualiser les chromosomes de près comme jamais auparavant, et même entrevoir certains aspects de l’activité de transcription.
L’équipe a déjà partagé ses données en ligne afin que d’autres chercheurs puissent approfondir leur analyse, et explorer davantage cette partie (presque) invisible du corps humain. « Nous envisageons une large application de cette technologie d’imagerie à haut débit, multi-échelle et multimodale, qui fournit une vue intégrée de l’organisation de la chromatine dans son contexte structurel et fonctionnel natif », explique l’équipe. Les chercheurs pourront d’ores et déjà caractériser ce que l’on appelle « les domaines de la chromatine », les compartiments et les interactions trans-chromosomiques et leur relation avec la transcription dans les cellules individuelles.