Les scientifiques ont désormais accès aux images les plus détaillées du Soleil en temps réel, grâce à une nouvelle mise à jour du télescope solaire possédant la plus haute résolution au monde, situé à l’observatoire solaire de Big Bear Lake (BBSO), en Californie.
L’observatoire astronomique BBSO est spécialisé dans l’étude du Soleil et ses instruments ont donc été pensés et fabriqués spécifiquement dans ce but. Grâce aux nouvelles capacités du télescope solaire, les chercheurs pourront désormais étudier des données provenant d’un champ de vision bien plus large de l’activité solaire, ce qui est vital pour notre compréhension des événements puissants tels que les tempêtes solaires, qui peuvent avoir un effet dévastateur sur nos satellites et nos technologies de communication.
« Pour comprendre les dynamiques fondamentales du Soleil, comme l’origine des tempêtes solaires, nous devons collecter des données dans un champ de vision aussi large que possible. Durant les éruptions solaires, par exemple, des changements de champs magnétiques semblent se produire à de nombreux endroits différents, presque simultanément », explique le physicien Philip Goode, du New Jersey Institute of Technology.
C’est dans le but de saisir une perspective plus large de l’activité solaire que l’équipe de Goode, y compris des chercheurs de l’Observatoire solaire national (NSO) et de l’Institut Kiepenheuer pour la physique solaire en Allemagne, a travaillé pendant plus d’une décennie sur ce que l’on appelle optique adaptative multi-conjugée, (multi-conjugate adaptive optics – MCAO)
Depuis son introduction en astronomie, il y a plus d’une vingtaine d’années, l’optique adaptative a permis des avancées remarquables en termes de qualité d’image et a conduit à des découvertes majeures dans le domaine de l’astrophysique. Il s’agit d’une technique dont le but consiste à restaurer en temps réel la qualité des images détériorées par la turbulence atmosphérique.
Le dispositif MCAO mis en place au BBSO consiste en trois miroirs déformables pour corriger les distorsions atmosphériques. En effet, lorsque la lumière du soleil entre dans l’atmosphère terrestre, celle-ci rencontre des flux d’air turbulents qui peuvent alors brouiller nos observations, de la même manière que de chaudes fumées d’échappement peuvent créer une brume tourbillonnante au-dessus de la surface d’une route. Cet effet est causé par le mélange des masses d’air à températures différentes, ce qui déforme la manière dont la lumière se propage à travers l’atmosphère. C’est également pour cette raison que les étoiles semblent scintiller lorsqu’on les regarde à l’oeil nu. Un effet que les télescopes conventionnels ne peuvent pas facilement compenser.
Le système MCAO corrige cette situation grâce à ses miroirs, guidés par des caméras extrêmement rapides fonctionnant à 2000 images par seconde. Chacun des trois miroirs capte la lumière à une altitude différente dans l’atmosphère terrestre : au niveau du sol, à 4,8 kilomètres de hauteur, et en haute altitude, à 9,7 kilomètres. C’est en analysant les images simultanément que le système corrige efficacement les distorsions lumineuses et produit une vision corrigée en temps réel de l’activité solaire, qui est désormais trois fois plus large que les observations précédentes. Cette mise à niveau signifie que nous pourrons observer des éléments tels que les tâches solaires massives, s’étendant sur 32’000 kilomètres de large dans la photosphère du soleil, en temps réel, alors qu’auparavant, nous ne pouvions voir qu’une partie plus étroite de l’événement sans distorsion.
« Ce n’est qu’en voyant l’éventail complet des éruptions solaires en même temps que nous pourrons mesurer avec précision la taille, la force et le séquençage de ces événements magnétiques. Nous pourrons également analyser les forces qui propulsent les champs magnétiques des étoiles, les faisant se tordre l’une autour de l’autre, jusqu’à ce qu’elles explosent, en expulsant ainsi des quantités massives de particules et de rayonnement qui, lorsqu’elles sont dirigées vers la terre, peuvent causer des perturbations », explique Goode.
Cette technologie pourrait donc nous aider à comprendre la façon dont nous sommes exposés aux tempêtes géomagnétiques sur Terre.