Le PDG d’une compagnie d’assurance récemment assassiné avait instauré une IA pour refuser des indemnisations de patients

Un acte de vengeance ?

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Brian Thompson, le PDG d’United Healthcare (UHC), a été assassiné mercredi à Manhattan. | UHC
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Brian Thompson, le désormais célèbre PDG d’United Healthcare (UHC), géant américain de l’assurance maladie, a été assassiné cette semaine à Manhattan. Les observateurs soupçonnent qu’il pourrait s’agir d’un acte de vengeance suite à l’utilisation par l’assureur d’un algorithme d’IA rejetant de manière draconienne les demandes d’indemnisation des patients. Alors que le suspect est actuellement recherché par la police, la fusillade a suscité des réactions virulentes témoignant de la frustration grandissante du public envers l’entreprise.

Âgé de 50 ans, Thompson a été victime d’une fusillade près de l’hôtel Hilton à Manhattan mercredi dernier, vers 6h45 du matin (heure locale), dans ce que la police de New York a qualifié d’assassinat « effronté » et « ciblé ». Il a par la suite été transporté à l’hôpital Mount Sinai, où il a officiellement été déclaré mort. PDG d’UHC depuis 2021, il devait faire une présentation aux investisseurs plus tard dans la journée.

D’après la police locale, le suspect se cachait près de l’hôtel plusieurs minutes avant la fusillade. De nombreuses personnes sont passées devant lui, mais il semblait attendre spécifiquement sa cible, ce qui indique clairement une attaque préméditée et planifiée. Il a fui les lieux à bord d’un vélo électrique en direction de Central Park, après avoir tiré dans le dos du PDG avec un pistolet muni d’un silencieux.

L’événement survient un an après un procès très médiatisé dénonçant l’utilisation par la société d’une IA pour trier les demandes d’indemnisation des patients âgés. Connu sous le nom de nH Predict, l’algorithme aurait refusé d’indemniser deux patients âgés alors que leurs demandes avaient été préalablement approuvées par leurs médecins. L’objet des demandes concernait des séjours en maison de retraite. L’utilisation d’un tel dispositif alimenté par l’intelligence artificielle n’est pas un cas isolé. En effet, l’année dernière, nous vous informions d’une méthode similaire employée par le géant Cigna, qui a également fait l’objet de poursuites judiciaires à cet égard.

UHC approuve les modalités de triage de l’algorithme malgré un taux d’erreur de 90 % (contre 80 % pour Cigna), selon les familles des deux patients aujourd’hui décédés. Toutefois, le procès est toujours en cours et ces allégations n’ont pas encore été approuvées par le tribunal. Néanmoins, la colère du public face à la propension de l’assureur à rejeter les demandes d’indemnisation ne fait que croître, si bien que certains soupçonnent que l’assassin de Thompson figure parmi les personnes ou l’une des familles dont la demande a été rejetée. Les indices porteraient à croire qu’il s’agit d’un acte de vengeance.

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Cette image fournie par le département de police de la ville de New York montre l’homme recherché pour un interrogatoire dans le cadre de l’enquête sur le meurtre de Brian Thompson. © NYPD

Un acte de vengeance contre l’assureur ?

La plainte des deux patients décédés affirme que l’UHC se base sur l’état de santé précaire des patients, leur manque de connaissances et leur manque de ressources pour approuver les décisions prises par l’IA. Cette dernière aurait été utilisée pour évaluer le diagnostic, l’âge, les conditions de vie et physique des patients afin de prédire leurs besoins, la durée estimée du séjour et la date cible de sortie des établissements de soins.

Selon Newsweek, la plainte indique également que « le système frauduleux offre aux défendeurs une manne financière évidente sous la forme de primes d’assurance sans avoir à payer pour les soins promis, tandis que les personnes âgées sont prématurément expulsées des établissements de soins dans tout le pays ou obligées d’épuiser les économies familiales pour continuer à recevoir les soins médicaux nécessaires, tout cela parce qu’un modèle d’IA n’est pas d’accord avec les décisions de leurs vrais médecins ».

Le meurtre de Thompson a déclenché une vague de réactions sarcastiques et de conversations sur les réseaux sociaux concernant les expériences négatives des patients et des familles avec la compagnie d’assurance. « Je serais heureux d’aider à rechercher le tireur, mais la vue n’est pas couverte par mon régime d’assurance maladie », peut-on par exemple lire dans un commentaire en réaction au décès du PDG sur Instagram, selon APnews.

D’autre part, bien que le suspect n’ait pas encore été arrêté et que le mobile du meurtre reste pour le moment inconnu, les mots « nier », « défendre » et « déposer » étaient inscrits sur les douilles des balles utilisées pour tirer sur Thompson. Cela ressemble fortement à l’expression « retarder, nier, défendre », faisant référence à un ensemble de stratégies couramment utilisées par les assureurs pour éviter de payer les indemnisations.

Ces indices en disent long sur la motivation de l’assassin. « Dans un cas comme celui-ci, sans savoir ce qui était écrit sur les balles, on pourrait dire qu’il s’agissait d’un employé de l’entreprise qui a été licencié. Mais la mention sur les munitions suggère quelque chose de différent », explique James Alan Fox, criminologue à l’Université Northeastern. « Il se peut que quelqu’un, le tireur ou un de ses proches, ait été assuré par cette entreprise et se soit vu refuser la couverture qu’il espérait, et ait probablement subi d’énormes dommages », suggère-t-il.

Cet événement ainsi que la réaction des internautes montrent une frustration et une colère évidentes contre l’assureur, qui semble avoir délaissé un grand nombre de patients. UHC a d’ailleurs été récemment cité dans un rapport du Sénat américain concernant l’augmentation, au cours des dernières années, du taux de refus des autorisations pour les prises en charge médicales pour certains patients disposant du Medicare Advantage (un plan de santé proposé par les entreprises privées). Le rapport cite également d’autres assureurs, tels que Humana et CVS.

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