Un « miroir en argent » triple l’efficacité des cellules solaires en pérovskite, alternatives « bon marché » au silicium

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Vue d'artiste d'une cellule solaire pérovskite (cyan) avec une couche de matériau réfléchissant placé en dessous (gris). | Chloé Zhang
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Le silicium est le matériau semi-conducteur standard le plus utilisé dans les cellules solaires et un matériau naturel abondant. Cependant, il est coûteux à extraire et à purifier. Les pérovskites se sont révélées extraordinairement prometteuses ces dernières années comme alternatives moins coûteuses. Mais leur stabilité et efficacité à grande échelle faisaient défaut jusqu’à présent. Récemment, des chercheurs ont développé une nouvelle façon de produire ces cellules photovoltaïques, permettant d’augmenter de 250% l’efficacité du matériau en ajoutant une couche d’argent réfléchissant en dessous, comme un miroir.

Les pérovskites aux halogénures sont une famille de matériaux qui ont montré un potentiel de haute performance et de faibles coûts de production dans les cellules solaires. Les cellules solaires à pérovskite ont bénéficié de progrès remarquables ces dernières années avec des augmentations rapides d’efficacité, passant d’environ 3% en 2009 à plus de 25% aujourd’hui. Alors que les cellules solaires à pérovskite sont devenues très efficaces en très peu de temps, un certain nombre de défis restent à relever avant qu’elles ne puissent devenir une technologie commerciale compétitive.

En effet, les cellules solaires à pérovskite ont démontré des efficacités de conversion de puissance compétitives avec un potentiel de performances supérieures, mais leur stabilité est limitée par rapport aux principales technologies photovoltaïques, comme celles utilisant le silicium. De plus, malgré des améliorations rapides au cours des cinq dernières années en matière d’efficacité, les dispositifs à haut rendement n’ont pas pu être fabriqués à grande échelle.

Récemment, une étude menée par Chunlei Guo, professeur d’optique à l’Université de Rochester, suggère que les pérovskites pourraient devenir beaucoup plus efficaces. Les chercheurs utilisent un substrat, sur lequel est déposée la couche fine de pérovskite, composée d’une couche de métal ou de couches alternées de métal et de matériau diélectrique plutôt que de verre. Ils ont découvert qu’ils pouvaient ainsi augmenter l’efficacité de conversion de la lumière de la pérovskite de 250%. Leurs découvertes sont rapportées dans la revue Nature Photonics.

Contrer la recombinaison électronique

Il faut savoir que lorsque le semi-conducteur est exposé à la lumière, il absorbe l’énergie de la lumière et la transfère aux électrons présents dans le matériau. Cette énergie supplémentaire permet aux électrons de traverser le matériau sous forme de courant électrique. Ce courant est extrait par des contacts métalliques conducteurs — les lignes en forme de grille sur les cellules solaires — et peut ensuite être utilisé pour alimenter le réseau électrique.

Cependant, il arrive que les « trous » laissés par ces électrons, autour de leur noyau atomique, soient à nouveau comblés par des électrons, perdant leur excitation, c’est la recombinaison électronique. Elle induit de fait une diminution de l’efficacité de la cellule photovoltaïque.

Le laboratoire de Guo a démontré qu’une telle recombinaison pouvait être pratiquement empêchée en combinant un matériau pérovskite avec une couche d’argent seul comme substrat ou constituée de couches alternées d’argent et d’oxyde d’aluminium, un diélectrique.

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Vue d’artiste d’une cellule solaire pérovskite (cyan) avec une nouvelle couche de matériau placé en dessous (gris), qui augmente l’efficacité en créant des réflexions de paires électron-trou (rouge et bleu). © Chloé Zhang

L’équipe affirme que cela crée une sorte de miroir qui produit des images inversées des paires électron-trou, ce qui réduit la probabilité que les électrons se recombinent avec les trous. Lors de tests, les ingénieurs ont montré que l’ajout de ces couches multipliait par 3,5 l’efficacité de la conversion de la lumière. Le laboratoire a pu utiliser un simple détecteur pour observer l’augmentation résultante de 250% de l’efficacité de la conversion de la lumière.

De grands défis à relever avant d’obtenir des panneaux solaires plus efficaces

Les chercheurs synthétisent généralement les pérovskites dans un laboratoire humide, puis appliquent le matériau sous forme de film sur un substrat en verre. Chunlei Guo, auteur principal de l’étude, déclare dans un communiqué : « Un morceau de métal peut faire autant de travail qu’une ingénierie chimique complexe dans un laboratoire humide ». Il ajoute : « Au fur et à mesure que de nouvelles pérovskites émergent, nous pouvons utiliser notre méthode basée sur la physique pour améliorer encore leurs performances ».

Néanmoins, plusieurs défis doivent être résolus avant que les pérovskites ne deviennent rentables pour des applications commercialisables. En premier lieu, il est difficile de produire un matériau de pérovskite uniforme et performant dans un environnement de fabrication à grande échelle, et il existe une différence substantielle entre l’efficacité des cellules à petite surface et celle des modules à grande surface.

En deuxième lieu, il faut rappeler que pour être efficaces dans la conduction au niveau des cellules solaires, les pérovskites doivent posséder un réseau inorganique spécifique : des octaèdres de plomb halogénés connectés uniquement par leurs sommets. Or, comme le souligne le CNRS dans un communiqué : « S’il est aisé de préparer de nombreuses compositions en changeant d’halogène et/ou de molécule organique, il est impossible de déterminer, en amont d’une synthèse, quelle sera la structure du matériau obtenu ». Récemment, des chercheurs du CNRS ont développé un outil d’apprentissage automatique permettant de déterminer instantanément si un nouveau composé sera de type pérovskite ou non, laissant entrevoir une possibilité de synthèse à haut débit de pérovskites. Leur étude est publiée dans la revue Advanced Materials.

Enfin, en troisième lieu, les cellules solaires à pérovskite démontrent une stabilité réduite par rapport au marché actuel. Elles ont notamment tendance à se dégrader relativement rapidement lorsqu’elles réagissent avec l’humidité et l’oxygène, ou lorsqu’elles restent longtemps exposées à la lumière, à la chaleur ou à une tension appliquée. Mais les technologies qui ne peuvent pas fonctionner pendant plus de deux décennies ont peu de chances de réussir, quels que soient les autres avantages.

Il reste donc de grands enjeux et défis à relever pour que les pérovskites révolutionnent l’industrie de l’énergie solaire, mais les dernières découvertes apportent de nouvelles voies de recherches prometteuses dans le contexte de la crise énergétique et climatique mondiale.

Source : Nature Photonics

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