Des chercheurs britanniques et chinois ont découvert une nouvelle famille de solitons topologiques 3D à lumière structurée : les hopfions photoniques. Leurs textures et leurs nombres topologiques peuvent être réglés librement et indépendamment. Un tel contrôle des propriétés topologiques ouvre la possibilité d’exploiter ces quasi-particules de lumière pour le transfert d’informations optiques.
Imaginez un rond de fumée volant dans les airs. Il peut se propager ainsi sans perdre sa forme, à moins de rencontrer une quelconque perturbation. De telles structures stables d’onde localisée ont été étudiées dans divers domaines de recherche, notamment dans les aimants, les systèmes nucléaires et la physique des particules. Ces structures, en revanche, peuvent résister aux perturbations grâce à ce que les scientifiques nomment « protection topologique ». « Les solitons topologiques avec une texture de spin topologiquement protégée sont d’un intérêt fondamental pour l’exploration de phénomènes physiques fascinants et de théories de champs non linéaires », soulignent les chercheurs.
Un exemple typique est la texture — semblable à un ouragan à l’échelle nanométrique — d’un champ magnétique dans des couches minces magnétiques, se comportant comme des particules (donc sans modifier leur forme) appelées skyrmions. Ces structures topologiques sophistiquées ont été considérées comme des supports d’informations prometteurs. Des structures similaires en forme de beignet (ou toroïdale) dans l’espace 3D, qui visualisent des distributions spatiales complexes de diverses propriétés d’une onde, sont appelées hopfions. Il est toutefois très difficile d’obtenir de telles structures avec des ondes lumineuses.
Une nouvelle famille de solitons topologiques 3D
Des études récentes de la lumière structurée ont révélé de fortes variations spatiales de la polarisation, de la phase et de l’amplitude, ce qui ouvre la possibilité de concevoir des structures optiques topologiquement stables se comportant comme des particules. De telles quasi-particules de lumière, dont les propriétés topologiques peuvent être finement contrôlées, présentent un grand potentiel, notamment pour le stockage et le transfert d’informations optiques et pour les technologies quantiques.
Seul un nombre très limité d’hopfions a été réalisé expérimentalement à ce jour. Par exemple, les hopfions magnétiques de type Bloch (vortex) et Néel (hérisson) peuvent être excités et exister dans un état stable dans les aimants chiraux. En photonique, seuls les hopfions d’ordre fondamental avec un indice de Hopf unitaire ont été rapportés, précisent les chercheurs, dont les travaux ont été publiés dans la revue Advanced Photonics. La génération et les propriétés des hopfions photoniques d’ordre supérieur et leur réglage topologique de la texture de spin restaient à explorer.
« Nous présentons une nouvelle famille très inhabituelle de solitons topologiques 3D en lumière structurée, les hopfions photoniques, dont les textures topologiques et les nombres topologiques peuvent être réglés librement et indépendamment, ce qui va bien au-delà des textures topologiques fixes d’ordre inférieur décrites précédemment », explique le premier auteur de l’étude, Yijie Shen, de l’Université de Southampton.
Shen et ses collègues ont en effet démontré la génération de modèles de polarisation avec des propriétés topologiquement stables en trois dimensions, qui, pour la première fois, peuvent être transformés et propagés de manière contrôlable dans l’espace libre. Les solitons topologiques tridimensionnels, tels que les hopfions, sont des configurations de champs continus localisés 3D avec des structures particulaires non triviales qui présentent une multitude de propriétés topologiques importantes, notent-ils.
Un principe applicable à d’autres types de quasi-particules topologiques
La génération et la caractérisation expérimentales de cette nouvelle famille d’hopfions ont révélé « une riche structure de textures de polarisation topologiquement protégées ». Contrairement aux observations précédentes d’hopfions localisés dans des matériaux à l’état solide, l’équipe a constaté qu’un hopfion optique était capable de se propager dans l’espace libre avec une protection topologique de la distribution de la polarisation. C’est justement cette structure topologique robuste qui est intéressante pour le développement de l’informatique et des communications topologiques optiques.
Les chercheurs précisent que ce modèle nouvellement développé d’hopfions topologiques optiques peut être facilement étendu à d’autres formations topologiques d’ordre supérieur, dans d’autres branches de la physique. Les hopfions d’ordre supérieur sont difficiles à observer dans d’autres domaines, de la physique des hautes énergies aux matériaux magnétiques. L’approche optique proposée par Shen et ses collaborateurs peut permettre une meilleure compréhension de ce champ complexe de structures dans d’autres branches de la physique.
« Nos résultats illustrent l’immense beauté des structures lumineuses », a déclaré Anatoly Zayats, professeur au King’s College de Londres et responsable du projet. L’équipe espère notamment que ses recherches ouvriront la voie à plusieurs applications de configurations lumineuses topologiques protégées dans les communications optiques, les technologies quantiques, les interactions lumière-matière, la microscopie à super-résolution et la métrologie.