La vitesse du son est la vitesse à laquelle les ondes sonores se déplacent à l’intérieur de différents milieux. Dans l’air, elle est de 340 m/s (ou 1224 km/h), mais elle a également été mesurée dans de nombreux autres matériaux liquides, solides et gazeux. La mesure de la vitesse du son est utilisée dans divers domaines allant de la sismologie à la médecine ; contraindre sa valeur est donc important. Récemment, des physiciens sont parvenus à déterminer la limite supérieure de la vitesse du son, c’est-à-dire la vitesse maximale que des ondes sonores peuvent atteindre. Ce résultat devrait améliorer l’étude de plusieurs phénomènes en physique de la matière condensée et en cosmologie.
Il est impossible de mesurer la vitesse du son dans chaque matériau existant, mais des chercheurs ont réussi à fixer une limite supérieure basée sur des constantes fondamentales, les paramètres universels par lesquels nous comprenons la physique de l’Univers. Cette limite de vitesse, selon les nouveaux calculs, est de 36 kilomètres par seconde. C’est environ deux fois la vitesse du son voyageant à travers le diamant.
Le son et la lumière voyagent comme des ondes, mais ils se comportent légèrement différemment. La lumière visible est une forme de rayonnement électromagnétique, ainsi nommée parce que les ondes lumineuses sont constituées de champs électriques et magnétiques oscillants. Ces champs génèrent une onde électromagnétique autoentretenue qui peut voyager dans le vide — et sa vitesse maximale est d’environ 300’000 kilomètres par seconde. Voyager dans un milieu, comme l’eau ou une atmosphère, la ralentit.
Le son est une onde mécanique, causée par une vibration dans un milieu. Au fur et à mesure que l’onde traverse le milieu, les molécules de ce milieu se heurtent les unes aux autres, transférant de l’énergie au fur et à mesure. Par conséquent, plus le support est rigide — plus il est difficile à comprimer —, plus le son se propage rapidement.
Des ondes sonores utilisées dans de nombreux domaines scientifiques
Par exemple, l’eau contient des particules plus compactes que l’air, et c’est en partie pourquoi les baleines peuvent communiquer sur de si vastes distances dans l’océan. Dans un solide rigide, comme un diamant, le son peut voyager encore plus vite. Nous exploitons cette propriété pour étudier l’intérieur de la Terre lorsque les ondes sonores des tremblements de terre la traversent. On peut même l’utiliser pour comprendre l’intérieur des étoiles.
« Les ondes sonores dans les solides sont déjà extrêmement importantes dans de nombreux domaines scientifiques. Par exemple, les sismologues utilisent des ondes sonores déclenchées par des tremblements de terre à l’intérieur de la Terre pour comprendre la nature des événements sismiques et les propriétés de la composition de la Terre. Elles intéressent également les scientifiques des matériaux car les ondes sonores sont liées à d’importantes propriétés élastiques, notamment la capacité à résister aux contraintes », explique Chris Pickard de l’Université de Cambridge.
Alors, comment étudier tous les matériaux possibles dans l’Univers pour déterminer une limite supérieure absolue de la vitesse du son ? C’est là que les constantes fondamentales sont utiles. Pour calculer la limite de vitesse du son, une équipe de physiciens de l’Université Queen Mary de Londres, de l’Université de Cambridge au Royaume-Uni et de l’Institute for High Pressure Physics en Russie a découvert que la limite de cette vitesse dépend de deux constantes fondamentales.
Vitesse maximale du son : elle dépend de deux constantes fondamentales
Il s’agit de la constante de structure fine, qui caractérise la force des interactions électromagnétiques entre les particules chargées élémentaires ; et le rapport de masse entre proton et électron, qui est la masse au repos du proton divisée par la masse au repos de l’électron.
« Les valeurs finement réglées de la constante de structure fine et du rapport de masse proton-électron, ainsi que leur équilibre, régissent les réactions nucléaires telles que la désintégration du proton et la synthèse nucléaire dans les étoiles, conduisant à la création des éléments biochimiques essentiels. Cet équilibre fournit une « zone habitable » étroite dans l’espace, où les étoiles et les planètes peuvent se former et où des structures moléculaires vitales peuvent émerger », écrivent les chercheurs.
« Nous montrons qu’une simple combinaison de la constante de structure fine et du rapport de masse proton-électron aboutit à une autre quantité sans dimension qui a une implication inattendue et spécifique pour une propriété clé des phases condensées — la vitesse à laquelle les ondes se déplacent dans les solides et liquides, ou la vitesse du son ». Pour confirmer son équation, l’équipe a mesuré expérimentalement la vitesse du son dans un grand nombre de solides et de liquides élémentaires, et les données ont renvoyé des résultats conformes à leurs prévisions.
Mieux comprendre la dynamique des matériaux et celle de l’Univers
Une prédiction spécifique de la théorie développée par l’équipe est que la vitesse du son devrait diminuer avec la masse de l’atome. Selon cette prédiction, le son devrait se déplacer plus rapidement à travers l’hydrogène atomique solide — qui ne peut exister qu’à des pressions extrêmement élevées, supérieures à environ 1 million de fois la pression atmosphérique de la Terre au niveau de la mer (100 gigapascals).
Obtenir un échantillon pour vérifier cette prédiction expérimentalement serait extrêmement difficile, l’équipe s’est donc appuyée sur des calculs basés sur les propriétés de l’hydrogène atomique solide entre 250 et 1000 gigapascals. Et ils ont constaté que, encore une fois, les résultats concordaient avec leurs prédictions. Si les résultats de l’application de l’équation de l’équipe restent cohérents, cela pourrait s’avérer être un outil précieux, non seulement pour comprendre les matériaux individuels, mais aussi l’Univers.
« Nous pensons que les résultats de cette étude pourraient avoir d’autres applications scientifiques en nous aidant à trouver et à comprendre les limites de différentes propriétés telles que la viscosité et la conductivité thermique pertinentes pour la supraconductivité à haute température, le plasma quark-gluon et même la physique des trous noirs », conclut le physicien Kostya Trachenko.