Face aux défis posés par les observations spatiales depuis la Terre, la Lune se présente comme une alternative prometteuse. Des scientifiques proposent d’y installer un « hypertelescope », utilisant un réseau de miroirs disposés dans un cratère lunaire. Bien que le concept soit encore à ses débuts, sa réalisation pourrait offrir une vision sans précédent de l’espace profond. Toutefois, des obstacles techniques et environnementaux restent à surmonter pour concrétiser cette idée.
Presque chaque avancée dans les technologies d’observation a permis de nouvelles découvertes sur l’Univers. Aujourd’hui, selon une nouvelle étude, la prochaine grande avancée pourrait être l’installation d’un télescope sur la surface lunaire. Face aux défis techniques et environnementaux rencontrés sur Terre, les scientifiques envisagent désormais d’exploiter le potentiel unique de notre satellite naturel pour y installer de nouveaux observatoires.
Récemment, deux chercheurs français ont dévoilé un plan, disponible sur la plateforme arXiv, pour y déployer « l’hypertélescope », une innovation qui pourrait transformer notre manière d’observer l’espace profond. Les implications d’un tel projet sont vastes, promettant des découvertes majeures.
Le concept d’hypertélescope
L’innovation en matière d’astronomie prend un tournant audacieux avec l’introduction du concept « d’hypertélescope ». Cette idée repose sur l’utilisation d’un ensemble de miroirs agissant collectivement comme un miroir principal, selon les auteurs de l’étude, Jean Schneider et Antoine Labeyrie. Ces miroirs seraient stratégiquement positionnés suivant le relief d’un cratère lunaire, exploitant ainsi les caractéristiques topographiques naturelles de la Lune.
Au cœur de ce dispositif, un groupe de détecteurs serait suspendu au-dessus du réseau de miroirs à l’aide d’un câble, capturant ainsi les images réfléchies par les miroirs. Les auteurs se sont inspirés du plan de l’observatoire d’Arecibo, à Porto Rico (qui s’est effondré en 2020). Ce dernier, utilisé par les astronomes du monde entier, avait notamment permis de découvrir les premières planètes en orbite autour d’une autre étoile que le Soleil.
L’un des avantages majeurs de cette configuration est la taille modeste des miroirs nécessaires, simplifiant ainsi leur fabrication et leur installation. De plus, en utilisant la concavité naturelle du cratère comme support, les interventions de modification du terrain, souvent coûteuses et complexes, seraient minimisées. Cette approche pourrait donc offrir une méthode efficace et économique pour observer l’espace depuis un point de vue unique.
Une variante de cette idée serait de placer les miroirs d’un côté du cratère et l’instrumentation de l’autre. Cela permettrait une très grande distance focale, mais la portée d’observation d’un tel télescope serait limitée.
Les défis lunaires à relever
L’idée d’installer un hypertélescope sur la Lune est certes séduisante, mais elle n’en est qu’à ses premières phases d’exploration et de conceptualisation. La mise en œuvre d’un tel projet présente des défis techniques considérables. Construire un observatoire, même sur notre propre planète, avec les spécifications requises pour ce type de télescope, est déjà une tâche ardue.
Les conditions lunaires ajoutent une autre couche de complexité. La fine poussière lunaire, ou régolithe, a tendance à s’accumuler et pourrait recouvrir les miroirs, compromettant ainsi leur efficacité. Cela signifierait que des systèmes de nettoyage régulier seraient nécessaires pour maintenir l’efficacité des miroirs.
De plus, bien que la Lune soit généralement plus stable que la Terre en matière d’activité sismique, elle n’est pas totalement exempte de tremblements. Ces mouvements, même minimes, pourraient désaligner les miroirs ou les détecteurs, nécessitant des ajustements fréquents pour garantir la précision de l’observation.
Des précédents prometteurs
L’ambition d’utiliser la Lune comme plateforme d’observation astronomique a des racines historiques. En effet, l’idée d’y établir des télescopes est ancienne. Dans cette optique, la NASA a reconnu le potentiel de la Lune comme site d’observation et a ainsi alloué des fonds pour explorer la faisabilité du Lunar Crater Radio Telescope (LCRT). Ce projet envisage également d’utiliser un cratère lunaire comme parabole naturelle pour un radiotélescope, exploitant ainsi les caractéristiques uniques de la topographie lunaire. Par ailleurs, les missions Apollo ont également souligné l’intérêt scientifique de la Lune pour l’astronomie. Lors de ces missions historiques, les astronautes ont déployé des rétro-réflecteurs sur la surface lunaire.
Ces instruments, bien que simples en apparence, ont joué un rôle crucial en permettant aux scientifiques sur Terre de diriger des faisceaux laser vers la Lune afin de mesurer le temps de retour du faisceau. Cette technique a permis de déterminer la distance entre la Terre et la Lune avec une précision millimétrique. Ces initiatives antérieures montrent clairement l’intérêt continu et croissant pour la Lune en tant que base d’observation astronomique. De plus, avec une telle (sur la Lune), loin des interférences atmosphériques et lumineuses de la Terre, elle pourrait capturer des images d’une clarté inégalée.
Entre les avancées technologiques et la volonté de repousser les limites de notre compréhension de l’Univers, il semble que la Lune pourrait être le prochain grand terrain de jeu pour les astronomes. Bien que des défis demeurent, le retour de l’Homme sur la Lune pourrait faciliter et accélérer ce projet de télescope lunaire.