« Point de basculement » de l’énergie solaire : la source énergétique dominante d’ici 2050 ?

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En vue de l’évolution actuelle de la transition énergétique, nous avons peut-être franchi un « point de basculement » irréversible qui fera du solaire la source énergétique dominante d’ici 2050, suggère une nouvelle étude. Cela est valable même sans le soutien de nouvelles politiques en faveur de la décarbonation. Cependant, des problèmes persistent quant à sa résilience et sa durabilité, leur résolution pouvant à terme être plus avantageuse pour le secteur que les politiques d’incitation (telles que la taxation carbone).

Il y a à peine une décennie, le déploiement d’énergies renouvelables était très souvent considéré comme trop coûteux, pas assez rentable, nécessitant ainsi fréquemment l’appui de subventions et de taxations carbone élevées. Cependant, les dernières avancées technologiques dans le domaine de l’énergie renouvelable ont permis de réduire considérablement les coûts. « En réalité, il existe un cercle vertueux entre les technologies déployées et les entreprises qui apprennent à le faire à moindre coût », explique Femke Nijsse, du Global Systems Institute de l’Université d’Exeter et auteur principal de la nouvelle étude codirigée par l’University College de Londres (UCL).

Une transition croissante sans nouvelles politiques de décarbonation

Entre 2010 et 2020, le coût global du déploiement des panneaux solaires a diminué de 15% chaque année. Parallèlement, cette réduction de coût a entraîné une augmentation annuelle de 25% en matière de capacité photovoltaïque installée. En comparaison, la capacité en énergie éolienne a augmenté de 12% par an. Si cette évolution positive est maintenue, les panneaux photovoltaïques pourraient devenir de façon irréversible le vecteur d’énergie renouvelable dominant d’ici une à deux décennies.

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Cependant, la plupart des organismes d’étude énergétique suggèrent que les systèmes électriques dominés par les combustibles fossiles peuvent largement persister, en raison d’une tarification carbone non optimale. Or, « les récents progrès des énergies renouvelables signifient que les projections dominées par les combustibles fossiles ne sont plus réalistes », estime Nijsse. En effet, les précédentes projections s’appuient généralement sur des modèles considérant uniquement le taux d’innovation, sans tenir compte d’autres facteurs tels que l’économie. De plus, elles auraient tendance à supposer que dans un avenir proche, nous atteindrions un seuil maximal en matière d’innovation.

Dans le cadre de la nouvelle étude, détaillée dans la revue Nature Communications, Nijsse est ses collègues se sont basés sur un modèle de simulation énergie-technologie-économie afin d’évaluer le niveau de déploiement des énergies renouvelables jusqu’en 2060. Les calculs ont été effectués en considérant les législations actuelles tout en supposant qu’aucune nouvelle politique ne sera adoptée pour soutenir la croissante transition énergétique. Ils précisent « qu’en utilisant ces trois modèles qui suivent les rétroactions positives, nous prévoyons que l’énergie solaire photovoltaïque dominera le mix énergétique mondial d’ici le milieu de ce siècle ».

Un besoin impératif de systèmes résilients et durables

Il est important de considérer que cette évolution s’effectuera uniquement à condition que les systèmes de production énergétique soient résilients et durables. Les systèmes électriques à dominance solaire pourraient être « enfermés dans des configurations qui ne sont ni résilientes ni durables, avec une dépendance aux combustibles fossiles pour l’énergie distribuable », précisent les chercheurs. Dans ce sens, 4 principaux obstacles doivent être surmontés, incluant notamment : l’instabilité des réseaux électriques, le manque de subventions dans les pays à faible revenu, la capacité réduite des chaînes d’approvisionnement et la résistance politique des régions et des secteurs subissant des pertes en raison de la transition.

La stabilité électrique figure en tant que pilier de la résilience de l’énergie solaire. Étant donné que la production de cette dernière est variable (en fonction du cycle jour-nuit, des saisons et de la météo), les réseaux de production doivent être adaptés. Sans cette adaptation, nous serions contraints de compenser l’énergie manquante avec les sources fossiles. Les chercheurs suggèrent de renforcer cette résilience en investissant par exemple dans d’autres sources renouvelables, dans les câbles de transmission reliant différentes régions et dans les systèmes de stockage durables (tels que les supercondensateurs). En parallèle, des politiques de gestion optimale de la demande pourraient aussi être instaurées (par exemple en incitant à charger les véhicules électriques en dehors des heures de pointe).

D’un autre côté, il est essentiel d’optimiser les chaînes d’approvisionnement. En vue de la croissance des technologies solaires, la demande de minerais et de métaux nécessaires à leur fabrication augmentera également. D’ici 2040, les dispositifs pour énergies renouvelables devraient accaparer 40% de la demande totale en cuivre et en terres rares, entre 60 et 70% pour le nickel et le cobalt et près de 90% pour le lithium. Sans solutions pérennes pour réduire la dépendance aux mines (par le biais du recyclage par exemple), cela pourrait aller en contradiction des actions en faveur de l’environnement. En outre, l’accélération de la conversion vers l’énergie solaire pourrait impacter jusqu’à 13 millions de personnes gagnant leur vie par le biais des combustibles fossiles. Cela pourrait accentuer la résistance à la transition verte, que des politiques adaptées de développement économique et industriel régional pourraient résoudre.

Par ailleurs, la transition énergétique solaire dépend fortement de la disponibilité des subventions. Pour l’heure, la plupart sont surtout disponibles dans les pays à revenu élevé et sont considérablement réduites dans ceux à faible revenu, surtout ceux d’Afrique. Paradoxalement, ces pays disposent des plus grands potentiels en matière de disponibilité en énergie solaire exploitable. « Notre étude révèle des obstacles persistants, surtout si l’on considère les défis auxquels ces pays sont confrontés pour accéder aux capitaux dans des conditions équitables », indique Nadia Ameli, de l’UCL. Selon le groupe d’experts, les politiques visant à résoudre ces obstacles pourraient à terme être plus avantageuses pour la transition et la décarbonation que celles d’incitation telles que la taxation carbone.

Source : Nature Communications

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