Genus, une entreprise pionnière en modification génétique animale, obtiendra d’ici peu l’approbation de la Food and Drug Administration (FDA) américaine pour la commercialisation de porcs génétiquement modifiés (via CRISPR) résistants au syndrome dysgénésique et respiratoire porcin (SDRP). La société a notamment pour objectif d’endiguer ce fléau, qui peut coûter jusqu’à plusieurs milliards de dollars par an aux éleveurs et constituer une menace pour la sécurité alimentaire. Si tout se déroule comme prévu, la viande devrait être disponible sur le marché d’ici la fin d’année.
Le SDRP (aussi appelé syndrome reproducteur et respiratoire porcin) est une pathologie virale causée par un Arterivirus et affectant les porcs d’élevage. Il se propage dans les troupeaux par voie aérienne, reproductive et transplacentaire, et peut rester contagieux pendant plusieurs années dans la viande congelée. La maladie peut survenir à tout moment de la vie de l’animal et se manifeste par une anorexie, de la fièvre, une léthargie et une dépression. La détresse respiratoire est particulièrement problématique chez les porcelets, chez lesquels la mortalité peut atteindre 100 %. Tel que son nom l’indique, l’infection affecte également la reproduction des animaux, provoquant des symptômes tels que des avortements spontanés et une haute mortalité à la naissance.
Bien qu’il existe des vaccins contre le SDRP, ils ne garantissent pas une protection à 100 %, car le virus a un taux de mutation très élevé, sans compter une plus grande vulnérabilité aux infections secondaires. En conséquence, les éleveurs sont souvent contraints d’euthanasier les animaux infectés.
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On estime que la maladie coûte jusqu’à 2,7 milliards de dollars par an à l’industrie porcine mondiale. En outre, « même si les maladies du bétail ont de profondes conséquences économiques, l’impact environnemental, la souffrance endurée par les animaux et les conséquences psychologiques sur les agriculteurs ne peuvent être négligés », a écrit l’équipe de recherche de Genus dans son étude, présentée dans le CRISPR Journal.
Afin d’appuyer l’industrie, Genus a développé une technique CRISPR visant à rendre les porcs résistants au SDRP. L’entreprise affirme qu’elle obtiendra d’ici la fin d’année l’approbation de la FDA pour une commercialisation généralisée. « Cela ne sert à rien qu’un porc tombe malade et meure s’il existe une approche permettant de l’empêcher génétiquement », a déclaré à Science Alison Van Eenennaam, généticienne animale à l’Université de Californie à Davis. Bien que la FDA ait déjà approuvé deux autres animaux CRISPR destinés à la consommation humaine, les porcs de Genus sont les premiers destinés à une large distribution.
Des porcs en bonne santé et résistants au SDRP
Il y a quelques années, des chercheurs ont identifié un récepteur transmembranaire appelé CD163 se liant spécifiquement au virus du SDRP pour infecter les cellules. Le domaine SRCR 5 (exon 7d) du CD163 a été spécifiquement identifié comme site d’interaction avec le virus. À l’aide d’une stratégie CRISPR-Cas9, des chercheurs sont parvenus à supprimer le domaine SRCR 5 chez le porc, désactivant ainsi le récepteur CD163 et conférant une résistance au virus. Cette spécification permet de conserver les autres fonctions biologiques utiles du récepteur.
Les travaux de Genus constituent une validation du concept, reproduisant les résultats dans un objectif de commercialisation. Dans cette vision, mis à part l’identification de la séquence génétique à cibler, plusieurs étapes techniques supplémentaires sont à considérer. L’allèle conférant la résistance à la maladie doit notamment perdurer dans des lignées génétiquement avancées (possédant une diversité génétique élevée), de sorte à induire des améliorations génétiques continues au fil des générations. D’autre part, l’allèle modifié ne doit pas avoir d’impact négatif sur les performances commerciales des animaux (taux de croissance, taux de reproduction, …). Cette approche rigoureuse permet de faciliter les procédures de mise sur le marché exigées par la FDA.
Pour ce faire, les chercheurs de Genus ont modifié 4 lignées différentes de porcs domestiques (Sus scrofa domesticus) couramment utilisées pour la production alimentaire. La modification génétique a été effectuée sur des embryons qui ont ensuite été transférés dans des truies pour la gestation. La production de plusieurs progénitures a permis de créer des races avec deux copies du récepteur CD163 désactivées. Par ailleurs, d’autres étapes consistaient à caractériser l’allèle CD163 modifié sur trois générations, afin d’identifier et d’éliminer les modifications non ciblées. Les experts ont produit avec succès des porcs en bonne santé et résistants au SDRP.
Une approbation inutilement rigoureuse ?
Dans l’ensemble, ces étapes sont exigées par la FDA pour la sécurité de l’allèle modifié, sa capacité à être hérité, sa stabilité au fil des générations et la résistance à la maladie obtenue par les porcs. Cependant, il s’agit d’une voie de réglementation particulièrement coûteuse pour l’entreprise et que certains experts jugent inutilement procéduriale. En effet, contrairement aux OGM, dans lesquels les ADN de différentes espèces sont mélangés, la technique CRISPR de Genus implique uniquement l’ADN du porc modifié et induit des modifications génétiques qui pourraient survenir de manière naturelle au fil des générations. Cela devrait logiquement accélérer la mise sur le marché, par rapport aux produits transgéniques.
Toutefois, l’allèle modifié CD163 n’a encore jamais été observé de manière naturelle chez le porc. En conséquence, « nous devons passer par le système d’examen complet de la FDA. Il n’y a pas de raccourci pour nous », explique Clint Nesbitt, biologiste moléculaire chez Genus. D’un autre côté, la réglementation du secteur est connue pour être particulièrement restrictive aux États-Unis, par rapport à d’autres pays. En Colombie par exemple, les administrateurs ont déclaré que contrairement aux animaux transgéniques, les porcs CRISPR seront réglementés de la même manière que ceux conventionnels. Néanmoins, l’entreprise est optimiste et affirme qu’il ne reste plus que quelques étapes avant l’approbation de la FDA. Elle prévoit également d’obtenir une approbation auprès de la Chine pour une exportation.