La maladie de Lyme, ou borréliose de Lyme, est transmise lors d’une morsure de tique infectée par une bactérie de type Borrelia. On compte chaque année de nombreux cas, notamment dans l’Est et le Centre de la France (plus de 60 000 cas en 2020, selon Santé publique France). Pour protéger définitivement les populations de cette maladie, les laboratoires Pfizer et Valneva ont mis au point un vaccin, nommé VLA15. Celui-ci vient d’entrer en essais de phase 3, qui consistent à tester son innocuité et son efficacité sur plusieurs milliers de volontaires.
Les adeptes de la randonnée savent que dès le début du printemps et jusqu’à la fin de l’automne la vigilance est de mise : des tiques infectées par une bactérie de type Borrelia peuvent se cacher dans les zones boisées et les hautes herbes, dans l’attente du passage d’un hôte potentiel. En cas d’infection avérée, un traitement par antibiotiques est efficace dans la plupart des cas. Mais si la maladie n’est pas diagnostiquée, des troubles neurologiques, articulaires ou cardiaques peuvent survenir plusieurs semaines, voire plusieurs mois après l’infection.
La maladie de Lyme sévit dans le monde entier, mais principalement dans l’hémisphère nord, en zone tempérée. Le vaccin VLA15 mis au point par Pfizer et Valneva confère une immunité contre six souches de la bactérie responsable de la maladie aux États-Unis et en Europe. Si les résultats de l’étude sont concluants, les deux partenaires pourraient demander une autorisation de mise sur le marché auprès de la FDA des États-Unis et de l’Agence européenne des médicaments dès 2025.
Un schéma vaccinal à trois doses
Les premiers symptômes de la maladie de Lyme (érythème migrant, ou d’autres symptômes moins spécifiques tels qu’une fatigue, de la fièvre ou des maux de tête) ne sont pas toujours interprétés comme il se doit. Or, en cas de traitement tardif, la maladie peut conduire à des complications sévères, qui nuisent à la vie quotidienne. Alors que la maladie continue à s’étendre géographiquement — notamment à cause du réchauffement climatique, qui favorise la prolifération des tiques — il devient urgent de disposer d’un vaccin.
L’étude de phase 2 a montré des résultats encourageants, tant en termes d’innocuité que d’immunogénicité, chez les adultes, comme chez les enfants. Aucun effet secondaire grave n’a été observé. Comme le soulignent les deux laboratoires, ce vaccin candidat contre la maladie de Lyme est à ce jour le seul en cours d’essai clinique.
Cette étude de phase 3 vise à évaluer l’efficacité, l’innocuité et la capacité du vaccin expérimental VLA15 à déclencher une réponse immunitaire au sein d’une cohorte plus large. L’étude, randomisée en double aveugle et contrôlée par placebo, devrait recruter environ 6000 participants, âgés de cinq ans et plus ; elle est menée sur un maximum de 50 sites situés dans des régions où la maladie est fortement endémique (notamment en Finlande, en Allemagne, aux Pays-Bas, en Pologne, en Suède et aux États-Unis), précise Valneva dans un communiqué.
Les participants recevront trois doses de VLA15 de 180 µg (ou un placebo salin) à titre de primovaccination — avant le début de la prochaine saison des tiques, au printemps — puis une dose de rappel (ou un placebo) un an plus tard. À ce jour, il n’est pas encore déterminé si d’autres rappels seront nécessaires pour maintenir l’immunité au fil du temps.
Empêcher la bactérie de quitter le corps de la tique
Le mode d’action du vaccin expérimental VLA15 est relativement atypique. Habituellement, les vaccins sont conçus pour entraîner le système immunitaire à reconnaître un agent pathogène (ou une partie de celui-ci), s’il pénètre dans l’organisme. La stratégie utilisée pour VLA15 est légèrement différente.
Les bactéries de type Borrelia qui sont responsables de la maladie vivent à l’intérieur de l’intestin des tiques ; elles sont transmises à l’Homme plusieurs heures ou jours après qu’une tique a commencé à se nourrir de son sang (d’où l’intérêt de retirer une tique au plus vite de sa peau dès qu’on la repère) — leur « repas » dure trois à cinq jours en moyenne. L’OspA est l’une des protéines de surface les plus exprimées par la bactérie Borrelia ; le vaccin VLA15 provoque la formation d’anticorps anti-OspA, mais ces derniers sont censés agir dans le corps de la tique et non dans notre organisme.
Ainsi, les chercheurs ont conçu ce vaccin pour que les tiques ingèrent les anticorps anti-OspA en se nourrissant de notre sang : une fois dans l’intestin de la tique, ils bloquent la transmission de la bactérie avant même qu’elle ne quitte le corps du parasite. Ce vaccin candidat couvre les six sérotypes d’OspA Borrelia burgdorferi présents en Amérique du Nord et en Europe.
À noter que ce n’est pas la première fois qu’un vaccin contre la maladie de Lyme est développé : le Lymerix, de Smith-Kline-Beecham, approuvé par la FDA, a été commercialisé aux États-Unis de décembre 1998 à février 2002. Il ciblait lui aussi la protéine Osp A. Mais une rumeur a rapidement associé ce vaccin à des symptômes d’arthrite (une relation qui n’a jamais été prouvée), ce qui a entraîné une chute des ventes conduisant son fabricant à le retirer du marché. Ce vaccin n’avait toutefois pas été testé chez les moins de 15 ans et est apparu alors que la maladie de Lyme n’apparaissait pas encore comme un véritable problème de santé publique.
En attendant la commercialisation d’un vaccin, les autorités sanitaires recommandent d’inspecter minutieusement son corps après chaque promenade dans la nature et de retirer la tique le plus rapidement possible en cas de morsure.