La technologie hyperloop a longtemps été un rêve d’auteur de science-fiction : de longs tubes transparents traversant la surface de la planète et acheminant des pods profilés pour la vitesse à plus de 250 km/h grâce à la sustentation magnétique. Au cours des dernières années, l’essor de l’ingénierie avancée a rendu ce concept bien plus concret et réaliste. Et l’une des entreprises s’étant lancée dans la course à l’hyperloop, Virgin Hyperloop, a réalisé le tout premier test humain en propulsant deux pilotes à plus de 170 km/h.
Virgin Hyperloop est devenue la première entreprise à effectuer dimanche un test humain de sa technologie sur sa piste d’essai de 500 mètres dans le désert, au nord de Las Vegas. Les deux volontaires, vêtus de vêtements de ville décontractés, ont été propulsés dans une nacelle mise en lévitation magnétique par des aimants à l’intérieur d’un tube à vide à 172 km/h, en 6.25 secondes.
Un test préliminaire pour éprouver la sécurité de la technologie
Les pilotes étaient assis dans des sièges moulés recouverts de cuir blanc, logés à l’intérieur de l’habitacle entièrement recouvert de fibre de carbone blanche. Alors que les forces G sur le pod étaient trois fois plus élevées que celles d’un avion, « c’était beaucoup plus fluide que ce à quoi je m’attendais », déclare Sara Luchian, 37 ans, l’une des pilotes d’essai et directrice de l’expérience. Et contrairement à un avion, il n’y avait pas de forces latérales qui auraient fait balancer la nacelle.
Le test de Virgin est peut-être aussi important symboliquement qu’il est crucial pour le succès ultime de la technologie. Alors que la nacelle se déplaçait à une vitesse beaucoup plus lente que ce que les partisans des hyperloops prétendent que la technologie est capable de faire, les responsables de l’entreprise l’ont décrite comme un jalon de sécurité.
« La question n °1 que je reçois des investisseurs est : Est-ce suffisamment sûr ? Nous sommes des gens ordinaires. Nous ne sommes pas des astronautes. Cela montre que c’est sûr, et les observateurs peuvent rapporter cela à leurs investisseurs et aux municipalités intéressées », déclare Josh Giegle, le directeur du projet.
Une technologie de transport potentiellement révolutionnaire
Le concept hyperloop moderne a été décrit pour la première fois en 2012 par Elon Musk, le dirigeant de SpaceX et Tesla (ex-CEO). Il a proposé l’idée à quiconque souhaitait l’exploiter, et ni lui ni ses entreprises ne travaillent sur des hyperloops. Virgin Hyperloop, qui compte le groupe Virgin de Richard Branson comme un investisseur minoritaire, est l’une des nombreuses sociétés qui cherchent à commercialiser la technologie, qui, espèrent-elles, permettra à terme de transporter des passagers entre les villes et des marchandises vers et depuis les ports.
Si la technologie fonctionne comme annoncé, le temps de trajet pourrait être considérablement réduit — un trajet de Los Angeles à San Francisco pourrait, par exemple, prendre moins d’une heure (à une vitesse de plus de 1000 km/h). Jay Walder, directeur exécutif, a une connaissance approfondie des systèmes de transport, ayant été à la tête de la Metropolitan Transportation Authority de New York et de Transport for London.
Il a affirmé que la technologie hyperloop pourrait être le premier nouveau système de transport en commun en un siècle. Contrairement aux trains, qui fonctionnent selon des horaires fixes, les pods hyperloop fonctionneraient davantage comme des ascenseurs intelligents. L’intelligence artificielle ajusterait les destinations, le nombre de pods qui voyagent dans un convoi et les heures de départ en fonction de la demande.
Les doutes de certains experts sur la viabilité de l’hyperloop
Cependant, de nombreux experts sont sceptiques quant au fait que la technologie puisse être à la hauteur de ses grandes promesses ou économiquement viable. Un camion heurtant le tube pourrait arrêter le système, explique Carlo Van de Weijer, directeur général de l’Eindhoven AI Systems Institute. À mesure que le système vieillirait, il nécessiterait une maintenance coûteuse. Les hyperloops pourraient également ne pas être en mesure de transporter autant de personnes ou de marchandises que ses partisans le prétendent, car les pods individuels devraient ralentir pour entrer dans les rails magnétiques.
À l’instar des systèmes ferroviaires à grande vitesse, les entreprises d’hyperloop devront acquérir des droits de passage coûteux, selon Juan Matute, directeur adjoint de l’Institute of Transportation Studies de l’Université de Californie à Los Angeles. Les tubes qui transportent les pods hyperloop devront être très droits pour les déplacements à grande vitesse et les virages devront être très larges. Une fois les itinéraires définis, l’acquisition de toutes les parcelles de terrain nécessaires pourrait devenir un cauchemar.
Pourtant, certains responsables gouvernementaux et entrepreneurs d’hyperloop sont déterminés à poursuivre la technologie. Virgin Hyperloop, qui a doublé son effectif (le faisant passer à 300) au cours des deux dernières années et a levé plus de 400 millions de dollars, a choisi la Virginie-Occidentale comme site pour un centre de certification et une piste d’essai de 10 km. Il a plusieurs projets en cours de planification : une route entre Pune et Mumbai en Inde, une autre entre Jeddah et Riyad en Arabie Saoudite et une reliant Chicago ; Columbus, Ohio ; et Pittsburgh.
Course à l’hyperloop : plusieurs entreprises en lice
Le conseil de la Mid-Ohio Regional Planning Commission estime que sur 30 ans, un hyperloop reliant ces villes remplacerait 1.9 milliard de trajets en voiture et en camion, réduirait les émissions de carbone de 2.4 millions de tonnes et générerait 300 milliards de dollars en avantages économiques.
Hyperloop Transportation Technologies, une société basée à Los Angeles et à Dubaï, a construit une piste d’essai de 320 mètres à Toulouse, en France, et conçoit une piste d’essai de 1000 mètres pour Abu Dhabi aux Émirats arabes unis. Elle a également formé un partenariat avec un opérateur de conteneurs du port allemand de Hambourg pour concevoir un système de transport de marchandises.
Aux Pays-Bas, Hardt, une entreprise d’hyperloop de 35 employés, a construit une piste de 30 mètres qui permet à l’entreprise de tester ses technologies de lévitation, de propulsion et de changement de voie. La société s’est associée à l’aéroport de Schiphol à Amsterdam pour étudier la faisabilité d’un hyperloop reliant les principaux aéroports des Pays-Bas, de France, d’Allemagne, de Belgique et de Grande-Bretagne.
Mais c’est le mouvement des marchandises que Hardt développe en premier. « C’est moins risqué et c’est plus facile pour les parties prenantes si nous ne mettons pas l’accent sur les passagers. Il est plus facile de faire les petits pas », explique le directeur commercial de la société, Mars Gueuze. Deux autres sociétés, TransPod à Toronto et Zeleros à Valence, en Espagne, travaillent également au développement de systèmes hyperloop.