Pour la première fois, des scientifiques démontrent comment les systèmes chaotiques se synchronisent

synchronisation systemes chaotiques
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La synchronisation, dans laquelle deux systèmes différents oscillent de manière identique, est à la base de nombreux phénomènes collectifs observés dans la nature, offrant un exemple de comportements émergents allant de l’unisson acoustique des chœurs de grillons, à la dynamique du cerveau humain. Toutefois, la manière dont les systèmes chaotiques se synchronisent échappait encore aux scientifiques. Une équipe internationale de physiciens a récemment résolu cette énigme, en mettant en évidence le processus de synchronisation en jeu. 

Les systèmes chaotiques peuvent-ils également se synchroniser ? Comment la synchronisation et l’auto-organisation émergent-elles de systèmes qui n’avaient pas ces propriétés initialement ? Caractériser et comprendre le passage du désordre au synchronisme est d’une importance fondamentale pour comprendre l’émergence de la synchronisation et de l’auto-organisation dans la nature, y compris la structure du cerveau humain et celle de l’ADN.

Dans une nouvelle étude publiée dans la revue Physical Review E, des physiciens de l’Université Bar-Ilan en Israël, ainsi que leurs collègues espagnols, indiens et italiens, ont analysé le système de Rossler, un système chaotique bien connu que les physiciens étudient depuis près de 40 ans. En examinant ce système sous un nouvel angle, ils ont découvert de nouveaux phénomènes jusqu’ici négligés.

La synchronisation topologique : l’importance de la structure des systèmes chaotiques

Pour la première fois, les chercheurs ont pu mesurer le processus qui mène du désordre au synchronisme, en découvrant un nouveau type de synchronisation entre systèmes chaotiques. Ils appellent ce nouveau phénomène la synchronisation topologique.

Traditionnellement, la synchronisation a été examinée en comparant l’évolution temporelle de l’activité des deux systèmes. La synchronisation topologique examine la synchronisation en comparant les structures des systèmes. Le système chaotique est donc examiné au niveau de sa structure, adoptant une approche plus globale pour déterminer le processus de synchronisation.

zones synchronisation progressive
La synchronisation topologique vise à étudier la synchronisation des systèmes chaotiques du point de vue structurel. La synchronisation débute d’abord de manière localisée entre les deux systèmes, avant de se généraliser. Ces structures en forme de donuts sont les structures globales du système de Rossler pour différentes intensités de couplage. Les points rouges représentent les petites zones locales, où la synchronisation a commencé. Crédits : Nir Lahav et al. 2018

« Les systèmes chaotiques, bien qu’imprévisibles, ont toujours une organisation globale subtile appelée ‘étrange attracteur’ » explique Nir Lahav, physicien à l’université de Bar-Ilan. « Chaque système chaotique attire son propre attracteur étrange. La synchronisation topologique signifie que deux attracteurs étranges ont la même organisation et les mêmes structures ».

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« Au début du processus de synchronisation, de petites zones d’un attracteur étrange ont la même structure que l’autre, ce qui signifie qu’elles sont déjà synchronisées avec l’autre attracteur. À la fin du processus, toutes les zones d’un attracteur étrange auront la structure de l’autre et la synchronisation topologique complète aura été atteinte ».

Une synchronisation progressive au sein des systèmes chaotiques

La découverte de la synchronisation topologique révèle que, contrairement à ce qui était supposé auparavant, les systèmes chaotiques se synchronisent progressivement à travers des structures locales qui, étonnamment, démarrent dans les zones clairsemées du système, et ne s’étendent ensuite que dans les zones les plus peuplées. Dans ces zones clairsemées, l’activité est moins chaotique que dans d’autres zones et, par conséquent, il est plus facile pour ces dernières de se synchroniser par rapport à celles qui sont beaucoup plus erratiques.

points synchronisation attracteur
Contrairement à ce que les physiciens pensaient, la synchronisation topologique des systèmes chaotiques montre que la synchronisation débute dans les zones les moins denses, puis se généralise à tout le système. Crédits : Nir Lahav et al. 2018

« Pour comprendre pourquoi c’est surprenant, imaginez ce scénario : deux groupes d’amis se rencontrent lors d’une soirée. Dans chaque groupe, nous pouvons trouver des extravertis, qui se connectent facilement avec des inconnus, et des introvertis, qui ont plus de difficulté à se connecter à un nouveau groupe » explique Lahav. « Nous supposerions que les premières connexions se produiraient entre les extravertis et que ce ne serait que plus tard que les introvertis créeraient des connexions. Il serait très surprenant de voir cela se passer dans l’autre sens. Mais c’est exactement ce que nous avons constaté dans nos résultats. Nous avons supposé que les zones denses du système, où se trouvent la plupart des activités, se synchronisent d’abord (comme les extravertis), mais en réalité, nous avons découvert que les zones de faible densité étaient les premières à se synchroniser (les introvertis) ».

zones synchronisation systeme chaotique
Les systèmes chaotiques possèdent des zones de densités différentes. Les zones structurellement plus denses mettent plus de temps à se synchroniser (points rouges). Crédits : Nir Lahav et al. 2018

Cette découverte concerne non seulement la compréhension fondamentale de la synchronisation, mais aussi des implications pratiques directes sur les limites de prévisibilité des systèmes chaotiques. En effet, grâce à cette synchronisation locale, les chercheurs ont montré que l’état d’un système pouvait être déduit des mesures de l’autre, même en l’absence de synchronie globale. Il est possible de prédire où les zones synchronisées apparaîtront, bien avant la synchronisation complète.

Les chercheurs approfondissent actuellement leurs résultats pour tenter de découvrir comment l’auto-organisation peut émerger dans d’autres systèmes complexes tel que le cerveau humain.

Sources : Physical Review E.

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