Des chercheurs coréens ont développé un système nerveux artificiel capable de simuler une réponse consciente à des stimuli externes. Le dispositif, doté entre autres d’une photodiode et d’une main robotisée, est capable d’attraper une balle au déclenchement d’un signal lumineux. L’idée étant de reproduire artificiellement la réponse neurologique humaine aux stimuli externes, pour pouvoir développer des prothèses ou des robots améliorés.
Lorsque nous sommes confrontés à certains stimuli externes (température extrême, signal lumineux, etc.), notre corps réagit de façon automatique et immédiate ; c’est grâce à ce mécanisme, par exemple, que nous avons le réflexe de retirer rapidement notre main d’un objet brûlant. Il s’agit dans ce cas d’une réponse inconsciente : la réaction est assimilable à un système de défense, avant même que notre cerveau ne perçoive la douleur.
Les réponses dites « conscientes », quant à elles, nécessitent un apprentissage par la répétition de stimulations. C’est ce type de réponse qui se produit lorsque l’on attrape un objet qu’on nous lance. Ce principe de stimulation-réponse nous permet de répondre efficacement aux changements environnementaux. Or, une équipe de chercheurs est parvenue à développer un système nerveux artificiel, capable de réponse consciente : il est capable d’activer une main robotisée en réponse à un signal lumineux, comme le ferait un être humain.
Un processus d’apprentissage indispensable
Le dispositif en question se compose d’une photodiode, qui convertit la lumière en un signal électrique, d’un transistor qui joue le rôle d’une synapse mécanique, d’un circuit neuronal artificiel, qui agit comme le cerveau du système, et d’une main robotique. Lorsque la photodiode détecte de la lumière, elle envoie un signal électrique à travers le transistor. Puis, ce signal est acheminé jusqu’au circuit neuronal artificiel.
Ce dernier reçoit le message « la lumière est allumée » et envoie un signal de réponse sous forme d’une commande à la main robotisée. Parallèlement, à l’instant où la lumière est allumée, une balle est lâchée au-dessus de la main ; l’objectif étant que le dispositif apprenne à refermer la main sur la balle au bon moment. Les chercheurs ont donc tenté de reproduire exactement ce qu’il se passe chez l’humain : notre œil transmet des signaux électriques via des synapses à notre cerveau, puis celui-ci traduit ces signaux et élabore un plan d’action adapté — généralement une série de mouvements musculaires — le tout en une fraction de seconde.
Mais le cerveau humain n’est pas si simple à imiter. Comme évoqué plus haut, les réponses humaines aux stimuli externes sont classées en deux types de réponses : inconscientes et conscientes. Les réponses inconscientes, telles que le réflexe du genou (lorsque la percussion du ligament rotulien entraîne l’extension de la jambe) ou l’expérience du chien de Pavlov (processus de conditionnement qui associe des stimuli externes à des réactions automatiques de l’organisme) n’impliquent pas de décision consciente. En revanche, les réponses conscientes — comme le départ d’un coureur dès que le signal retentit ou la capture d’une balle en vol — nécessitent un processus d’apprentissage par le cortex cérébral.
Ce type de réponse peut être contrôlé en apprenant à partir de stimuli et de réponses répétés, ce qui permet de moduler les connexions synaptiques et d’optimiser la réponse. Ainsi, lors des premiers essais, le circuit neuronal artificiel traduisait le signal lumineux beaucoup trop lentement : le temps nécessaire à l’activation de la main du robot était de 2,56 secondes. Par conséquent, la main ne parvenait pas à saisir la balle à temps.
Le processus d’apprentissage concernait la synapse artificielle ; il impliquait l’application d’une série d’impulsions positives pendant quelques secondes, en alternance avec des périodes d’oubli de 10 secondes chacune. Après ce processus d’apprentissage, l’intervalle de temps entre le signal externe et l’activation de la main robotisée s’est réduit à 0,23 seconde. Le système neuronal artificiel est donc capable d’émuler une réponse consciente et peut améliorer considérablement le temps de réponse après une phase d’apprentissage.
Vers le développement de systèmes d’assistance améliorés
Ce n’est pas la première fois que des scientifiques tentent de mettre au point un système capable d’imiter la réponse biologique humaine aux stimuli externes. Une étude publiée en 2018 dans Advanced Materials rapportait le développement de neurones sensoriels artificiels similaires à ceux de la peau ; dans cette étude, l’intégration d’une méthode d’apprentissage automatique avait permis de réduire considérablement le taux d’erreur de reconnaissance tactile. Un autre article paru en 2019 dans Nano energy présentait le développement de synapses photoniques artificielles.
Toutes ces recherches visent à trouver le moyen d’améliorer la qualité de vie de personnes atteintes de troubles neurologiques, notamment en leur offrant la possibilité de contrôler les membres ou les organes qu’elles ne peuvent plus contrôler aussi rapidement qu’auparavant. L’équipe à l’origine de ce nouveau réseau neuronal artificiel estime que son système imite véritablement une réponse biologique consciente. « Le fonctionnement de l’appareil est très prometteur, en particulier dans les tâches d’assistance humaine ou dans la formation de systèmes robotiques basés sur le mouvement humain », confirme le Dr Jonathan Aitken, du Département de contrôle automatique et d’ingénierie des systèmes de l’Université de Sheffield, qui n’a pas participé à son développement.
Aitken pense notamment que ce système pourrait être combiné à des dispositifs portables permettant de suivre la façon dont les gens se déplacent pour créer des robots entraînés à se comporter de la même manière. Cela pourrait, par exemple, permettre aux robots d’effectuer des tâches manuelles qui nécessitent de réagir à des circonstances externes.