Des protons aux planètes, en passant par les voitures ou les ponts, le phénomène de résonance est omniprésent. Si la résonance peut s’avérer utile dans certains systèmes, elle peut également se montrer dangereuse dans d’autres. Alors, qu’est-ce que la résonance et comment peut-elle s’avérer problématique pour l’Homme ?
La résonance, une question de fréquence et d’énergie
La résonance peut être décrite simplement comme l’apport périodique d’énergie à un système. Plus précisément, la résonance est le phénomène par lequel un système accumule périodiquement de l’énergie, et cette accumulation d’énergie entraîne l’apparition d’oscillations dont l’amplitude dépend directement de l’énergie totale du système. On dit que le système « entre en résonance ». L’énergie accumulée peut être une énergie cinétique ou potentielle.
Un exemple concret de la littérature scientifique est celui de la balançoire : lorsque l’on pousse une balançoire, chaque impulsion apporte une énergie supplémentaire qui vient s’ajouter à l’énergie totale que possède déjà le système. Cette dernière augmente donc à chaque poussée. Cependant, la poussée doit être appliquée au bon moment, autrement dit à la bonne fréquence (période) pour que l’énergie de chaque nouvelle impulsion s’ajoute parfaitement à l’énergie totale. Ainsi, plus la balançoire possède d’énergie, plus son amplitude est grande.
De cette définition de la résonance ressortent donc deux conditions essentielles : il doit y avoir une accumulation d’énergie par le système et cette accumulation doit être effectuée à une fréquence bien particulière dépendant du système. Cette dernière est appelée « fréquence de résonance ».
La résonance est un phénomène pouvant ainsi affecter de très nombreux systèmes : mécaniques, électriques, acoustiques… Tout système pouvant accumuler de l’énergie est donc potentiellement un système résonant. C’est par exemple le cas d’un proton (IRM), d’une corde (instrument de musique), d’un circuit électrique (émetteur radio), d’une maison, d’un pont, etc.
De la résonance à la rupture
Un système accumulant périodiquement de l’énergie à une fréquence égale à sa fréquence de résonance va être le siège d’oscillations dont l’amplitude est proportionnelle à l’énergie totale emmagasinée. En d’autres mots, plus un système accumule de l’énergie à sa fréquence de résonance, plus ses oscillations vont être importantes.
Certains systèmes dits « amortis » sont construits de telle manière à minimiser au maximum le phénomène de résonance en réduisant l’amplitude des oscillations. Pour ce faire, ces systèmes prévoient la dissipation de l’énergie accumulée par l’ajout de pièces dissipatives. Lorsque le système commence à accumuler de l’énergie, une part de celle-ci est dissipée et ne vient pas s’ajouter à l’énergie totale, diminuant donc l’amplitude des oscillations. Dans ce cas, le système retrouve son état d’équilibre plus ou moins rapidement.
En revanche, ce n’est pas le cas pour tous les systèmes. En effet, il en existe des systèmes peu voire pas du tout amortis. Pour un système peu amorti, la diminution de l’amplitude et la disparition des oscillations sont progressives et la plupart du temps très lentes. Alors qu’un système non-amorti accumulera périodiquement de l’énergie jusqu’à ce que l’amplitude et le nombre de ses oscillations soient si grandes qu’elles provoqueront la rupture d’une ou plusieurs parties du système.
Les dangers et effets néfastes de la résonance
La résonance peut être volontairement recherchée par l’Homme ou au contraire impérieusement évitée. Elle s’avère ainsi problématique dans beaucoup de domaines. Plus particulièrement en ingénierie où diverses structures destinées à l’Homme sont soumises régulièrement à la résonance.
C’est notamment le cas des grands immeubles soumis aux tremblements de terre. Les ondes sismiques sont des ondes mécaniques se propageant dans le sol à une fréquence déterminée. Les vibrations engendrées par ces ondes sont communiquées aux immeubles qui emmagasinent progressivement de l’énergie durant le séisme. Si la fréquence des vibrations correspond à la fréquence de résonance de l’immeuble, ce dernier subit des oscillations d’amplitude croissante jusqu’à devenir instable et s’effondrer.
C’est pourquoi plusieurs dispositifs existent afin de réduire la résonance des immeubles. Ils peuvent être classés en deux catégories : les pendules et les amortisseurs. Les pendules sont des oscillateurs présents au sein des immeubles dont la fréquence d’oscillation est égale à la fréquence de résonance de l’immeuble ; lors d’un séisme, au lieu d’être communiquée à l’immeuble, l’énergie est absorbée et dissipée par le pendule. Les amortisseurs sont des vérins hydrauliques ou hystérétiques (à frottements) qui dissipent l’énergie cinétique des vibrations.
La résonance affecte aussi les ponts. L’exemple le plus connu de destruction d’un pont par résonance est celui du pont suspendu de la Basse-Chaîne en 1850 : la marche au pas de militaires a provoqué des vibrations de même fréquence que la fréquence de résonance du pont, celui-ci a fini par s’effondrer, entraînant la mort des 226 soldats. Plusieurs autres pont ont dû être stabilisés par la suite ; notamment le pont du Millénium à Londres, où la marche des piétons sur ce dernier présentait de sérieux risques de rupture par résonance.
La résonance pose également problème dans le domaine de l’aérospatial avec « l’effet pogo ». Lors du décollage et du transit, le moteur d’une fusée passe par différentes phases d’accélération. Ces multiples accélérations créent des vibrations sur toute la structure de la fusée. Si ces dernières ont une fréquence égale à la fréquence de résonance de la structure, alors celle-ci peut se disloquer. Plusieurs exemples de destruction par effet pogo existent : les fusées françaises Émeraude en 1964, la fusée soviétique N1 en 1972, etc.
De manière moins « spectaculaire », la résonance pose problème dans le domaine automobile. À grande vitesse, les irrégularités de la route provoquent des vibrations communiquées à la carrosserie, générant un tremblement inconfortable et des bruits de vrombissement relativement gênants. Pour réduire l’effet de résonance, les voitures comportent des amortisseurs destinés à dissiper une partie de l’énergie des vibrations.
Bonus : vous vous êtes peut-être déjà demandés pourquoi votre verre « chante » lorsque vous faites tourner votre doigt mouillé sur son bord. Là encore, c’est une manifestation de la résonance. Lorsque le doigt glisse sur le verre, cela crée des vibrations (statiques et dynamiques) engendrant des oscillations dans la structure.
Si la fréquence des oscillations est la même que la fréquence de résonance du verre, les vibrations de ce dernier sont communiquées aux molécules d’air autour du verre, provoquant un son caractéristique. Quand l’amplitude des oscillations atteint une valeur critique, le verre se brise. Vouloir briser un verre avec sa voix nécessiterait ainsi d’émettre une note de fréquence identique à celle du verre, et de tenir cette note suffisamment longtemps.