Quiconque s’est déjà initié au jardinage sait que cette activité demande beaucoup de soin, d’attention… et de connaissances des plantes ! Il n’est pas toujours évident de déterminer la juste dose de soleil, de nutriments et d’eau à apporter à chaque espèce végétale. Pour rendre la tâche plus facile, des chercheurs de l’Université de Californie à Berkeley ont développé un système automatisé à base d’intelligence artificielle, baptisé AlphaGarden, qui apporte aux plantes ce dont elles ont besoin, quand elles en ont besoin. Non seulement ce robot s’avère aussi performant que des jardiniers professionnels humains, mais il est bien plus économe en eau.
Le jardinage est un hobby très intéressant, parfois gratifiant, mais le plus souvent frustrant pour ceux qui n’ont pas la main verte. Et si une intelligence artificielle était capable de s’occuper d’un potager aussi bien qu’un jardinier professionnel ? C’est le défi relevé par une équipe de l’UC Berkeley, menée par Simeon Adebola. Ses collègues et lui ont mis au point un système capable de maximiser la santé et la croissance des plantes. Celui-ci se compose d’une caméra haute résolution et de divers capteurs, permettant de surveiller l’humidité du sol et la croissance des plantes.
Le système a été conçu pour une parcelle en polyculture — qui consiste, comme son nom l’indique, à faire pousser plusieurs espèces de plantes différentes sur une même zone. Cette approche présente plusieurs avantages : grâce aux différentes structures racinaires (propres à chaque espèce), les sols sont plus sains et nécessitent généralement moins d’engrais ; les polycultures sont par ailleurs souvent plus résilientes face aux extrêmes climatiques et aux ravageurs (ce qui signifie moins de pesticides). Ce type de cultures nécessite néanmoins davantage de main-d’œuvre, car chaque espèce pousse à son rythme et exprime différents besoins. Un système comme AlphaGarden pourrait grandement faciliter les choses.
Un robot qui tient compte du rythme de croissance de chaque plante
Les chercheurs ont souhaité évaluer les performances de leur système, en matière de productivité, comparativement à celles de jardiniers professionnels. Pour ce faire, ils ont utilisé deux parcelles, dans lesquelles ils ont introduit les mêmes séries de graines — 32 au total, de huit espèces de plantes, dont du chou frisé, des navets, de la laitue, de la coriandre, etc. L’une des deux parcelles a été confiée aux professionnels pendant deux mois, tandis que l’autre était supervisée par AlphaGarden.
Dans une seconde expérience, les conditions étaient les mêmes, mis à part le fait que le robot-jardinier pouvait échelonner la plantation des graines (en fonction du rythme de croissance de chaque espèce). Lors de la première expérience, les chercheurs avaient en effet récolté plusieurs données permettant d’améliorer le robot. Ils ont notamment ajusté un algorithme décrivant comment les taux de croissance de chaque espèce peuvent influer sur les autres lorsque toutes les graines sont semées en même temps. À partir de ces nouvelles informations, le robot a élaboré une plantation échelonnée pour optimiser la croissance de chaque espèce.
Outre sa caméra et ses capteurs d’humidité, l’appareil était doté d’un système d’irrigation au goutte-à-goutte, ainsi que d’un outil pour la taille. Les chercheurs précisent qu’ils devaient parfois intervenir lorsque ce dernier n’avait pas la mobilité suffisante ; dans ce cas, ils n’avaient qu’à suivre les instructions du système.
Résultats : dans l’entretien de sa parcelle, AlphaGarden s’est avéré aussi efficace que les professionnels du jardinage, qui avaient tous au moins dix ans d’expérience en moyenne. Les deux parcelles étaient tout à fait similaires en termes de couverture, de diversité et de taille des plantes ; celles-ci étaient en bonne santé. Mais l’équipe a relevé une différence importante : AlphaGarden a utilisé bien moins d’eau que les humains pour entretenir sa parcelle.
Des centaines de litres d’eau économisés en deux mois
Dans la seconde expérience, le robot a réussi à faire pousser les mêmes légumes en utilisant 44% d’eau en moins, rapporte IEEE Spectrum, ce qui représente une économie de plusieurs centaines de litres sur les deux mois de l’expérience — un avantage certain alors que les épisodes de sécheresse se font de plus en plus fréquents.
AlphaGarden a été présenté lors de l’IEEE International Conference on Robotics and Automation (ICRA) qui s’est tenue à Londres il y a quelques jours. Les chercheurs ont annoncé fièrement que leur système avait passé « le test de Turing pour le jardinage ». Cependant, le système peut encore être amélioré, ont-ils souligné. Ils ont rapporté en effet quelques dysfonctionnements au niveau de l’irrigation et de la taille, qui ont nécessité une intervention humaine.
L’équipe envisage essentiellement d’améliorer encore le simulateur de croissance afin d’optimiser davantage l’utilisation de l’eau. D’autres paramètres sont par ailleurs à explorer, tels que les sources de lumière artificielle. À plus long terme, les chercheurs espèrent étendre la quantité de plantes qu’AlphaGarden peut prendre en charge et peut-être l’adapter à l’agriculture verticale.
Le système est prometteur et pourrait peut-être un jour favoriser la polyculture. Mais comme le souligne IEEE spectrum, le coût de ce dispositif sera peut-être un frein à son développement à plus grande échelle.