Contrairement aux robots conventionnels avec des degrés de liberté limités, les robots mous démontrent une adaptabilité fonctionnelle avancée et permettent des mouvements complexes, comme la manipulation délicate d’objets ou l’adaptation à des environnements incertains. Récemment, des chercheurs ont mis au point un robot souple multifonction et capable de s’autodétruire à la demande. Sous l’influence d’UV et de chaleur, il se transforme en une simple flaque huileuse irrécupérable.
La plupart des systèmes robotiques traditionnels sont durs, c’est-à-dire composés de structures métalliques avec des articulations basées sur des roulements conventionnels. Bien que les robots durs capables de mouvement possèdent souvent des structures en forme de membres similaires à celles des animaux, le plus souvent, des structures non naturelles — par exemple des roues — sont utilisées. Les robots durs sont généralement actionnés et contrôlés électroniquement et nécessitent un interfaçage avec un ordinateur pour fonctionner.
En revanche, les robots mous sont plus simples à fabriquer et moins coûteux que les robots durs conventionnels et peuvent, à certains égards, être meilleurs dans la réalisation de mouvements complexes et de « fonction coopérative » avec les humains.
Développer des robots mous, actionnés pneumatiquement, capables de contrôler leur propre cycle de vie et de se dégrader à la demande sous une stimulation externe spécifique tout en maintenant une hyper-élasticité, est un véritable défi de recherche.
La première utilisation de ces robots souples concerne les systèmes biomédicaux, dans lesquels les interactions homme-machine sont importantes. Les robots imitant les tissus mous du corps pourraient effectuer des chirurgies non invasives ou délivrer un médicament, puis s’autodégrader, au lieu d’impliquer une mini chirurgie pour les retirer.
Une autre utilisation, plus militaire, serait celle d’un robot espion dont la mission serait de recueillir des renseignements sur l’ennemi avant de s’autodétruire, afin de ne pas tomber entre de mauvaises mains. Récemment, des chercheurs de l’Université nationale de Séoul ont mis au point un tel robot. Lorsqu’il est soumis à certains facteurs, il se dissout en une flaque huileuse. Leurs travaux sont publiés sur la plateforme arXiv.
Un robot mou difficile à faire disparaître
Il faut savoir que l’évolution des robots mous a amélioré leur capacité à imiter les fonctions individuelles des systèmes biologiques ainsi qu’à imiter le cycle de vie des organismes vivants, tels que la croissance, la guérison, la transition, la transformation et la mort.
Compte tenu du mimétisme du cycle de vie par les systèmes robotiques, la « mort » et « l’élimination » des robots mous après leur durée de vie opérationnelle suscitent une grande attention pour un environnement durable, sans accumuler les débris des systèmes robotiques inutiles, comme les débris spatiaux s’accumulant autour de la Terre.
Cette possibilité est notamment recherchée pour les robots souples transitoires ayant des applications uniques lors d’opérations militaires telles que le repérage, l’invasion ou le transport, sans être exposé aux ennemis ; l’exploration d’endroits dangereux tels que les hautes mers ou les zones radioactives.
Cependant, le problème principal dans l’élimination des robots mous est la gestion de leur matériau de châssis ; généralement un élastomère de silicone. L’extensibilité élevée et la capacité de traitement des élastomères de silicone en font un matériau de référence pour la robotique molle, mais l’élimination d’élastomères est difficile en raison de leur structure.
Un robot nouvelle génération autodestructible
Néanmoins, les matériaux mous sensibles, qui sont très stables mais rapidement dégradables sous des stimuli externes spécifiques, devraient surmonter ces inconvénients.
Ainsi, Seung-Kyun Kang de l’Université nationale de Séoul en Corée du Sud et ses collègues ont construit le robot à l’aide d’un composite de silicone qu’ils ont conçu, qui se dégrade rapidement après avoir été exposé à la lumière UV et à la chaleur. Comme le rapporte un article du New Scientist, le robot mesure environ 3 centimètres de long, possède quatre pattes et se déplace à l’aide d’un système pneumatique, en se tordant comme une chenille.
L’équipe a mis en situation (environnement inconnu) le robot afin de tester sa capacité d’autodestruction après avoir réalisé une mission. Les scientifiques expliquent que le robot a d’abord relevé la température d’un pistolet thermique, puis s’est déplacé vers une autre zone où, à l’aide de photodétecteurs, il a détecté de la lumière provenant d’une lampe UV.
Finalement, pour terminer sa mission (s’autodétruire), il s’est déplacé vers une plaque chauffante à 120 °C, qu’il a repérée au préalable. L’application de lumière UV (365 nm pendant 30 min) suivie de chaleur (120 °C pendant 60 min) a conduit à une décomposition complète par une transition de phase d’un état solide à liquide huileux. Concrètement, la chaleur externe est d’abord transférée de la plaque chauffante sous-jacente aux pieds du robot, puis dissipée dans tout le corps du robot.
L’intégration du robot avec une électronique flexible sous la forme de capteurs de contrainte, de température et de lumière UV, a fourni une multifonctionnalité permettant de contrôler le mouvement robotique, surveiller l’environnement environnant et s’autoprotéger, ou s’autodétruire en identifiant les conditions nécessaires.
Le concept et les matériaux illustrés dans cette étude ont de nombreuses applications potentielles, telles que les applications militaires télécommandées, les dispositifs sécurisés d’exploration matérielle, la robotique destinée aux zones dangereuses et le traitement efficace des déchets. De plus, des études de chimie plus approfondies sur ces composites de silicone peuvent permettre de réduire le temps de déclenchement et d’ainsi élargir le champ de la robotique molle.
Mais avant que des robots de ce genre ne deviennent des espions au service des gouvernements pour l’espionnage ou les missions militaires, de nombreux travaux supplémentaires restent à réaliser.