Le 23 juillet 2020, la sonde spatiale chinoise Tianwen-1 décollait du centre spatial de Wenchang. Après un voyage de sept mois, elle s’est positionnée en orbite autour de la planète rouge ; depuis le mois de février, l’orbiteur examine attentivement le site d’atterrissage, dans la région d’Utopia Planitia, où il est prévu d’envoyer le rover, nommé Zhurong. La manœuvre est planifiée pour ce vendredi soir, vers 23h00 UTC (soit vers 1h00 tôt demain matin, en France).
Quelques mois après la NASA, c’est donc au tour de l’Administration spatiale nationale chinoise (CNSA) de vivre les fameuses « 7 minutes de terreur », le laps de temps qui s’écoulera entre le moment où l’atterrisseur entrera dans l’atmosphère martienne et la réception des données par l’équipe terrestre. Pour la Chine, la pression est énorme : si l’atterrissage réussit, le Zhurong sera le tout premier rover non Américain à toucher le sol de Mars depuis 1971.
À partir des années 2000, la Chine a beaucoup investi dans son programme spatial pour rattraper son retard vis-à-vis des États-Unis et de la Russie. En 2019, elle a surpris le monde entier en devenant le premier pays à faire atterrir un engin sur la face cachée de la Lune. Puis, en décembre 2020, elle est devenue la troisième nation à rapporter des échantillons lunaires, via sa mission Chang’e 5. Et tandis qu’elle vient de mettre sur orbite le premier module de la future station spatiale chinoise, c’est une nouvelle étape majeure de la conquête spatiale chinoise qui se profile à l’horizon.
Un atterrissage sans « grue volante »
La sonde Tianwen-1, d’une masse d’environ cinq tonnes, comporte un orbiteur, un atterrisseur et un rover. Il est prévu que ce dernier circule sur le sol martien pendant trois mois. Équipé de diverses caméras, d’un radar à pénétration de sol et d’un spectromètre, l’engin doit remplir plusieurs objectifs scientifiques : étudier les roches et minéraux présents à la surface, caractériser la structure interne et l’atmosphère de la planète, puis détecter d’éventuelles traces d’eau récentes ou anciennes.
À l’instar de leurs prédécesseurs américains, l’atterrisseur et le rover pénétreront dans l’atmosphère martienne protégés par un bouclier thermique. Celui-ci sera ensuite éjecté, avant le déploiement d’un parachute qui ralentira la descente des engins. La suite des opérations différera quelque peu de la méthode américaine : tandis que la NASA avait opté pour un système de « grue volante » pour déposer son rover en douceur sur Mars, le module de descente chinois utilisera des propulseurs pour ralentir sa descente.
Un système de caméras et un lidar lui permettront de se diriger vers la surface. S’il touche le sol sans encombre, il déploiera alors une rampe pour « libérer » Zhurong, qui entamera sa mission d’exploration. Si la procédure se déroule comme prévu, la Chine deviendra la première à déployer un orbiteur, ainsi qu’un atterrisseur et un rover en une seule et même mission.
Comme pour toute mission de ce type, le site d’atterrissage a été sélectionné de manière à maximiser les chances de réussite : une zone proche de l’équateur (pour bénéficier d’un maximum d’ensoleillement), peu inclinée et dépourvue au maximum de rochers et de relief. La CNSA a retenu le site d’Utopia Planitia — là où s’était posé l’atterrisseur Viking 2 en 1976 — un large bassin d’impact d’environ 3200 kilomètres de diamètre. Les scientifiques pensent que la zone abrite d’importants dépôts de glace sous sa surface, ce qui en fait une région particulièrement intéressante pour l’étude de la planète et la recherche d’éventuelles traces de vie.
Une deuxième mission martienne déjà en préparation
Zhurong tient son nom du dieu du feu dans la mythologie chinoise ancienne. « Le feu a apporté chaleur et luminosité aux ancêtres de l’humanité, et le feu a illuminé la civilisation humaine. Nommer le premier rover chinois sur Mars comme le dieu du feu signifie allumer la flamme de l’exploration planétaire de la Chine », explique Wu Yanhua, directeur adjoint de la CNSA.
Outre l’analyse de roches et de glaces martiennes, Zhurong a également pour but d’aider la Chine à préparer sa future mission. Le 24 avril dernier, Zhang Kejian, le directeur de la CNSA, annonçait en effet que cette mission inaugurait le programme d’exploration Tianwen dédié aux planètes du système solaire. Une deuxième sonde martienne, visant à rapporter des échantillons de Mars d’ici 2030 est d’ores et déjà en développement.
Il sera sans doute plus délicat de suivre cet atterrissage en direct que celui du rover Perseverance… Pour le moment, aucun lien de diffusion n’a été communiqué. Il est probable que les autorités chinoises attendent confirmation de l’atterrissage avant de partager l’événement avec le reste du monde. N’oublions pas que depuis la toute première mission d’exploration de Mars en 1971 — la mission russe Mars 2 — seule la moitié des tentatives d’atterrissage sur la planète rouge ont réussi. Encore quelques heures de patience avant le verdict…