La physique stellaire est une branche de l’astrophysique axée sur l’étude de la formation et la dynamique des étoiles. Dans la grande majorité des cas, les astrophysiciens sont obligés de s’appuyer sur des simulations afin d’analyser le comportement des étoiles, les observations directes étant utiles, mais ne révélant que peu de données détaillées sur les processus impliqués. Récemment, une équipe de chercheurs a développé une simulation stellaire baptisée STARFORGE. Et il s’agit de la simulation de formation et dynamique stellaire la plus poussée et perfectionnée à ce jour, battant tous les records précédents de résolution et précision.
Une équipe comprenant des astrophysiciens de l’Université Northwestern a développé la simulation 3D la plus réaliste et précise de la formation d’étoiles à ce jour. Le résultat est une merveille mathématique visuellement étonnante qui permet de flotter autour d’un nuage de gaz coloré dans un espace 3D tout en regardant émerger des étoiles scintillantes.
Appelé STARFORGE (Star Formation in Gaseous Environments), le cadre de calcul est le premier à simuler un nuage de gaz entier — 100 fois plus massif qu’auparavant — où naissent les étoiles. Il s’agit également de la première simulation à modéliser simultanément la formation, l’évolution et la dynamique des étoiles tout en tenant compte de la rétroaction stellaire, y compris les jets, le rayonnement, le vent et l’activité des supernovae à proximité.
Alors que d’autres simulations ont incorporé des types individuels de rétroaction stellaire, STARFORGE les assemble pour simuler la façon dont ces divers processus interagissent pour affecter la formation d’étoiles. À l’aide de ce laboratoire virtuel, les chercheurs visent à explorer des questions de longue date, notamment pourquoi la formation d’étoiles est lente et inefficace, ce qui détermine la masse des étoiles et explique pourquoi elles ont tendance à se former en amas.
Mieux comprendre le processus de formation des étoiles
Les chercheurs ont déjà utilisé STARFORGE pour découvrir que les jets protostellaires — des courants de gaz à grande vitesse qui accompagnent la formation des étoiles — jouent un rôle essentiel dans la détermination de la masse d’une étoile. En calculant la masse exacte d’une étoile, les chercheurs peuvent alors déterminer sa luminosité et ses mécanismes internes, ainsi que faire de meilleures prédictions sur sa mort.
« Les physiciens simulent la formation d’étoiles depuis quelques décennies maintenant, mais STARFORGE est un bond en avant dans la technologie. D’autres modèles n’ont pu simuler qu’une petite partie du nuage où se forment les étoiles — pas le nuage entier en haute résolution. Sans avoir une vue d’ensemble, nous manquons de nombreux facteurs qui pourraient influencer le résultat », déclare Michael Grudić de Northwestern.
« La façon dont les étoiles se forment est une question centrale en astrophysique. C’est une question très difficile à explorer en raison de la gamme de processus physiques impliqués. Cette nouvelle simulation nous aidera à répondre directement aux questions fondamentales auxquelles nous ne pouvions pas répondre de manière définitive auparavant », précise Claude-André Faucher-Giguère de Northwestern.
Du début à la fin, la formation d’étoiles prend des dizaines de millions d’années. Ainsi, même si les astronomes observent le ciel nocturne pour avoir un aperçu du processus, ils ne peuvent voir qu’un bref instantané. « Lorsque nous observons des étoiles se former dans une région donnée, tout ce que nous voyons, ce sont des sites de formation d’étoiles figés dans le temps. Les étoiles se forment également dans les nuages de poussière, elles sont donc pour la plupart cachées », indique Grudić.
Une simulation impliquant des mécanismes physiques complexes
Pour que les astrophysiciens puissent visualiser le processus dynamique complet de formation des étoiles, ils doivent s’appuyer sur des simulations. Pour développer STARFORGE, l’équipe a incorporé un code de calcul pour de multiples phénomènes en physique, y compris la dynamique des gaz, les champs magnétiques, la gravité, le chauffage et le refroidissement et les processus de rétroaction stellaire.
Prenant parfois trois mois complets pour exécuter une simulation, le modèle nécessite l’un des plus grands supercalculateurs du monde, une installation soutenue par la National Science Foundation et exploitée par le Texas Advanced Computing Center. La simulation qui en résulte montre une masse de gaz — faisant des dizaines à des millions de fois la masse du Soleil — flottant dans la galaxie.
Au fur et à mesure que le nuage de gaz évolue, il forme des structures qui s’effondrent et se brisent en morceaux, qui finissent par former des étoiles individuelles. Une fois que les étoiles se forment, elles éjectent des jets de gaz vers l’extérieur depuis les deux pôles, perçant le nuage environnant. Le processus se termine lorsqu’il n’y a plus de gaz pour former davantage d’étoiles.
Le rôle essentiel des jets protostellaires
STARFORGE a déjà aidé l’équipe à découvrir une nouvelle vision cruciale du modèle de formation des étoiles. Lorsque les chercheurs ont exécuté la simulation sans tenir compte des jets, les étoiles se sont retrouvées beaucoup trop grosses — 10 fois la masse du Soleil. Après avoir ajouté des jets à la simulation, les masses des étoiles sont devenues beaucoup plus réalistes — moins de la moitié de la masse du Soleil.
« Les jets perturbent l’afflux de gaz vers l’étoile. Ils soufflent essentiellement du gaz qui aurait fini dans l’étoile et augmenté sa masse. Les astrophysiciens ont soupçonné que cela pourrait se produire, mais en simulant l’ensemble du système, nous avons une solide compréhension de son fonctionnement », conclut Grudić.
Vidéo de la simulation d’un nuage de gaz à partir duquel plusieurs étoiles se forment :