Un disque protoplanétaire est un disque de gaz et de poussières qui orbite autour d’une jeune étoile, et dont sont issues les planètes. De récentes observations au télescope dressent cependant un étrange constat : les disques protoplanétaires, où alternent vide et anneaux de matière, devraient abriter des planètes… mais il n’en est rien ! Toute la théorie de formation des systèmes planétaires serait-elle à revoir ? Non, répond une équipe de chercheurs japonais dans un article, paru hier dans The Astrophysical Journal. En se basant sur des simulations hydrodynamiques des gaz et des poussières des disques protoplanétaires, ils ont déterminé que ces disques protoplanétaires « incomplets » pouvaient s’expliquer par la migration vers leur étoile des planètes formées dans les anneaux extérieurs du disque.
Les disques protoplanétaires, ces amas de gaz et de poussière qui gravitent autour de jeunes étoiles, sont traditionnellement interprétés comme autant de systèmes planétaires en formation. La Terre serait la fille des anneaux de matière d’un tel disque dont seraient nées, il y a environ 4,5 milliards d’années, les différentes planètes du Système solaire, les géantes gazeuses dans ses anneaux externes et les planètes rocheuses dans ses anneaux internes.
Mais, depuis quelques années, la théorie semblait avoir du plomb dans l’aile. Les observations toujours plus précises du télescope ALMA, dans le désert d’Atacama, décèlent des disques protoplanétaires où alternent vide et anneaux de matière, ce qu’on explique par la formation de planètes… mais point de traces de ces astres dans les disques protoplanétaires ! Comment expliquer cette apparente aberration ? Des chercheurs japonais viennent de proposer hier une explication, dans la revue The Astrophysical Journal : les planètes absentes se sont bien formées sur place… mais elles ont migré depuis.
Des planètes migrantes
À la base de ces affirmations, des simulations hydrodynamiques du gaz et de la poussière à l’intérieur des disques protoplanétaires… qui ressemblent à s’y méprendre aux objets astronomiques qu’ils décrivent ! Les simulations des scientifiques montrent que, dans un disque à faible viscosité, l’anneau de matière dont est issue une planète ne la suit pas lorsqu’elle migre en direction de son soleil. Ainsi, les planètes laissent derrière elles le nuage de gaz qui les a vues naître, phénomène à l’origine des « planètes manquantes » dans les disques protoplanétaires.
Grâce à leurs simulations, les chercheurs japonais ont identifié trois phases d’évolution du disque protoplanétaire lorsque la planète se rapproche de son étoile. En phase I, l’anneau de matière initial reste intact malgré le départ de la planète qui en est issue. Puis, en phase II, l’anneau de matière se déforme tandis qu’un deuxième anneau de matière se forme au niveau de la nouvelle orbite de la planète. Enfin, en phase III, l’anneau de matière initial disparaît : seul le nouvel anneau de matière reste.
Ces différentes phases prennent des millions d’années à se dérouler, et sont donc, en théorie, observables dans l’espace. C’est ce qu’a pu constater l’équipe japonaise qui a découvert, parmi les observations du télescope ALMA, des disques protoplanétaires très proches de leurs simulations, dans chacune des trois phases identifiées.
Ces résultats permettent de comprendre l’absence de planètes près des anneaux extérieurs des disques protoplanétaires… mais il faudra attendre des télescopes à la résolution encore plus grande pour chercher les planètes qui se sont rapprochées de leurs étoiles, afin de déterminer à quel point ces simulations correspondent à la réalité.