La sonde Chang’e 6 a atterri sur la face cachée de la Lune et rapportera bientôt les premiers échantillons

La mission offrira pour la première fois l’opportunité d’analyser des matériaux provenant de la face cachée de la Lune.

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| CNAS
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Hier (dimanche) matin à 00h23 (heure française), la Chine a effectué son deuxième atterrissage en date sur la face cachée de la Lune, cette fois-ci dans le cadre de la mission Chang’e 6. La sonde est chargée de collecter des échantillons à l’intérieur du cratère d’impact géant Apollo puis de les renvoyer sur Terre. La mission offrira pour la première fois l’opportunité d’analyser des matériaux provenant de cette zone de notre satellite naturel. Le conteneur à échantillon sera de retour sur Terre, si tout se déroule comme prévu, le 25 juin prochain.

La face cachée de la Lune est l’une des régions les plus énigmatiques de notre système solaire. Alors que celle faisant face à la Terre est jalonnée de vastes plaines et de mers volcaniques (ou mers lunaires), l’autre face n’en possède pas et est particulièrement accidentée, pour des raisons qui demeurent mystérieuses. Ce relief implique aussi qu’aucune mission lunaire n’a jamais pu y atterrir avant 2019, avec la mission Chang’e 4.

Un autre défi majeur résidait dans la communication avec les atterrisseurs sur place, car cela nécessite des orbiteurs relais spéciaux. La récente mission Chang’e 6 a été facilitée par l’orbiteur lunaire Queqiao-2. Selon l’Agence spatiale chinoise (CNAS), l’ensemble a décollé de la Terre le 3 mai, puis a passé plusieurs semaines à ajuster sa trajectoire par rapport à la localisation de son site d’atterrissage, le cratère Apollo du bassin Pôle Sud-Aitken.

Une invitation à rêver, prête à être portée.

La combinaison atterrisseur-propulseur Chang’e 6 a ensuite quitté l’orbiteur pour se poser en toute sécurité hier, avec pour objectif de collecter les premiers échantillons provenant de cette région. « La mission Chang’e-6 est la première mission d’échantillonnage et de retour depuis la face cachée de la Lune », ont expliqué les responsables de la CNSA dans un communiqué. Ces échantillons pourraient fournir de précieuses informations sur cette région inexplorée de la Lune et potentiellement sur la formation du système solaire.

Un processus d’atterrissage délicat

Depuis son lancement depuis la Terre, la mission Chang’e 6 est passée par plusieurs étapes, dont le transfert Terre-Lune, la mise en orbite lunaire, la descente et l’atterrissage. L’atterrisseur-propulseur s’est séparé de l’orbiteur le 30 mai pour entamer une descente gravitationnelle progressive. La descente motorisée a débuté hier à 0h09 pour ajuster la position de l’appareil avant d’atteindre la surface.

Au cours de cette étape de descente, un système autonome de détection d’obstacles a été activé ainsi qu’une caméra à lumière visible, afin de délimiter la zone d’atterrissage en fonction des cycles de luminosité de la Lune. Puis, à environ 100 mètres au-dessus de la zone présélectionnée, un scanner laser 3D a été utilisé pour évaluer la sécurité de la zone d’atterrissage finale avant une lente descente verticale. Au cours des derniers mètres au-dessus de la surface, le moteur a été suspendu et l’atterrisseur s’est posé en chute libre, protégé par un système d’amortissement.

D’autre part, l’atterrisseur est équipé de plusieurs capteurs, notamment à micro-ondes, lasers et d’imagerie optique, permettant de mesurer la distance par rapport aux obstacles et la vitesse de descente. Un capteur à rayons gamma a également été utilisé pour évaluer avec précision la hauteur de l’engin par rapport au sol et éviter les interférences avec la poussière lunaire. L’atterrisseur dispose également de pieds rétractables servant d’amortisseurs supplémentaires.

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Schéma montrant les différentes phases de la mission d’échantillonnage lunaire Chang’e 6. © CNSA

Un échantillonnage rapide dans une fenêtre de 14 heures

Le cratère Apollo a été sélectionné pour l’atterrissage de la mission en raison de son haut potentiel géologique et les conditions de communication et de télémétrie idéales. Probablement riche en basalte, il fait 2500 kilomètres de diamètre pour une profondeur de 13 kilomètres. Il s’agit d’une zone d’impact datant de plus de 4 milliards d’années, soit l’une des plus anciennes de la Lune et du système solaire. Selon les astronomes, cet impact pourrait avoir laissé des matériaux résiduels dans le cratère. Les échantillonner pourrait ainsi fournir des informations sur l’histoire évolutive de la Lune.

Afin d’effectuer l’échantillonnage, l’équipe du CNAS mettra en place une réplique à grande échelle de la zone d’atterrissage sur la base des données transmises par Chang’e 6. La topographie et les conditions du sol seront reproduites avec fidélité. Cette simulation permettra d’évaluer et d’ajuster les stratégies d’échantillonnage et les procédures de contrôle des équipements, de sorte à garantir l’exactitude des instructions pour l’atterrisseur.

D’un autre côté, en raison de la rotation de la Lune, la fenêtre de communication avec la Terre est limitée, même avec l’appui de l’orbiteur relais Queqiao-2. Par conséquent, la durée d’échantillonnage sera réduite à 14 heures, contre 22 heures pour Chang’e 5, son prédécesseur — qui a atterri sur la face visible du satellite naturel.

Afin d’exploiter cette fenêtre de manière optimale, le système de prélèvement de Chang’e 6 a été conçu pour réduire au minimum les communications Terre-Lune et fonctionner avec un maximum d’autonomie. Alors que 1000 instructions (sous forme d’algorithmes) ont été envoyées à Chang’e 5 au cours de son processus d’échantillonnage, Chang’e 6 n’aura besoin, quant à lui, que de 400 instructions. L’échantillon d’environ 2 kg sera ensuite lancé par le biais de l’ascendeur (ou propulseur) vers l’orbiteur, qui, à son tour, le remorquera vers la Terre.

Les chercheurs du CNAS estiment que cette mission pourra établir des bases sur lesquelles les prochaines pourront s’appuyer. Parmi les missions à venir figurent notamment Chang’e 7, prévue pour 2026 et qui aura pour objectif d’explorer les réserves potentielles de glace d’eau au pôle Sud de la Lune. Chang’e 8 décollera deux ans plus tard pour tester les moyens d’exploiter les ressources locales, pour la construction par exemple.

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