Des scientifiques œuvrant dans une entreprise spécialisée dans la traduction affirment que le fameux phénomène connu sous le nom de « Singularité » serait pour bientôt. Une affirmation plutôt audacieuse, étant donné qu’aucun critère exact n’a jamais été défini sur le sujet.
Avez-vous déjà entendu parler du concept de « singularité technologique », ou plus simplement « la Singularité » ? Il s’agit d’une hypothèse, discutée de longue date, selon laquelle l’intelligence artificielle pourrait atteindre un point d’auto-amélioration au-delà duquel nous serions confrontés à des bouleversements imprévisibles touchant l’ensemble de la société humaine.
Le terme est évoqué dès les années 1950, mais Irving John Good, statisticien britannique, en donne en 1965 une définition qui pourrait s’approcher de son acception actuelle : « Mettons qu’une machine supra-intelligente soit une machine capable dans tous les domaines d’activités intellectuelles de grandement surpasser un humain, aussi brillant soit-il. Comme la conception de telles machines est l’une de ces activités intellectuelles, une machine supra-intelligente pourrait concevoir des machines encore meilleures ; il y aurait alors sans conteste une ‘explosion d’intelligence’, et l’intelligence humaine serait très vite dépassée. Ainsi, l’invention de la première machine supra-intelligente est [théoriquement] la dernière invention que l’Homme ait besoin de réaliser ».
Autrement dit, les intelligences artificielles, une fois devenues suffisamment intelligentes, seraient capables de s’améliorer et de se mettre à jour par elles-mêmes pour constamment améliorer leurs capacités. À partir de ce point de basculement, le rôle de l’espèce humaine pourrait être remis en question.
Un groupe de scientifiques italiens a récemment clamé que nous n’étions pas loin de ce point critique. Pour être exacts, nous aurions encore sept ans devant nous avant de l’atteindre. Leur affirmation est toutefois basée sur des faits assez spécifiques à leur domaine : la traduction. L’entreprise se nomme d’ailleurs Translated (« Traduit »).
« De nombreux chercheurs en intelligence artificielle pensent que résoudre le problème de la traduction linguistique est ce qui se rapproche le plus de la production d’intelligence générale artificielle (IAG) », peut-on lire dans un communiqué de cette entreprise. Leur argument : le langage est une capacité très naturelle à l’humain, et à l’inverse difficile à assimiler pour les machines. Pour eux, la capacité des machines à rattraper, voire à dépasser la capacité des humains à traduire le langage. pourrait donc être un motif pour déterminer le statut « d’Intelligence Générale Artificielle (IAG) ». Autrement dit, un programme à même de réaliser n’importe quelle tâche réalisable par un humain.
Le « time to edit » comme mesure de « l’intelligence » de l’IA
Pour annoncer cette fameuse arrivée de la singularité, les scientifiques de cette entreprise ont donc choisi de se baser sur une mesure particulière, le Time to Edit (TTE). Cette unité de mesure représente le temps nécessaire aux correcteurs humains professionnels pour corriger les traductions générées par une IA par rapport aux traductions humaines. Dans l’idée, si ce temps devient plus avantageux sur une traduction générée par IA par rapport à une traduction humaine, alors nous arriverons à un point de bascule, selon Translated. Or, le temps de correction nécessaire n’a fait que chuter depuis des années. Si l’on suit ce graphique, en 2015, il fallait à un traducteur humain environ 3,5 secondes par mot pour parvenir à une traduction optimale. En 2022, c’est plutôt 2 secondes. Et cela va decrescendo : d’où cette idée que d’ici sept ans, le point de bascule sera effectivement atteint.
Cette déduction est bien sûr intéressante par rapport au domaine de la traduction, et en dit long sur les évolutions du secteur. Toutefois, elle reste inscrite dans un domaine très spécifique, et repose sur une hypothèse qui reste à débattre : celui du langage humain comme référentiel absolu pour déterminer le « niveau d’intelligence » d’une IA…