Le syndrome de fatigue chronique, qui se caractérise par une fatigue intense, n’est pas psychosomatique, mais bel et bien d’origine biologique, confirme une étude. Abrégé EM/SFC et également appelé « encéphalomyélite myalgique », elle se manifeste par des symptômes tels qu’une fatigue intense et persistante, des difficultés de concentration, des insomnies récurrentes, des pertes de mémoire et parfois même des douleurs musculaires et articulaires. L’origine exacte demeure inconnue et, de ce fait, aucun traitement n’est disponible à ce jour. En somme, une maladie qui laisse les scientifiques perplexes depuis des décennies. Récemment, des chercheurs ont levé le voile sur divers mécanismes clés pouvant expliquer l’origine du SFC.
En 2016, les Instituts nationaux de la santé des États-Unis (NIH) ont réalisé une vaste étude sur le syndrome de fatigue chronique (EM/SFC). Cette dernière, faite bien avant l’arrivée de la COVID-19, constitue l’une des enquêtes les plus approfondies sur la maladie. En mars 2024, soit huit ans plus tard, une conclusion a enfin été tirée. Les chercheurs de l’étude considèrent l’EM/SFC comme étant « sans ambiguïté biologique ». En d’autres termes, elle est purement biologique, selon les résultats.
Pour parvenir à cette conclusion, les chercheurs se sont penchés sur l’analyse d’un groupe de 17 personnes ayant développé un EM/SFC suite à une infection. Ils ont notamment constaté des différences biologiques en analysant divers marqueurs sanguins. « Dans l’ensemble, ce que nous montrons, c’est que l’EM/SFC est sans ambiguïté biologique, avec plusieurs systèmes d’organes affectés », a déclaré dans un communiqué le neurologue Avindra Nath, auteur principal de l’étude et directeur clinique de l’Institut national des troubles neurologiques et des accidents vasculaires cérébraux (NINDS) des National Instituts of Health (NIH).
Bien que le SFC ait été intégré dans le classement international des maladies, lorsque les patients concernés consultent, les médecins les laissent souvent sans réponse claire. En effet, les médecins ont encore à ce jour tendance à considérer les symptômes comme étant majoritairement liés à des troubles psychosomatiques, anxieux ou dépressifs. Cependant, les résultats de l’étude de 2016 réalisée par les NIH pourraient enfin changer la donne. « C’est une maladie systémique et les personnes qui en sont atteintes méritent que leurs expériences soient prises au sérieux », poursuit Nath.
SFC : un épuisement du système immunitaire ?
La fatigue chronique touche environ 1 personne sur 200 dans les pays industrialisés. Les personnes atteintes ressentent généralement une fatigue persistante autant sur le plan physique que mental, le repos n’apportant qu’un soulagement très passager à cette sensation. Quelle en est la cause ? C’est ce que Nath et son équipe ont tenté d’éclairer en soumettant les participants de leur étude à des sessions d’imagerie cérébrale fonctionnelle (IRMf) et différents tests immunitaires.
Résultats : d’une part, l’étude montre que certains participants diagnostiqués avec l’EM/SFC ne présentent aucun signe biologique de maladie, avec des tests cognitifs dans la norme. D’autre part cependant, la majorité des participants présentent une activation chronique du système immunitaire et une fréquence cardiaque nettement plus élevée au repos que la normale. Cette modification du système immunitaire, en plus d’une altération du microbiote intestinal (notamment une population bactérienne moins diversifiée), aurait un impact sur leur système nerveux central, entraînant une baisse du niveau de catéchols (un composé chimique qui contribue à réguler le système nerveux).
De plus, il a été constaté durant l’étude que la zone temporo-pariétale droite (une partie du cerveau connue pour jouer un rôle clé dans la perception de la fatigue) des participants atteints d’EM/SFC ne fonctionnait pas normalement. En effet, lorsqu’une personne en bonne santé se met à faire de l’exercice physique ou mental, une activité intense est généralement visible par IRMf (IRM fonctionnelle). En revanche, chez les patients souffrant du syndrome de fatigue chronique, elle ne s’active que très faiblement.
« Nous avons peut-être identifié un point de convergence physiologique de la fatigue dans cette population », explique Brian Walitt, également auteur principal de l’étude et chercheur spécialisé dans l’EM/SFC au NINDS. « Plutôt qu’un épuisement physique ou un manque de motivation, la fatigue peut ici résulter d’un décalage entre ce qu’une personne pense pouvoir accomplir et ce que son corps est capable de faire », a-t-il ajouté. Quoi qu’il en soit, des études supplémentaires sont à prévoir. La principale limitation de cette étude étant le nombre limité de participants (faible échantillon).